Les règles relatives aux principales catégories de procès-verbaux constituant la constatation des infractions douanières et le secret professionnel
Mohamed BAZTAMI
Doctorant en droit privé
Le Code des douanes prévoit des modalités de contrôle des marchandises, des moyens de transport et des voyageurs. Mais les compétences des agents des douanes ne s’arrêtent pas à la recherche et à la saisie des marchandises de fraude. Leur rôle essentiel est l’établissement de l’infraction et la découverte des délinquants.
Le contrôle des marchandises permet également celui de l’expéditeur, du destinataire et du transporteur. Ainsi, bien qu’elle porte traditionnellement sur la marchandise, l’activité de surveillance et de contrôle s’est étendue aux opérations commerciales, la conciliation de la liberté de circulation et de la protection du territoire et des intérêts de l’État ne pouvant que favoriser le recours à des formes de contrôle à posteriori.
La marchandise représente la pierre angulaire du droit douanier et c’est historiquement autour d’elle que s’articule toute la réglementation.
Pendant longtemps, l’infraction douanière ne pouvait être que flagrante et la marchandise constituait seule la preuve de cette infraction. Il était donc indispensable que les douaniers disposent pour celle-ci d’un droit d’accès particulièrement étendu. Si cette « visite » des marchandises s’effectuait prioritairement au bureau lors du passage frontière, le dispositif a ensuite été complété par la reconnaissance d’un droit d’accès aux locaux pouvant contenir des marchandises.
Pour cela, l’administration des douanes a donc également le pouvoir de « visiter » les lieux professionnels ou privés qu’elle soupçonne d’abriter des marchandises ou des documents de fraude. Il s’agit d’atteintes au droit de propriété et à la protection du domicile strictement encadrés par le législateur. S’ils doivent pouvoir pénétrer dans les lieux privés, les agents des douanes doivent aussi pouvoir procéder à la capture des auteurs d’une infraction douanière.
Ainsi, les pouvoirs de contrainte sur les personnes, nés de la pratique ont été consacrés par la loi dans un cadre juridique strict. Enfin, dans le cadre de la lutte contre certains trafics particuliers, le législateur a accordé de larges pouvoirs aux agents de douanes, à la mesure des moyens employés par les réseaux organisés. Cet ensemble formant les pouvoirs mis à la disposition des agents des douanes par le code des douanes pour la recherche des infractions douanières préliminaires de droit commun.
Au cours de l’enquête douanière, les agents de l’administration peuvent obtenir la communication des documents écrits de toute nature (comptabilité, factures, copies de lettres, carnets de chèques, traites, comptes de banque…)[1] utile à l’accomplissement de leur mission, sans que le secret professionnel puisse leur être oppose, sauf de la part des auxiliaires de justice, ils peuvent également saisir des documents[2].
Comme dans une enquête préliminaire ordinaire, des témoins peuvent être entendus et des suspects interrogent, et bien que le code des douanes n’y fassent pas allusion ; rien n’interdit de pratiquer la garde n’a vue des suspects.
Les procès- verbaux de constat (ou d’enquête) constituent 1’aboutissement d’un contrôle d’écriture ou d’une enquête effectuée et permettent de ” récupérer” après coup des infractions qui ont échappé au service au moment de leur commission et qui ne sont donc pas flagrantes.
Bien évidemment, les juges du fond ont tous pouvoirs pour qualifier la nature à attribuer aux procès-verbaux.
Les infractions relevées en matière de contrôle à posteriori non sont reprises dans les procès-verbaux de constat. [Les contestations relatives à l’espèce, l’origine ou à la valeur sont soulevées après le dédouanement des marchandises lors des contrôles et enquêtes effectuées].
Il faut préciser que dans les procès-verbaux de constat, l’administration réserve ses droits contre” tous autres” qui devraient donc être autorisés à se prévaloir des garanties que la loi institue en faveur de tous les ” assujettis”.
Première partie : Les procès-verbaux revêtent-ils le caractère d’actes d’instruction ?
