La décision extérieure marocaine : processus et acteurs

Introduction :

L’histoire des affaires extérieures marocaine est celle d’une concentration, indissociable de celle de l’Etat et de la centralisation. Elle se caractérise par une spécialisation croissante et des conditions d’accès longtemps restrictives et réservées à une élite dirigeante, formée des responsables politiques, de diplomates et parfois de quelques militaires. Le nombre de ces professionnels de l’Etat varie considérablement d’un dossier à l’autre, le noyau se resserrant en fait avec le caractère sensible du sujet. À des degrés divers et sous des formes parfois différentes, cette conception élitiste est relativement commune au paysage politique de tous les Etats modernes.

En effet, la décision extérieure marocaine s’articule autour d’un noyau décisionnel composé de quelques acteurs clés. En premier lieu, le Roi, la Primature et le Ministère des Affaires Etrangères trônant au sommet de l’Etat, tout en empruntant à Marie Christine Kessler son appellation de « noyau décisionnel central »[1] (I). En second lieu, sous l’appellation de noyau décisionnel subordonné sont regroupés les professionnels subalternes et les institutions individuelles avec un pouvoir d’influence réelle dans ce processus mais qui demeure très aléatoire[2] (II).

I : le noyau décisionnel central : pouvoir d’action étendu

Les acteurs dans ce noyau seront analysés par ordre de poids et d’importance dans l’élaboration de la décision extérieure.

A : Le Roi : la configuration de l’acteur central

La monarchie marocaine garde des spécificités propres qu’on ne saurait méconnaitre. En réalité, l’unité de politique au Maroc est l’une des plus solides : un Islam Sunnite et Malékite, conjugué à une tradition Makhzénienne hautement centralisatrice, suppose que politique intérieure et politique extérieure soient guidées par les mêmes valeurs[3]. Ainsi, au Maroc, principe monarchique et personne royale restent solubles l’un dans l’autre. L’impact du principe monarchique, comme valeur politique, sur l’issue d’un dossier politique ou diplomatique se mesure à la stature du roi, à ses qualités personnelles de chef charismatique, de stratège, etc.

Par ailleurs, la notion du « domaine réservé »[4], qui signifie selon la conception française ; que l’action extérieure de l’Etat devrait être cohérente et surtout exprimer l’unité nationale dans toute sa vigueur. Pour ce faire, il est absolument impératif qu’elle reçoive régulièrement l’impulsion et l’orientation de celui qui incarne cette unité nationale. Cette notion revête au Maroc une signification plus étendue et renvoie directement à la suprématie symbolique et institutionnelle de la monarchie dont la Constitution et la pratique politique avaient renforcé[5]. C’est ce qu’a affirmé d’ailleurs le roi Mohammed VI à plusieurs occasions quand il a considéré que « la politique extérieure marocaine entre constitutionnellement dans le domaine réservé du roi »[6].

Hautement personnalisée[7], dans la mesure où le roi entretient des rapports directs et continus avec de nombreux chef d’Etat étrangers. La politique extérieure marocaine dépend de ce fait, de sa « vision du monde »[8] qu’il apprécie en fonction de l’intérêt national dont il monopolise la conception, aidé en cela d’abord par les partis politiques, le parlement et d’autres acteurs de nature socio-économique.

Le roi est en réalité, le chef de la diplomatie marocaine, ainsi, il est le point de passage obligé tant protocolaire que symbolique de la représentation diplomatique à l’étranger et étrangère au Maroc. Cette compétence s’exprime par la délivrance de « lettres de créance » signées du roi et destinés à être remises aux chefs d’Etats étrangers. En sens inverse, les ambassadeurs étrangers viennent remettre les lettres émanant de l’Etat qu’ils représentent. Une tradition toujours respectée, veut qu’il soit reçu personnellement par le roi[9]. Le roi a aussi la compétence de signer et ratifier les traités[10]. Toutefois, les traités de paix ou d’union, ou ceux relatifs à la délimitation des frontières, les traités de Commerce ou ceux engageant les finances de l’Etat ou dont l’application nécessite des mesures législatives, ainsi que les traités relatifs aux droits et libertés individuelles ou collectives des citoyennes, ne peuvent être ratifiés qu’après avoir été préalablement approuvés par la loi[11].

Commandeur des croyants aussi, et président du comité Al Qods, il veille au respect de l’Islam dans un esprit de tolérance mais le défend contre toutes les subversions[12]. Le roi cumule alors les rôles de souverain théocratique et de chef d’Etat moderne, conclu Michel Camau[13]. Les sources de cette légitimité sont diverses et varie entre ce qui est constitutionnelles[14], historiques[15] et religieuses[16], se confortant mutuellement[17].

B : la primature : la quête d’influence

Au Maroc, l’édifice constitutionnel consacre la prééminence du Roi, tandis que le gouvernement apparaît comme un organe peu autonome. Le roi est par ailleurs le véritable chef du gouvernement (art.48)[18], il promulgue les lois et peut dissoudre le parlement (art.50)[19]. Ce qui fait du premier ministre une autorité dépendante, ne disposant aucune assise juridique allant dans le sens du renforcement de son pouvoir décisionnel. À ce niveau, le gouvernement n’est qu’un simple organe d’exécution des décisions royales[20] d’une part et des lois votées par le parlement d’autre par : il assume donc une double responsabilité devant le Roi et devant le parlement[21].

L’avènement du gouvernement d’alternance au pouvoir en sa tête A. El youssoufi[22], lui a réussi d’accorder certains espaces de manœuvre tout en restant sous contrôle du roi. Le bilan de l’activité diplomatique mené par le premier ministre socialiste est révélateur d’une réalité paradoxale, la volonté de ce dernier de s’affirmer comme acteur à part entière dans la production de la politique extérieure tout en demeurant attaché au principe de la répartition des champs d’action. Ce principe est en réalité le fruit d’un compromis politique entre le roi Hassan II et Youssoufi, veut que le roi garde l’initiative et le contrôle des questions jugées stratégiques dans les relations internationales du Maroc comme : le dossier du Sahara occidental et ses répercussions régionales ainsi que le dossier des relations arabo-israéliennes[23].