Par actes d’instruction et de poursuites, il faut entendre” tous actes ayant pour objet de constater les délits, d’en rechercher les preuves, d’en découvrir ou convaincre les auteurs et de s’assurer de la personne de ces demies” (DALLOZ, codes annotés, également pp)[3].
Le procès-verbal qui est la base de la procédure apparait donc bien un acte d’instruction et le plus important de tous[4].
Il convient cependant de distinguer, parmi ces procès-verbaux, ceux qui établis en état de flagrance, apportent indiscutablement la preuve d’un délit et ceux qui, dresses sur enquête s’apparentent à de simples rapports et ne font que recueillir des renseignements destines à éclairer les autorités appelées à statuer.
Pour que les procès-verbaux interrompent la prescription, d’après la jurisprudence, il faut qu’ils remplissent deux conditions. Le procès-verbal doit être régulier[5].
En revanche, il n’est pas nécessaire que le procès-verbal soit cru jusqu’à inscription de faux[6] ni qu’il soit dresse contre un individu déterminé[7] ni que l’acte interruptif soit connu de l’inculpe.
Ces principes généraux sont applicables en matière fiscale :
“II est constant, écrit Pegraverend, qu’un procès-verbal qui constate un crime ou un délit, lorsqu’il a été dresse…par les préposes charges dans les matières fiscales de
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constater les délits de fraudes, doit cotre considère comme un acte interruptif de prescription”[8].
Pour ce qui est des procès-verbaux de douanes, le problème de l’interruption de la prescription ne se pose que rarement à l’égard des procès-verbaux de saisie qui sont généralement dresses en état de flagrance, c’est-à-dire à un moment ou la prescription est à son point de départ et n’a nullement besoin d’être interrompue.
La vertu interruptive s’attache-t-elle aux procès-verbaux de constat ? L’administration qui tire de l’article 248 du code des douanes, le pouvoir de prouver par toutes voies de droit les infractions à la loi douanière, emprunte au droit commun ce mode de constatation.
En droit commun, la jurisprudence confère un effet interruptif non seulement au pro ces-verbaux véritable dresses dans les cas de délits flagrants mais encore à ceux qui sont dresses ainsi que le signale professeur Hugene Y[9] des jours, des mois. Ou même des années après l’infraction.
C’est précisément à cette dernière catégorie d’actes qu’appartement les procès verbaux de constat douaniers. Il faut donc en déduire qu’ils ont eux aussi le même effet interruptif que ceux émanant de la gendarmerie ou de la police, car en stricte logique, on ne saurait imagine que le même e délit constate à la fois par la gendarmerie et par la douane soit prescrit dans un cas et non dans l’autre.
D’ailleurs la Cour de Cassation française a déjà eu à s’occuper de cette question en matière fiscale et elle a admis[10] que les procès-verbaux de constat établis par les agents de l’enregistrement constituaient des actes d’instruction et de poursuite et avaient par conséquent un effet interruptif.
Il appartient, au regard de la jurisprudence que les procès-verbaux de douane, quels que soient, ont une vertu interruptive de la prescription. Peu importe qu’ils constatent un délit flagrant ou ne recueillent que de simples renseignements sur un délit soupçonne, le seul point essentiel est que le ou les agents verbalisateurs aient eu complétement un procès-verbal régulier pour l’établir (qui, quoique rédige par des officiers de police judiciaire sans dresser la forme douanière, n’en est pas cru jusqu’à preuve du contraire.
Selon les circonstances de l’affaire, plusieurs possibilités s’offrent aux agents de douanes pour l’établissement d’une constatation :
– Le procès-verbal de saisie : Il représente la preuve mater elle de la commission de l’infraction douanière et, éventuellement, de son imputabilité à ceux qui en sont les auteurs : En principe ce procès-verbal se limite généralement à la consignation de la saisie et à la qualification de l’infraction en découlant.
– Le procès-verbal de retenue : En vertu de l’article 236 du code des douanes et impôts, les agents des douanes ont la possibilité de retenir, dans des conditions déterminées les moyens de transports litigieux non passibles de confiscation et ce, pour garantir le paiement des pénalités encourues par les prévenus.
Ce procès-verbal est souvent utilise pour les contraventions de deuxième, troisième et quatrième classe.
Le procès-verbal d’audition : Ce procès-verbal est établi dans le cadre de la procédure de flagrant délit.
Le procès-verbal de confrontation : Les confrontations se justifient en fait par les contradictions, imprécisions et parfois par les accusations réciproques échangées par les délinquants.
Le procès-verbal de contact : ce procès-verbal est établi suite à une saisie de documents considères comme promettant ou suite à une enquête effectuée dans un local.
Le procès-verbal en cas de connexité : Ce procès-verbal est établi en cas de délit mixte (lorsqu’une infraction douanière se trouve connexe avec un délit de droit connu.
L’article 240 du code des douanes et impôts indirects détermine les mentions qui doivent être portées sur les procès-verbaux et indique qu’une copie de ces documents sera remise aux délinquants présents.
Toute omission de ces formalités entraine la nullité des procès-verbaux.
Il est de principe que les tribunaux ne peuvent admettre contre un procès-verbal d’autres nullités, que celles résultant expressément d’un texte de loi[11], à moins qu’il ne s’agisse de prescriptions substantielles aux droits de la défense[12]. Encourt la censure l’arrêt qu’annule la procédure douanière de la défense[13].
En retenant que 1’Administration des Douanes, qui a exercé des poursuites pour importations réputées sans déclaration de marchandise, la Douane a fondé en partie les infractions poursuivies alors que la Cour d’Appel était tenue de statuer sur les pièces produites dont il lui appartenait d’apprécier la valeur probante[14].
Les nullités sont de droit étroit et ne s’établissent point par induction[15]. La peine de nullité ne peut être suppléée dans une disposition législative qui en prescrivant des formalités non essentiellement constitutives de la régularité de certains actes, n’a pas expressément attache cette peine à leur omission, ces principes trouvent leur justification dans les dispositions du code de procédure civile, aux termes duquel aucun acte de procédure ne peut être déclare nul si la nullité n’est pas formellement prononcée par la loi.
On peut relever parmi les nullités pouvant frapper les procès-verbaux de douane :
Les procès-verbaux dressés par l’administration des douanes qui n’ont pas été exclusivement rédigés par les agents qui ont pris une part personnelle et directe à la constatation du fait qui constitue l’infraction.
Les tribunaux ne pourront admettre contre lesdits procès-verbaux, d’autres nullités que celles résultant de l’omission des formalités prescrites par l’article 240 du code des douanes (article 243 du code des douanes).
Mais il a été juge, s’il est prescrit que l’ordre de visite doit être vise par l’officier de police judiciaire qui a accompagné les agents, le défaut de visa n’entrainerait pas la nullité des opérations, cette formalité n’étant pas substantielle et n’étant pas prévue par la loi sous peine de nullité[16]. Les nullités étant de droit, ne saurait y être supplée, à moins qu’il ne s’agisse de l’inobservation des prescriptions substantielles aux droit de la défense[17].
Il a été jugé que lorsqu’un procès-verbal est rédigé en plusieurs contextes ou vocations, et que ces divers contextes ne forment qu’un seul et même procès-verbal, il suffit que ces parties réunies renferment toutes les parties essentielles exigées pour la validité du procès-verbal et il n’est pas nécessaire que chacun de ces contextes pris isolément, contienne ces formalités[18].
La mention dans un procès-verbal supplémentaire de force majeure qui a empêché d’accomplir les formalités ne peut être combattre que par voie d’inscription de faux[19].
Si la loi exige (art. 240 du code des douanes) la rédaction immédiate du procès-verbal, du moins n’entend-il par exemple qu’il soit nul si la rédaction en est retardée par incident de force majeure, tel par exemple, que la chute du jour[20].