C : le Ministère des Affaires Etrangères : éclatement des attributions

        Le ministère des affaires étrangères marocain est un organe principalement administratif entre les mains de chef de l’Etat, censé de donner forme diplomatique à une volonté politique. Il a en fait, une tâche d’exécution, ensuite il est considéré comme le canal obligé de tout rapport avec les autres Etats étrangers et les organisations internationales[24]. Depuis sa création[25] par le Dahir de 26 avril 1956 le ministère des affaires étrangères est censé de conduire l’action diplomatique, assurer la coordination de l’ensemble des relations extérieures et gérer la négociation des traités et des accords internationaux[26]. Ainsi, les attributions les plus importantes du ministère des affaires étrangères et de la Coopération, outre le développement de la coopération internationale, visent la coordination de l’ensemble des relations extérieures et leur harmonisation avec la politique extérieure de l’Etat[27].

Autrement dit, le ministre des affaires étrangères et de la coopération supervise, mais ne préside pas et ne dirige pas les négociations relatives aux traités, conventions, accords, et autres instruments de droit international à caractère économique ou diplomatique. Ensuite le ministre des affaires étrangères ne possède pas le pouvoir de décision exclusif pour ce qui se rapporte aux obligations extérieures du Maroc à caractère économique, commercial, financier, social, culturel et technique. Il est obligé dans ce cadre de coordonner avec les ministères compétents qui ont le dernier mot pour approuver de telles obligations. On doit souligner que Le ministère des affaires étrangères marocain à côté de ceux de l’Intérieur, de la Défense et des Affaires religieuses– l’un des ministères de souveraineté dont le chef est désigné directement par le Roi, sans tenir compte de la majorité parlementaire.

Cette dépendance par rapport au cabinet royal se vérifie au niveau de son statut et au niveau des critères qui semblent guider par le roi dans son choix de chef de la diplomatie marocaine. Il arrive en fait, que le roi use pour certaines questions cruciales, de circuit encore plus secrets et plus rapides quant à la transmission de l’information. Le roi peut aussi nommer au poste de ministre des affaires étrangères des personnalités de son entourage qui sont fidèle à sa pensée et à sa personne[28]. Il est arrivé au monarque de nommer des ministres des affaires étrangères issues des partis politiques[29].

La mission du ministère des affaires étrangères est aujourd’hui concurrencée par ce que l’on appelle les ministères techniques, hautement qualifiés et mieux adaptés à certaines situations de crise.  C’est le cas notamment du Secrétariat d’Etat aux Affaires Etrangères[30], chargé des affaires de l’Union du Maghreb Arabe[31], crée en 1989, ensuite, la création du Ministère chargé des Droits de l’Homme en 1993[32], considéré comme une réponse institutionnelle aux pressions de la communauté internationale qui a largement dénoncé les violations des droits de l’homme au Maroc.

D’autres services comme celui des Relations avec l’Union Européenne oscillent d’un département à un autre. En 1985 il dépendait du premier ministre avant d’intégrer en 1986 le ministère des affaires étrangères. Par contre, le Département de la Communauté Marocaine à l’Etranger crée en 1990 dépend du premier ministre, alors qu’il devrait être sous la tutelle du ministre des affaires étrangères comme il est prévu par ses statuts[33].

C’est dire que le nombre des ministères qui s’occupe de la question internationale augmente graduellement, en effet, la quasi-totalité des départements ministériels disposent d’une direction des relations internationales. Leurs implications se manifestent essentiellement de deux manières étroitement imbriquées : d’abord sur le plan normatif, les décrets régissant l’organisation et les attributions des départements ministériels au Maroc, reconnaissent à ceux-ci le droit d’exercer des compétences de portée internationale. Sur le plan institutionnel et organisationnel, les ministères abritent des structures administratives (Division, Service, Direction) spécialisées dans l’exercice des attributions de dimension internationale. On peut citer à ce titre :

Le Ministère de l’Intérieur et de l’Administration de la Défense Nationale qui s’intéressent aux questions correspondant non pas seulement la souveraineté et à la sécurité nationale mais aussi il gère le problème du Sahara. Il est en effet, le responsable de l’administration territoriale de cette zone, l’interlocuteur des responsables des Nations unies au Sahara et participe aussi aux négociations directes ou indirectes avec le front Polisario. Il s’occupe aussi de la question de l’immigration clandestine avec les Etats européens. Finalement, le ministère de l’intérieur et de l’administration de la défense nationale gèrent les rapports avec l’OTAN et l’UEO.

Les Ministères chargés des questions Economiques et Commerciales, regroupés tantôt au sein des ministères des Finances (présents dans toutes les négociations bilatérales comme les négociations de dette publique ou privé et aussi dans les négociations multilatérales comme au GATT puis l’OMC, les accords d’associations entre les Maroc et l’union européenne) ou celui de l’Economie chargé de à la fois du Commerce Extérieure et de l’Industrie, de la Privatisation et des Investissements Extérieurs. Tantôt, elles forment chacune d’elles des Départements Autonomes avec de larges compétences. En effet, l’éclatement du ministère de commerce et de l’industrie en 1992 a conduit à la création de deux ministères : celui de Commerce et de l’Industrie et de la Privatisation d’une part, et celui du Commerce Extérieur, des Investissements Extérieurs du Tourisme d’autre part[34].

Le reste des ministères interviennent aussi dans les négociations autrefois réservé aux diplomates du ministère des affaires étrangères[35]. Ce qui confirme la tendance qui veut que la négociation relève de plus en plus des techniciens et des spécialistes. On peut citer quelques exemples. Parmi les Directions du Ministère de Transport[36] on trouve[37] : la Direction de l’Aéronautique Civile, la Direction de la Météorologie Nationale, la Direction des Transports Terrestres.

Dans le même ordre d’idée, le Ministère de la Santé Publique en liaison avec les départements concernés suit la politique sanitaire internationale à laquelle le Maroc contribue, définit en concertation avec les départements concernés les options de coopération dans le domaine de la santé et assure la mise en application et le suivi de réalisation des programmes convenus: la Direction de la Coopération Sanitaire ; la Division de la Coopération avec les Organisations qui regroupe un service de la Coopération avec les Organisations Intergouvernementales et un Service de Coopération avec les Organisations non gouvernementales; la Division de la Coopération Bilatérale qui regroupe un service de coopération avec les pays d’Europe et d’Amérique et service de coopération avec les pays d’Afrique et d’Asie.

On peut retenir inévitablement que le monopole du ministre des affaires étrangères est battu en brèche ou contesté de toutes parts. Ce mouvement centrifuge n’est pas propre au Maroc, mais elle est générale. Quel que soit leur régime politique ou leur niveau de développement, tous les pays semblent bien confrontés aux mêmes problèmes. Henry Kissinger, montre dans ses mémoires que la Maison Blanche et le Département de l’Etat sont en compétition permanente avec d’autres ministères, notamment celui du Commerce et celui de la Défense qui ont chacun leur propre politique extérieure[38].

II : le noyau décisionnel subordonné : pouvoir d’action limité

Parmi les tendances fortes et constantes dans le processus d’élaboration de la décision extérieure marocaine, apparaît le rôle marginal du Parlement. Raison pour laquelle, on a jugé utile de l’inclure dans la catégorie du noyau décisionnel subordonné qui est d’ailleurs composé d’intervenants institutionnels hétérogènes. En effet, aux acteurs traditionnels, les approches sociologiques sont venues ajouter nombre de « nouveaux» acteurs. Il en est ainsi, des partis politiques qui ont une place résiduelle par rapport à ce processus et finalement, l’émergence des groupements de nature économiques et sociales, influant certes, de manière secondaire, mais demeurant minime dans l’élaboration de la politique extérieure.

A : le parlement : acteur quasi-marginalisé

Au Maroc, l’instance parlementaire n’ayant que des prérogatives purement formelles en matière de décision extérieure, il n’est pas capable de l’orienter et moins d’infléchir les décisions déjà prises par le roi. En effet, la position qu’occupe le parlement dans la formulation de la décision extérieure n’a pas changé et ce malgré les changements de la structure du parlement. Ce dernier est désormais doté, en vertu de la Constitution de 2011 de deux chambres[39] la Chambre des Représentants dont les membres sont élus pour cinq ans au suffrage universel direct[40] et la Chambre des Conseillers[41] qui comprend des membres, élus au suffrage universel indirect pour six ans.

le roi en sa qualité de représentant suprême de la nation[42] dispose d’un droit de regard sur les actes du parlement, cela veut dire que les parlementaires qui tiennent leur mandat de la nation d’être affermis dans une responsabilité de magistrature intermédiaire et par conséquent d’occuper une position subordonnée[43].On peut apporter de ce fait deux illustrations qui argumentent cette situation de subordination, la première relève de la formalité de la promulgation par le roi d’une loi adoptée par le parlement, lorsque celui-ci n’a aucune opposition à formuler contre un texte, il l’officialise par Dahir en y opposant son sceau avant de le publier au bulletin officiel. Le roi dispose d’un délai de 30 jours, mais il ne s’agit pas ici d’une situation de contrainte dans la mesure où on ne peut pas imposer au représentant suprême de la nation à faire ou à ne pas faire[44].

En revanche, lorsqu’il s’agit d’un texte de loi d’un intérêt capital auquel le roi s’oppose, il peut demander à l’assemblée de procéder à une nouvelle lecture, formulée par message (sans contreseing du premier ministre) et cette lecture ne peut être refusée.[45] Ensuite, le roi peut après avoir consulté les présidents des deux chambres et le président du Conseil Constitutionnel et adressé un message à la nation, dissoudre par dahir les deux chambres de parlement ou l’une d’elle seulement[46]. Dans ce cas le roi exerce outre les pouvoirs qui lui sont attribués par la présente constitution, ceux dévolus au parlement en matière législative[47].

L’intervention du parlement étant donc limité, les points de vue des parlementaires sur les actions de l’Etat doivent eux aussi être examinés. En effet, l’article 64 leur retire l’immunité parlementaire et les traduit en justice si les avis annoncés mettent en cause le régime monarchique, la religion musulmane, ou constituent une atteinte au respect dû au Roi[48]. L’article 52 interdit également tout débat sur les discours royaux[49]. De ce fait, le parlement se trouve empêcher de jouer un rôle actif dans la gestion de la décision extérieure.

À ce propos, les articles 70, 75 et 76[50] permettent aux parlementaires l’occasion de discuter le projet de loi de finance et d’examiner par voie de conséquent, la politique générale du gouvernement y compris la diplomatie. Cependant, on constate que le contrôle parlementaire est réduit aussi à un simple dialogue entre le parlement et le gouvernement. Les interventions sont plutôt des prises de positions politiques à caractère général qui n’influencent point les orientations générales de la politique extérieure. Il en va de même de la pratique des questions qui est l’un des moyens de contrôle accordé par la Constitution. L’article 100 prévoit à cet égard, qu’une séance hebdomadaire doit être réservée en priorité aux questions[51] ; le ministère des affaires étrangères reste le moins sollicités. On peut déduire donc, qu’il y a d’un coté le désintéressement des députés et de l’autre, la mauvaise volonté du ministère des affaires étrangères qui est juridiquement tenu de répondre aux questions écrites dans un délai de quinze jours et dans un délai de vingt jours aux questions orales. Nos parlementaires préfèrent intervenir sur les questions de nature socio-économiques que d’intervenir dans le domaine des affaires étrangères, parce qu’ils sont conscients qu’un débat sur la politique extérieure du royaume ne changera en rien les orientations du cabinet royal.