S’il est prescrit aux agents des douanes qui procèdent aux saisies de rédiger leur procès-verbal, sur le champ, cette disposition ne doit pas être entendue dans un sens tellement rigoureux que ledit procès-verbal doive à peine de nullité être rédige, dans tous les cas le jour même de la saisie. Il est ainsi, comme dans le cas prescrit, le retard provient d’un manque d’éclairage.
Il a été jugé que lorsque c’est sur la demande et du consentement du prévenu qu’à la vertu de la loi, les objets saisis à domicile sont transportés au bureau de la douane pour y être vérifiés et décrits et le procès-verbal y est rédigé, ce prévenu n’est pas recevable à se plaindre de non-exécution de formalités dont il ne peut imputer le défaut qu’à lui seul et toutes les condamnations encourues doivent être prononcées contre lui[21]. Le consentement du prévenu à suivre les préposés au bureau est suffisant pour valider le procès-verbal puisque la mesure est décidée dans son intérêt[22].
Il a encore été jugé que dans le cas d’enlèvement et de transport de la marchandise au bureau, le procès-verbal est rédigé en deux contextes la partie du rapport concernant la saisie et la description des objets doit être faite à domicile celle relative à l’enlèvement et au dépôt au bureau est rédigée à ce bureau, mais que si les préposes ne peuvent procéder, pour une cause quelconque, à la rédaction de leur rapport dans la maison même du saisi, et qu’ils soient ainsi dans l’obligation de transporter les marchandises au bureau le plus voisin, le saisi doit être averti du et de 1’heure de la rédaction du procès-verbal de transport des marchandises qu’on se propose d’effectuer et être somme de se rendre au bureau pour assister aux opérations. Celles-ci peuvent d’ailleurs être effectuées lors de sa présence s’il ne défère pas à la sommation.
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En toute hypothèse, un procès-verbal ne peut être annule sur la motif que les marchandises n’ont pas été pesées et mesurées au lieu et dans le moment même de la saisie, si d’ailleurs y ont été appréciées et estimées sans contradiction et si le saisi a été invite à se rendre au bureau pour vérifier cette estimation.
S’il est prévu que les marchandises ne seront déplacées, pourvu que le détenteur donne caution solvable de leur valeur … s’il ne résulte nullement d’aucun texte du code des douanes que les verbalisant soient dans 1’obligation de demander au prévenu de fournir caution.
Il a été juge, au contraire, que les saisissants n’ont pas à prendre l’initiative des offres et qu’ils doivent attendre les propositions du saisi[23].
Les marchandises saisies chez le prévenu sont réputées avoir été introduites en contrebande, et que celui-ci ne pourra il se soustraire à la responsabilité de 1’infraction qu’en rapportant la preuve d’un fait de force majeure, sans même pouvoir être admis à prouver par témoins ou autrement que les marchandises sont d’origine régulières[24].
Il a été jugé notamment qu’à défaut ou en cas de nullité d’un procès-verbal d’introduction de marchandises prohibées, le délit peut être prouve par toutes voies que le droit commun autorise et cette preuve faite, il y a lieu à l’application des peines[25].
En cas de nullité du procès-verbal, les tribunaux doivent admettre la preuve par témoins pour y suppléer, les rédacteurs dudit procès-verbal pouvant d’ailleurs être entendus comme témoins[26].
II a encore été jugé qu’en matière de tabacs, la condamnation n’est pas subordonnée à l’existence ou à la régularité d’un procès-verbal, la contravention pouvant être établie d’après les règles de droit commun, par procès-verbal ou par témoins.
La Cour de Cassation a jugé, lorsque les procès-verbaux sont déclarés nuls, les juges ne peuvent refuser d’admettre la preuve testimoniale offerte par la partie poursuivante, les juges d’appel ne peuvent même la rejeter sous le prétexte qu’elle n’a pas été offerte en première instance[27] et ils sont tenus de rechercher si la preuve de la contravention ne résulte pas de l’instruction faite en première in stance et, dans la négative, de recourir à tous les moyens de preuve autorises par la loi[28].
Une erreur commise les verbalisant dans l’énonciation du texte de loi qui d’après eux prévoient et punissent les faits constatés dans les procès-verbaux, n’est pas une cause de nullité si l’infraction existe. Il appartient au juge, ou à l’autorité aminci en cas de transaction, d’apprécier quel est le texte applicable à l’infraction.
a)- Nullité encourue pour défaut de prestation de serment d’un interprète
Les articles 112 et 313 du ccp. Marocain obligeant les O.P.J. à avoir recours à un interprète lorsque les prévenus ou les témoins parlent une langue autre que celle naturellement employée par l’officier de police instrumentaire.
Certes, la formalité de la prestation de serment qui est actuellement prête devant l’O.P.J. rédacteur ne figure pas textuellement aux procès-verbaux d’interrogatoire des prévenus. II suffisait pour satisfaire à la loi, d’ajouter après langue espagnole …les mots suivant : « serment prête », comme il est généralement sur les P.V. dresses par O.P.J. de la sûreté nationale.
II est en effet courant, dans les services de police, de ne pas faire rédiger de P.V. de prestation de serment d’interprète, pour les types d’enquête préliminaire ou de flagrant délit.
L’exécution des commissions rogatoires ou de délégations donne lieu à la rédaction de procès-verbaux de prestation de serment de greffier ou d’interprète.
II a été jugé que les procès-verbaux signes par l’interprète, les prévenus et l’O.P.J. rédacteur dans une affaire de contrebande, ont été frappés d’une nullité absolue étant donne l’oubli matériel de la formalité écrite de la prestation de serment[29].
Il y a nullité du procès-verbal de la visite lorsque la visite du navire et saisie de marchandises est faite hors de présence du capitaine dudit navire[30].
La Cour de Cassation[31] a même décidé que les aveux et déclarations des prévenus font partie des faits matériels constatables jusqu’à preuve du contraire.
- b) -Prévenu interroge avant le rapport de l’affaire- violation des droits de la défense.
L’omission de 1’interrogatoire du prévenu à 1’accomplissement de cette formalité avant le rapport de l’affaire ne peut devenir une cause de nullité[32] que s’il est établi que le prévenu n’a pas été appelé à se défendre d’une manière quelconque pendant le débat qui a suivi le rapport[33].
Quand les juges du fond ont déclaré qu’un individu a obtenu des licences pour ses clients et qu’il a fait livrer les marchandises de douanées non aux titulaires des licences mais à une tierce personne, cette détermination des faits constitutifs de trafic de licence est souveraine et échappe au contrôle de la Cour de Cassation.
Le juge d’instruction saisi originairement et par réquisition d’un délit de douane est compètent pour autoriser la vente avant jugement des moyens de transport saisis lors de la constatation de délit.
Le propriétaire des moyens de transport n’est recevable à faire opposition à l’ordonnance autorisant la vente, la possibilité d’intervention que lui réserve le code des douanes (art. 374 al 2 du code des douanes) ne pouvant être invoquée que devant la juridiction de jugement compétente pour statuer sur 1a confiscation.
Une ordonnance portant permis de vendre n’est pas nulle :
- Pour n’avoir pas été signifié au propriétaire, ce1ui-ci n’ayant pas être mis en cause par l’administration (art.389 du code des douanes prévoit en effet que la signification de 1’ordonnance portant permis de vendre doit être faite à la partie adverse”).
- Pour cause de nullité du procès-verbal ;
- pour le motif que le navire litigieux n’aurait pas servi de moyen de transport dans le rayon maritime, alors que même si le navire n’avait pénètre dans ledit rayon, les agissements du capitaine étaient de nature à le faire considérer comme intéresse à fraude[34].
Deuxième partie : Le secret professionnel et le droit pénal douanier
Garanti par des sanctions pénales le secret professionnel est puissamment protège contre 1es atteintes dont il pourrait être 1’objet, à tel point que la justice elle-même est quelquefois obligée de s’incliner devant le professionnel qui se retranche derrière le secret pour refuser de témoigner[35].