À ce niveau, la Commission des affaires étrangères et de la Défense nationale, qui est théoriquement chargée de l’intégrité territoriale, d’examiner  les traités réservés à l’approbation de la chambre des représentants et participer à la diplomatie parlementaire. Mais concrètement cette Commission, n’a pas de pouvoirs réels et elle ne s’intéresse qu’à des crises ponctuelles et ses avis demeurent facultatifs. La subordination du parlement marocain, se manifeste clairement dans l’article 99[52] prévoyant que la décision de la déclaration de guerre revient au Conseil des ministres dont le roi est président (art 48) après avoir communiqué le parlement ainsi que ces deux chambres. Cela veut dire sans équivoque que c’est le roi qui décide la guerre et que la communication adressée au parlement, se fait uniquement à titre d’information et non pas de consultation ou de concertation.

On doit noter que la nouvelle constitution marocaine promulguée en 2011 a relativement élargie le champ de la participation du parlement notamment en matière de la conclusion des traités internationaux. Dorénavant, il ne se limitait plus aux seules conventions engageant les finances de l’Etat mais touche aussi, les traités relatifs aux droits et libertés individuelles ou collectives des citoyennes et des citoyens[53]. Cette liste peut d’ailleurs constituer un bon indice pour déterminer ou apprécier l’étendu des pouvoirs du parlement en matière de contrôle de la politique étrangère du gouvernement.

Mais ce contrôle ne fonctionne pas de manière optimale : le gouvernement interprète de manière restrictive les accords devant être soumis au parlement, les réserves aux traités ne sont pas soumises au parlement, finalement le parlement doit soit approuver soit rejeter la convention internationale, il ne peut pas poser en général des conditions à son consentement. De plus, la constitution marocaine ne prévoie aucun mécanisme particulier permettant au parlement de vérifier les actes internationaux pris par le gouvernement qui ne se présentent pas sous la forme d’un traité international. Dès lors, les moyens ordinaires restent à la disposition du parlement pour surveiller l’activité du gouvernement.

Mais si le contrôle du parlement en matière de politique extérieure demeure limité, en revanche, les parlementaires disposent aujourd’hui d’un droit de saisine, désormais étendu du Conseil Constitutionnel[54], afin de faire vérifier la constitutionnalité des engagements internationaux conclus. En France ce droit de saisine est garanti par les articles 54 et 61-2 de la constitution de 1958[55]. Et au Maroc, en vertu de l’article 132 de la constitution de 2011[56]. Même encore, les assemblées parlementaires ne se contentent pas uniquement aujourd’hui, à contrôler la politique extérieure menée par leurs gouvernements mais à s’affirmer sur la scène internationale comme acteur des relations internationales. Elles visent ainsi à intervenir dans le domaine diplomatique aux cotés de l’exécutif. C’est ainsi qu’on parle de l’émergence d’une diplomatie parlementaire[57].

Son rôle grandit de plus en plus et embrasse des formes variées en fonction de l’évolution du monde. Elle consiste en un ensemble d’interventions, d’attitude ou d’activités, ad hoc ou organisé, exercé par des parlementaires ou au nom d’un parlement et selon une stratégie déployée auprès d’instances étrangères pour interpeller, influencer, voire infléchir en fonction d’objectifs nationaux[58]. Cette fonction de soutien ne signifie en aucun cas la gestion de la décision extérieure et ne leur accorde aucune liberté d’interprétation ou d’action. C’est le cas par exemple de l’action diplomatique menée par les parlementaires marocain, soutenant essentiellement la question de l’intégrité territoriale et les problèmes contemporains. Cette fonction de soutien reflète entre autre, la tradition unanimiste qui caractérise le processus décisionnel marocain.

Les formes que revêt la diplomatie parlementaire sont variées. Les échanges bilatéraux sont en forte progression : les organisations internationales régionales ont crées des assemblées parlementaires qui participent activement au travail des organisations internationales : Assemblée de l’Atlantique Nord, Assemblée de l’OSCE[59], Union parlementaire (dont le Maroc est membre depuis 1978), Assemblée internationales de langue française, l’Union parlementaire Arabe et l’Union parlementaire Africaine. Ainsi, il convient d’évoquer les colloques internationaux, les conférences interparlementaires, la coopération interparlementaire, les groupes d’amitié et la coopération interparlementaire entre les pays du Nord et les pays du Sud.

B : agenda politique et décision extérieure : fonction programmatique résiduelle

Théoriquement, les partis politiques jouent un rôle capital d’intermédiaire entre le  pouvoir et l’opinion publique[60] et à ce titre présentent des programmes conciliant les exigences internes avec les contraintes externes. Compte tenu de cette double fonction, le rôle joué par les partis politiques dans l’élaboration de la politique extérieure devrait être particulièrement riche. Ils sont admirablement placés pour équilibrer les demandes émanant des deux systèmes (interne et externe)[61]. Dans la pratique, les choses vont différemment dans la mesure où ils sacrifient le plus souvent la politique extérieure au souci de l’électoralisme et n’occupe dans leurs programmes qu’une place modeste[62]. Cette donnée reflète parfaitement les préoccupations de l’opinion qui en dehors des grandes tensions internationales, ne s’intéresse qu’aux affaires internes de sa société (chômage, inflation, inégalité sociale…), de ce fait un parti qui ferait exclusivement campagne sur les thèmes de la politique extérieure irait tout droit à l’échec[63].

Au Maroc, la vie politique est marquée par le pluralisme politique et le multipartisme. On assiste aujourd’hui à une prolifération des partis politiques qui dépasse quarante partis. Certes, partenaires dans la conduite de la l’action diplomatique marocaine, mais à titre limité et leurs participations dépendent avant tout du climat politique[64] ainsi, ils n’interviennent dans la phase finale du processus décisionnel que lorsque le palais le juge utile[65]. Pour la Monarchie, le rôle des partis était et demeure toujours celui d’organiser, d’encadrer et de représenter les intérêts et les volontés de la population marocaine ainsi que d’exécuter les politiques décidées par le sommet de l’édifice constitutionnel.

On doit rappeler que le changement des gouvernements marocain, même celui opérait dans le cadre d’une alternance politique suite à des élections générales, n’a pas remis pas en cause les orientations fondamentales de la politique extérieure du pays, aussi, sa continuité est perceptible à travers la grande similitude entre la déclaration de la politique générale présentée par le premier gouvernement d’alternance et les gouvernements successifs.

Cette continuité est également perceptible à travers la modestie de la place réservée à la politique extérieure dans les programmes électoraux des partis politiques[66]. Leur mission fondamentale était encore une fois de faire une sorte de lobbying à propos du conflit du Sahara. Sur le plan interne, ces forces politiques ont fonctionné aussi comme des intermédiaires du régime en vue d’assurer le soutien de la société à sa politique extérieure dans des moments clés tels que la Guerre des sables avec l’Algérie (1963), les interventions dans les conflits israélo-arabes de 1967 et 1973, et la Marche verte sur le Sahara (1975).

Néanmoins, les partis issus du Mouvement national ont aussi adopté parfois des positions critiques face aux principales orientations extérieures de l’Etat : son alignement pro-occidental (notamment dans la période bipolaire), ses concessions aux organisations financières internationales, ses accords de pêche– qui se sont même radicalisées lors de périodes de crise comme la guerre du Golfe de 1991, ce qui témoigne une certaine «fonction indirecte de contrôle» des décisions monarchiques[67].

Le PJD à titre d’exemple (aujourd’hui au pouvoir) a aussi affiné sa vision des relations internationales au cours de la dernière décennie, à mesure qu’il avançait dans son processus d’inclusion et de normalisation dans la sphère politique institutionnalisée. Il a en fait établit trois grands objectifs pour la politique extérieure du Maroc : récupérer sa place historique dans le domaine international ; répondre aux aspirations du peuple marocain à « une vie digne, à la sécurité et à la paix sociale » –c’est-à-dire contribuer au développement économique national– ; et atteindre «l’unité territoriale définitive»[68]. Le PJD, a démontré aussi un activisme très significatif par rapport aux autres formations politiques marocaines. Les relations propres que le PJD cultive lui-même dans sa facette d’acteur international autonome sont caractérisées par une ouverture délibérée sur les Etats-Unis et certains pays européens, considérés comme les principaux partenaires internationaux du Maroc.

En effet, l’étude des partis politiques marocain, nous emmène à conclure que de la thématique de la politique extérieure énoncée dans leurs programmes électoraux est presque la même chez la majorité des partis, ce qui laisse déduire l’existence d’un consensus national autour des grandes questions névralgiques qui touchent la souveraineté royaume, de manière à ce que les positions du parti coïncident avec celles du régime. En effet, l’intégrité territoriale et le Sahara occidental sont la clé de voûte de la cohésion politique du pays et du rétablissement des relations entre l’opposition nationaliste et la monarchie dès la moitié des années soixante-dix, ont été utilisés aussi par le PJD dans le but de se légitimer et de réaffirmer sa normalisation dans le paysage politique marocain[69].

Finalement, on ne peut pas admettre qu’il existe au Maroc un véritable front de refus concernant la décision extérieure, les grandes formations politiques du pays n’incarnent pas une vision différente et alternative de l’univers des valeurs et des pratiques. De même leurs arrivées au gouvernement n’entraîneront pas un changement de cap fondamental dans aucune des lignes prioritaires de l’action extérieure du royaume. Aussi, aucun parti n’a le droit de désapprouver une décision stratégique prise par le roi au risque de s’exposer à des sanctions politiques, alors toutes les critiques s’adressent au gouvernement et aux responsables diplomatiques[70]. Le système décisionnel restera donc bloqué par la prééminence exécutive du Roi. Baha leader de PJD affirme : « On n’aura pas un grand impact sur la politique extérieure en raison du rôle du Roi dans ce domaine »[71]. De même, les formations politiques marocaines ont accordé à la politique extérieure un intérêt relativement faible, parfois même dérisoire, dans leurs programmes électoraux. Quatre facteurs peuvent expliquer ce phénomène[72] :

1 : la conviction des partis que la politique extérieure relève du domaine réservé du chef de l’Etat et que le ministère des affaires étrangères est un ministère de souveraineté dont le titulaire, fut il un leader d’un parti politique, a pour la ligne de conduite de Roi et non pas la politique extérieure élaborée par les partis ;

2 : la politique extérieure est considérée aux yeux des partis politiques comme un thème électoral peu attrayant face à l’extrême diversité des problèmes socio-économiques internes ;

3 : le taux élevé d’analphabétisme de la population marocaine réduit la politique extérieure à une affaire d’élite ;

4 : la faiblesse organisationnelle des partis politiques manquant de commissions spécialisées dans l’étude et l’évolution des relations internationales du Maroc, avec des sous commissions à vocation sectorielle (économie, géostratégie, agriculture, flux migratoire, armement…) ou géographique (monde arabe, Maghreb, Méditerranée, Europe, Afrique…).

En définitive, le rôle des partis, si on le juge en longue période, est loin d’avoir été négligeable. Certes, ils ne jouent pas directement un rôle déterminant, mais depuis l’indépendance, ils ont assurés une sorte de fonction tribunitienne en animant un débat permanent sur les grandes orientations que pourrait ou que devrait prendre la politique extérieure du pays[73].

C : décision extérieure et réseau d’influence : intervention secondaire

  Deux illustrations méritent notre attention :

* le patronat : la Confédération générale des entreprises du Maroc (C.G.E.M) apparaît comme un acteur économique en pleine ascension grâce notamment au rôle déterminant que joue l’Etat marocain dans la formation et l’expansion des acteurs économiques[74]. Cela se cristallisera par deux grandes mesures : la première est celle de la marocanisation[75] qui a été décidé par le Dahir de 2 Mars 1973, la seconde est celle de la privatisation entamée au Maroc 1987, s’inscrivant dans le cadre du programme d’ajustement structurel imposé par le FMI et appliqué par les pouvoirs publics[76].

sous la présidence de M. Abderrahim Lahjouji en 1995 trois nouvelles fonctions qui s’ajoutent à celle de représentant du patronat et d’agent de concertation auprès des administrations : une mission d’interlocuteur auprès des pouvoirs publics, des partenaires sociaux ou des instances internationales en tant que mandataire reconnu du secteur privé ; une mission d’animateur intellectuel : mise en avant de nouveaux concepts «l’entreprise citoyenne »[77], création de débats publics dans des espaces privés, etc ; et enfin, un rôle de dynamiseur du partenariat et d’attraction vers le Maroc d’investissements étrangers : la CGEM, de par ses excellents contacts noués avec le patronat européen notamment, remplit également une fonction d’ambassadeur[78].