Or, le secret professionnel, qui est entouré, à juste titre, d’un grand respect, puise singulièrement sa force en matière douanière. C’est ce qu’observait le professeur Waline lorsqu’il écrivait : “c’est un singulier et bien triste signe des temps que, 1’interet fiscal paraisse aujourd’hui au législateur le plus pressant des intérêts publics et qu’il lui donne le pas même sur l’intérêt de la justice. En effet, le secret professionnel, qui dispense parfois de témoigner en justice, devant lequel la justice elle-même est ainsi parfois obligée de s’incliner, est au contraire sacrifiée par la loi au profit de l’intérêt fiscal”[36].
La question d’un secret professionnel en matière douanière se présente sous un double aspect :
- L’obligation au secret des agents des douanes.
- L’obligation du secret professionnel aux agents des douanes.
Les agents de douanes ont de par leurs fonctions accès à des renseignements confidentiels, la plupart d’ordre patrimonial, concernant les citoyens assujettis à l’impôt douanier. C’est pourquoi ils sont soumis en principe soumis au secret professionnel, qui est en l’occurrence le secret fiscal, mais diverses dispositions, en apportant des dérogations à cette obligation au secret limitant régulièrement sa portée.
L’obligation au secret des agents des douanes est rien moins que naturel1e elle est ai contrepartie des prérogatives extrêmement importantes reconnue à l’administration pour contrôler la situation fiscal des assujettis.
Il faut se rappeler en effet que, grâce aux moyens d’investigation extraordinaires dont elle dispose, l’administration peut accéder pratiquement à tous les renseignements relatifs aux ressources des contribuables, et donc à leur vie privée, à tel point qu’on a pu parler d’une” intrusion grandissante du fisc dans les affaires privées”[37].
L’opposabilité du secret professionnel aux agents des douanes
Le problème cette fois est inverse : ce n’est plus le secret fiscal qui en cause, mais le secret professionnel en général, celui auquel peuvent être tenues diverses personnes, du médecin au banquier. Le secret professionnel produit comme prandial ceux qui s’y trouvent ont le droit, et aussi le devoir, de ne pas révéler ce qu’ils ont appris à l’occasion de leurs fonctions.
Le secret professionnel dans le cadre de la procédure
Lorsque les poursuites judiciaires sont engagées, la jurisprudence. Semble se montrer moins respectueuse du secret professionnel.
Si on admet que le secret professionnel empêche aussi bien la consultation que la saisie des documents comptables, on perçoit immédiatement le danger d’une telle solution : elle pe1met au professionnel peu scrupuleux envers le fisc, par une véritable fraude à la loi, de se soustraire à tout contrôle en surchargeant ses documents comptables d’indications couvert par le secret professionnel. Dans l’affaire[38] ni la Cour d’Appel, ni la Cour de Cassation n’ont retenu expressément la fraude à la loi, parce qu’il leur était impossible d’établir avec certitude le caractère frauduleux de l’insertion des renseignements médicaux dans les registres comptables.
La Chambre Criminelle (française) dans son arrêt du 24 mars 1960[39] ne consacre pas une atteinte au secret professionnel. Elle s’efforce au contraire de concilier les exigences du secret professionnel et celles du contrôle fiscal. Parce que 1’avocat ou le médecin exerce une profession soumise au secret professionnel, lui et ses clients ont droit de ce chef a une absolue protection ; mais étant également un contribuable, il doit permettre au fisc de contrôler ses déclarations de revenus.
Si par négligence, ou de mauvaise foi, le professionnel a laissé figurer des renseignements couverts par le secret sur ses documents comptables, cette circonstance ne doit faire obstacle à tout contrôle ni empêche la saisie des documents dans le cadre d’une information judiciaire pour fraude fiscale : c’est le professionnel lui-même qui porte alors la responsabilité de la méconnaissance du secret professionnel.
Le secret professionnel semble être protège du moins par la jurisprudence face aux investigations du fisc qui ne bénéficie à cet égard d’aucun privilège particulier.