Le patronat marocain cherche depuis cette réforme, à intégrer le jeu politique marocain pour y jouer le rôle qui est le sien. Ce rôle clef qui lui permettra d’influencer les mécanismes de décisions et par conséquent de défendre ses intérêts. Dans ce sens, elle ne se contente pas de formuler des demandes au gouvernement, elle continue sa fonction en maintenant la pression sur les décideurs pour les amener à prendre en compte ses demandes. Officialisé par le « Gentlemen’s agreement »[79], qui a mis en place des structures de consultation et des procédures de concertation entre l’Etat, le patronat et les syndicats, la participation de la CGEM au processus décisionnel s’explique par une préoccupation d’efficacité politique et économique.

C’était d’ailleurs le cas, lors de la composition du premier gouvernement d’alternance, la CGEM, fut plusieurs fois contacté au cours des mois, Janvier, Février et Mars 1998, elle est consultée à titre générale en tant que représentant du patronat lors des rencontre entre des délégations de la CGEM et le bureau politique de l’USFP en janvier 1998, puis avec A. Youssoufi une fois qu’il fut nommé premier ministre. La CGEM fut de plus régulièrement sollicitée sur des questions plus spécifiques et de façon plus privée[80].

Egalement, le patronat marocain, dans la limite de ses possibilités, a usé de son privilège d’interlocuteur pour signifier au gouvernement son opinion dans le très controversé dossier des privatisations : la Confédération dressa par voie de presse un réquisitoire contre les procédures, arbitraires et politiques, de privatisation faites à la légère. Elle avait notamment exprimé en 1997, en tant que « conseiller technique », son indignation par rapport à la cession de la gestion de l’eau, de l’électricité et de l’assainissement de Casablanca à la Lyonnaise des Eaux. Sans succès de nouveau, elle exprima, en février 1998, les mêmes avertissements dans le cadre de la délégation de la gestion des services de l’eau et de l’électricité de Rabat-Salé à un groupe ibérique. Il s’agit là d’un exemple démontrant qu’un point de vue sectoriel – la protection et la promotion du secteur privé national – peut s’apparenter à la défense d’intérêts publics, en l’occurrence, le combat contre le bradage de biens publics[81].

Aussi, la CGEM a participé activement au processus qui a conduit le Maroc à la conclusion de l’accord d’association avec l’union européenne. C’est le cas aussi des professionnels du secteur agricole dont le revenu dépend des capacités exportatrices et des prix d’entrée au marché européen. Ils ont obtenu du gouvernement marocain la promesse de demander à l’union européenne une augmentation des exportations agricoles[82].

De leur cotés, les professionnels de la pêche ont participé avec le gouvernement à la préparation des dernières négociations sur la pêche maritime. La CGEM a également exigé des pouvoirs publics de négocier ave l’UE, la mise en place d’instruments de promotion de l’entreprise privée, l’objectif étant de moderniser les entreprises marocaines pour qu’elles puissent intégrer progressivement l’économie européenne et mondiale. Le gouvernement marocain ne peut donc s’en désintéresser, d’autant plus que les demandes du patronat vont de pair avec les ambitions européennes du Maroc[83]. De ce fait, la CGEM est présente dans tous les rendez-vous diplomatiques et débats susceptibles de faire avancer l’économie marocaine.

On doit rappeler finalement, que la CGEM intervient forcément lors de la préparation du projet de loi de finances, elle reclasse ses revendications fiscales bien que le sujet de l’amnistie fiscale figure tout au long de ces textes doctrinaux et présente une série de proposition qu’elle souhaite introduire dans le budget.

* l’opinion publique : A côté des groupements professionnels, les associations humanitaires, notamment de développement et de défense des droits de l’homme, sont incorporées graduellement dans le processus décisionnel notamment en matière de politique extérieure.

Théoriquement, les relations entre gouvernants et gouvernés en matière de politique extérieure est depuis longtemps au cœur des débats opposant deux approches théoriques différentes des relations internationales[84] : une approche qualifiée d’ « idéalisme »[85] et une approche dite « réaliste »[86].

Concrètement, le rapport de l’opinion publique à la politique extérieure n’est pas moins aléatoire. Il est même certain que l’opinion publique est le plus souvent accaparée, sauf en cas de crise internationale aiguë, par la solution des problèmes immédiats que se présentent à elle sous l’aspect de questions de politique intérieure (chômage, inflation…)[87]. De ce fait, le citoyen n’est pas devenu le décideur, mais il a gagné le droit d’être informé et consulté, C’est ainsi que les Gouvernements ont créé le ministère des Communications, doté les ministères de direction des communications ayant leur propre personnel et un budget respectables. La société civile[88] a même parfois remplacé l’Etat dans ses obligations dans certaines zones, soit renforcé ou créé des stratégies de survie et contribué à rendre les bailleurs plus sensibles à la demande sociale.

L’affirmation de l’opinion publique comme un acteur majeur des les démocraties modernes ne fait plus débat. En effet, le citoyen, des régimes démocratiques en particulier, se voient fréquemment appelés à se prononcer sur des questions de politique internationale. Par exemple, il a fallu quatre ans au Général De Gaulle pour faire accepter à l’opinion publique française l’indépendance de l’Algérie.

Au Maroc, on peut distinguer deux formes de participation de l’opinion publique à l’élaboration de la décision au Maroc[89] : La première se présente sous forme de pression directe ou indirecte que pourrait exercer des associations sur le gouvernement. La deuxième forme intervient lorsque les pouvoirs publics eux-mêmes organisent la concertation avec les associations ou les groupes d’intérêt avant d’opérer leur choix ou d’adopter leur politique publique[90]. Elles ont réussi de transformer des problèmes locaux (conflits, famines, inégalités de droits, etc.) en « causes internationales».

C’est à ce moment-là que les médias et plus particulièrement la presse intervient. D’une part, la presse spécialisée que sont les journaux syndicaux ou corporatifs. D’autre part, les groupes adressent à la grande presse un certain nombre de lettres, d’interviews…de manière à faire remonter certaines revendications des mouvements locaux sur la scène internationale et établissent ainsi une interface entre ces mouvements et les individus susceptibles de se mobiliser sur d’autres continents.

On doit rappeler dans ce sens que l’opinion publique nationale était toujours impliquer dans les grandes décisions stratégiques soit en admettant son soutien (fut le cas dans l’affaire de Sahara et l’intervention marocaine dans les conflits israélo-arabe de 1967 et 1973) soit en l’invitant à participer à l’exécution d’une décision (fut le cas des partis politiques marocain engagé depuis l’indépendance pour la défense des revendications territoriales marocaine et des causes arabes)[91].

Cependant, les quelques émeutes que le Maroc indépendant a connu, n’avaient pour causes immédiates que des revendications socio-économiques sectorielles à faible teneur politique[92]. Jamais une émeute politisée quelque soit son encadrement par les forces extra-gouvernementales, n’a eu pour plan prioritaire une revendication politique irréductible, « les manifestations de rue à des fins politiques sont un phénomène inexistant au Maroc »[93]. Il en est de même, lors des dernières manifestations qu’a connu le royaume (des dizaines de milliers de marocains regroupant jeunes sans avenir, travailleurs  appauvris, islamistes, dissidents politiques traditionnels, groupes de défense des droits de l’homme et autres en une sorte de mouvement sans dirigeant et sans agenda idéologique précis) qui à la différence d’autres mouvements, les manifestations marocaines avaient pour premier objectif la réforme, et non le renversement du régime ; elles n’ont pas directement attaqué le roi ni la monarchie.

Le Maroc a été parmi les rares pays qui ont fait face aux ramifications des révoltes populaires, dans le sillage du « printemps arabe », par une action préventive. L’action de l’Etat marocain a consisté à écouter l’essentiel des revendications sociales et à y répondre concrètement. Et c’est à ce niveau que se situe le discours royal du 9 Mars 2011, qui a annoncé une révision constitutionnelle globale, donnant suite aux requêtes sociales précitées, et organisant des élections législatives.

Conclusion :

        La décision extérieure marocaine réside dans une large mesure sous la responsabilité d’une élite sachant maîtriser les codes de la vie internationale et y puisant son statut. Ce processus est manifestement hiérarchique mais il demeure néanmoins propice au jeu de concurrence souvent discret entre les acteurs alors que la suprématie royale est sans doute évidente.

Les enjeux internes et externes continuent de modeler le processus décisionnel marocain, au tant que le débat sur l’Etat et sa transformation constitue une des interrogations principales de la sociologie de l’action publique, voire de la sociologie de l’Etat. Si les discours annonçant la fin de l’Etat ont une certaine histoire (Karl Marx et la thèse du dépérissement de l’Etat par exemple), ils ont aujourd’hui acquis une nouvelle vigueur[94]. Ils traitent de la fragmentation interne et de la différenciation de l’Etat ou bien des effets de la globalisation.

Le poids de l’Etat apparaît à ce stade comme un problème qui passe toujours avant celui de son rôle dans la société. Cette nouvelle dimension rend la décision extérieure plus complexe et la banalise, d’autant que la mondialisation conduit à l’internationalisation de la quasi-totalité des questions et renforce les liens entre politique intérieure et politique extérieure. La décision extérieure devient par la force des choses, une politique ordinaire, menée en grande partie par des administrations, sauf pour ce qui intéresse la « grande politique », celle qui touche notamment à la défense, aux alliances et à la géopolitique. À la lumière de cette nouvelle conjoncture, deux questions s’imposent irrévocablement : Peut-on libérer la décision extérieure du dogme du « domaine réservé », au « domaine partagé » ? Aussi, à la lumière de la nouvelle Constitution 2011, peut-on parler d’un affranchissement des décisions extérieures du domaine réservé ?

[1]Marie Christine Kessler, La politique étrangère de la France : Acteurs et processus, éd. Presses de Sciences Po, Coll. « Références inédites, paris 1999.

[2]Un troisième acteur qui navigue en eaux troubles: la Défense. Grand oublié des manuels de politique extérieure, la Défense nous semble pourtant justifier largement sa présence parmi les professionnels. Il est souvent présenté comme un simple exécutant, intervenant a posteriori, une fois la décision prise.

[3] Abderahim El Maslouhi, politique intérieure et politique extérieure au Maroc, essai d’identification de la dynamique interférentielle dans le champ politico-diplomatique marocain, thèse de doctorat, université Mohammed V, rabat 1999, p 69.

[4] Force est de relever qu’aucune disposition constitutionnelle n’énonce expressément le principe du domaine réservé au roi, Shimi Mustapha considère que : « du point de vue formel, aucune disposition de la constitution n’évoque […] cette formule de domaine réservé. Et partant, rien n’y indique la compétence exclusive du chef de l’Etat pour ce qui est des affaires étrangères et du Sahara »in Mustapha Shimi, grande encyclopédie du Maroc, vol. Institutions, rabat 1986, p 36.

[5] Selon Tozy, l’hégémonie de la monarchie se manifeste de deux manières : monopole de la production de symbolique religieuse, ce qui permet de maitriser le paradigme islamique du pouvoir et ensuite la capacité de l’Etat et du Makhzen à diffuser le sens des concepts politiques. La première est porteuse de signe et la seconde de sens. In Mohammed Tozy, monarchie et islam politique au Maroc, éd. Presses de sciences politiques, 1999, paris, p 75.

[6] L’interview au journal Ashark al-Awsat avec le roi Mohammed VI, du 24 juillet 2001, p.7.