- L’aménagement du secret professionnel par certaines dispositions légales Si la jurisprudence s’efforce de protéger les secrets professionnels dits absolus contre les prétentions du fisc, et de la douane, de nombreux textes sont à l’inverse venus aménager le secret auquel sont tenus diverses professions le rendre imposable aux agents des impôts et à ceux des douanes.
Ces professionnels sont délies de leur obligation au secret à l’égard de ces fonctionnaires qui peuvent par conséquent exiger, sous peine des sanctions prévues, la communication sur place de certaines informations couvertes par le secret. Les textes (du code des douanes) sont allés plus loin en mettant à la charge de quelques professions une délégation positive de renseigner la douane sur des faits normalement protèges par le secret.
C’est l’article 181 du code des douanes qui impose aux détenteurs et transporteurs de marchandises passibles de droits et taxes de présenter à toute réquisition des agents des douanes leurs livres, registres, pièces de recettes, de dépenses ou de comptabilité sans qu’ils puissent opposer le secret professionnel aux demandes d’éclaircissement, de justification ou de communication de documents concernant les indications de leur livre- journal.
Le secret bancaire lui non plus ne résiste guère au fisc et à la douane. L’ensemble des établissements bancaires et financiers étant au Maroc places sous le contrôle de l’État, les banquiers sont tenus de communiquer à la douane « les documents de service » qu’ils détiennent, et ils sont également tenus de communiquer les comptes de leurs clients qui figement au nombre des livres et documents annexes”[40].
Le secret des fonctionnaires lui non plus n’existe pas pour le fisc et la douane. Les fonctionnaires figement dans la liste de personnes tenues d’une obligation de communiquer à l’égard du fisc et de la douane.
- Les restrictions apportées à la matière
Enfin, le secret judiciaire lui-même est sacrifie par les lois à 1’interet fiscal. C’est ainsi que l’administration des Douanes et Impôts Indirects. Au droit d’examiner les pièces versées par les plaideurs aux débats judiciaires, pièces qui doivent rester à sa disposition au greffe durant la quinzaine qui suit le prononce de toute décision de justice.
En outre, 1’autorite judiciaire doit donner connaissance à 1’Administration des Douanes et Impôts Indirects ou du fisc toute indication qu’elle peut recuei1lir, de nature à faire.
Références bibliographiques :
[1] Article 42 du code des douanes et impôts indirects.
[2] L’article 237 du code des douanes et impôts indirects prévoit que, l’agent de l’administration peut procéder à des enquêtes préliminaires et à l’occasion de leurs investigations, effectuer en tout lieu des visites domiciliaires conformément aux conditions fixées par l’article 41 du code des douanes et impôts indirects.
[3] M. Drissi Machichi, procédure pénale, p. 132 et suivantes.
[4] Le législateur a restreint l’usage de ce formalisme à quelques actes de procédure. Ce procès-verbal trouve sa place dans l’exercice du contrôle à posteriori des opérations douanières. Il permet de relever des infractions douanières qui ne sont plus flagrantes et consignent les opérations de contrôles et d’enquêtes ainsi que les interrogatoires réalisés par les agents des douanes.
[5] Article 190 du code de procédure pénale.
[6] J.-L. Cousturier, Traite de la prescription en matière criminelle,1949, p. 234.
[7] J.-L. Cousturier, Traite de la prescription en matière criminelle,1949, p. 275.
[8]J.-L. Cousturier, Traite de la prescription en matière criminelle,1949, p. 279.
[9] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 5 janv. 1967, D. 1967, jurisp. p. 393 note J. Mazard.
[10] J. Pradel « procédure pénale » 12 ème édition, Cujas, 1er déc. 2004, n° 670 et suivants ; voir aussi G. Stéfani, G. Levasseur, B. Bouloc « procédure pénale », dalloz
[11] Arrêt de la cour de cassation, 20 septembre 1833 Bulletin criminel, 33- 42, 28 mars 1846 Sirey 46- 702.
[12] En matière douanière, l’article 243 du code des douanes précise, « que celles résultant de l’omission des formalités à l’article 240.».
[13] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 22 oct. 1990, Bull. crim. n°350
[14] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 18 sept. 2002, n° 01-87.048, non publié
[15] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle, 6 aout 1986, Dalloz Repert Alph, de législation de doctrine et de jurisprudence tomme VII voir douanes n° 690
[16] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 22 avril 1992, Bull. crim. n°171
[17] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 11 janv. 2006, Bull. crim n° 13
[18] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 24 septembre 2003, Bull.,IV, n° 140
[19] Arrêt de la cour de cassation, 28 avril 1946, les procès-verbaux de douane font preuve contraire en ce qui concerne les aveux et jusqu’à inscrire des faux en ce qui concerne les constatations matérielles.
[20] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 8 oct. 1990, Bull. Crim. n°334, Dr. Pénal, 1999, comm. n° 114 Cass. crim 13 mars 1997, Bull. crim. n°104
[21] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 25 janv. 1988, Bull. crim. n° 33 ; JCP 1988, IV, p. 123 ; Rev. sc. crim. 1989, p. 125 note M.Massé
[22] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 18 mai 1998 ; Dr. pénal 1998, comm. n° 134 ; Gaz. Pal. 1998, chron. p. 151 ; JCP 1998, IV, 3133, relatif à l’embargo frappant la Serbie et le Monténégro. Cass. crim. 30 oct. 2002, inédit.
[23]Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle, 11 mars 2009, Dr. pén 2009, comm. 79
[24] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 22 avril 1992, Bull. crim. n°171
[25] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle 11 janv. 2006, Bull. crim n° 13
[26] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 5 fev. 2003, n° 02-83.217, non publié
[27] Voir S. Guinchard, J. Buisson « procédure pénale », 3ème édition LexisNexis, Litec déc. 2005, p. 617, n° 1156
[28] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 14 janv. 2004, non publié.
[29] Jugement prononcé le 28 mai 1961 dans l’affaire de contrebande de cigarettes américaines à safi. « le juge avait déclaré en effet que la poursuite irrecevable pour manque de base légale comme étant faite sans viser le texte applicable d’une part et en s’appuyant sur des procès-verbaux frappés de plusieurs nullités d’autre part ».
[30] Même jugement.
[31] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 5 fev. 1990, douanes et changes, Litec, p. 46
[32] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 24 mars 1971, Bull. crim. n° 107
[33] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 4 nov. 1991, Bull. crim. n° 390
[34] Arrêt de la cour d’appel, Aix, 19 juin 1952 doc cont. N°1008
[35] Arrêt de la cour de cassation, chambre criminelle. 20 janv. 1975, Bull. crim. n° 36, JCP 1975, II, 18137 note C. Gavalda Cass. crim. 3 mai 2001, Bull. crim. n° 107 : la Cour de cassation a estimé que le secret bancaire ne peut être opposé aux agents des douanes dans l’exercice du droit de communication.
[36] À savoir que ces dispositions prévoient une exemption de responsabilité des fonctionnaires lorsqu’ils prennent part au trafic. Dans une nouvelle espèce jugée par l’arrêt du 1er avril 1998, Cass. crim. 1er avril 1998, Dr. pénal 1998, comm. 92 ; JCP 1998, I, 153, note A. Maron ; D. 1998, p. 430, note J. Pradel ; Rev. sc. crim. 1998, p. 582 obs. J.-P. Dintilhac
[37] C. J. Berr, H. Trémeau, « Le droit douanier » , 6ème éd., n°748, p. 394 Pallain, « Les Douanes françaises », Paul Dupont, 1913, t.III, p. 356
[38] T. confl. 27 fév. 1995, 02925 publié au recueil Lebon
[39] Bulletin officielle n° 169 p. 355.
[40] Ce droit, traditionnel pour les administrations financières, revêt différents aspects. Son intérêt majeur réside dans le fait qu’il permet à l’administration des douanes d’effectuer des investigations aussi bien chez la personne directement concernée par l’opération litigieuse que chez des tiers, sans que ceux-ci ne puissent opposer le secret professionnel.