[7] En justifiant d’ailleurs cette personnification, le roi Hassan II affirmait : « tous les grands Hommes d’Etats dans des circonstances bien déterminées ont eu à choisir entre le monopole politique du pouvoir et le risque de l’éclatement de l’Etat. On connaît dans les pays les plus démocratiques, des exemples célèbres d’une personnification active de la nation […] De Gaulle, Wilson Roosevelt, Eisenhower et Sir Winston Churchill ont tous, à un moment de l’histoire incarné leur nation [….] les circonstances commandaient et les peuples exigeaient un chef de salut public ». In Hassan II, le défi, éd. Albin Michel, paris 1976, p 157.

[8] C’est ainsi que le roi Mohammed VI a précisé que « notre diplomatie se doit d’élargir les perspectives de notre action et le cercle de nos relations économiques et commerciales au-delà de l’espace euro-méditerranéen en direction des Amériques et de l’Asie afin de diversifier nos liens, d’atténuer notre dépendance et d’élargir le champ de notre coopération ». Aussi, on peut ajouter « …l’édification de l’Union du Maghreb Arabe, demeure un objectif stratégique et nous n’aurons de cesse d’œuvrer pour en faire une réalité concrète ». In S.M. Mohammed VI, Message aux participants au colloque organisé à l’occasion de la célébration de la Journée nationale de la diplomatie marocaine, le 28 avril 2000, in Citations de S.M. Mohammed VI, Ed. Okad, 2000, P 162.

[9] Rachid El Houdaïgui, la politique étrangère sous le règne de Hassan II : acteurs, enjeux et processus décisionnels, éd, l’Harmattan 2003,  P 34.

[10] Contrairement au royaume du Suède par exemple,  où la fonction royale y est réduite à sa plus simple expression. La faculté de sanctionner les lois est supprimée. Le droit de composer les équipes gouvernementales est aboli. La monarchie à la suédoise paraît, cependant, constituer une exception sur la scène mondiale.

[11] Article 55 de la constitution 2011 : le Roi accrédite les ambassadeurs auprès des puissances étrangères et des organismes internationaux. Les ambassadeurs ou les représentants des organismes internationaux sont accrédités auprès de Lui. Il signe et ratifie les traités. Toutefois, les traités de paix ou d’union, ou ceux relatifs à la délimitation des frontières, les traités de commerce ou ceux engageant les finances de l’État ou dont l’application nécessite des mesures législatives, ainsi que les traités relatifs aux droits et libertés individuelles ou collectives des citoyennes et des citoyens, ne peuvent être ratifiés qu’après avoir été préalablement approuvés par la loi.

[12]Le roi cherche à « préserver et diffuser la religion musulmane par le biais des universités, des mosquées, des prédicateurs, des Ulémas et des professeurs. Le Roi Hassan II, affirmait : « L’Islam de Khomeiny, je l’ai déjà dit, je préférerais être athée!», Interview du roi du Maroc à la télévision française, 19 octobre 1979. In Christian Bidégaray, le monarque chef religieux, Pouvoirs 78, 1996, pp55-72,  p70.

[13]Michel Camau, changement politique au Maghreb, presse de CNRS, pp 153-168, in Baba Iguilide, leadership politique et processus des décisions publiques au Maroc, thèse de DESA, université Hassan I, Settat 2009,p 29.

[14]C’est la forme la plus récente, elle a été codifiée dans une série de constitutions faites autant pour satisfaire à la demande de l’élite nationale, répondre aux usages internationaux et donner ainsi une image positive de l’Etat marocain. Au Maroc, légitimités et pouvoirs s’entremêlent, le roi est à la fois dans les institutions et au dessus d’elles. Le symbole de cette légitimité aux multiples sens se trouve dans la cérémonie d’allégeance (bey’a), le roi est ainsi au-dessus de tous les autres pouvoirs. Selon le juge constitutionnel, il est le responsable suprême du pays.

[15] relève de la force des choses et de la possession d’état du fait que le monarque est le descendant d’une dynastie gouvernant le pays depuis près de quatre siècles (plus que les Hanovre en Angleterre) et qu’il se considère comme l’héritier des dynasties antérieures.

[16]Il est Le commandeur des croyants selon l’article 41 de la Constitution 2011. En terre d’islam, le pouvoir politique n’a pas une source unique, de même son champ d’application n’est pas unifié. On présente souvent cette particularité comme le résultat de la non différenciation du spirituel et du temporel.  Attachée à ses titres d’imâm et de chérif (descendant du prophète), la sacralité du roi vient modifier l’ordre institutionnel. « La constitution fait de l’obéissance un devoir civique, la chari’a en fait une obligation canonique, le chérifisme la transforme en source de bénédiction ». in Mohammed Tozy, Le roi, commandeur des croyants, in Driss Basri et alt, Édification d’un État moderne. Le Maroc de Hassan II, Paris, Albin Michel, 1986, p. 61. In Abderahim El Maslouhi, op.cit, p 69.

[17]Daniel J. Grange, la monarchie chérifienne jeux de pouvoirs et pouvoir du temps, géopolitique, n°57, 1997, P22.

[18] En vertu de L’article 48 de la constitution de 2011 qui stipule que : le Roi préside le Conseil des ministres composé du Chef du Gouvernement et des ministres. Le Conseil des ministres se réunit à l’initiative du Roi ou à la demande du Chef du Gouvernement. Le Roi peut, sur la base d’un ordre du jour déterminé, déléguer au Chef du Gouvernement la présidence d’une réunion du Conseil des ministres.

[19] L’article 50 : Le Roi promulgue la loi dans les trente jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée. La loi ainsi promulguée doit faire l’objet de publication au Bulletin officiel du Royaume dans un délai n’excédant pas un mois, courant à compter de la date du dahir de sa promulgation. Et l’article 51 : Le Roi peut dissoudre, par dahir, les deux Chambres du Parlement ou l’une d’elles dans les conditions prévues aux articles 96, 97 et 98.

[20] Abdellah Laroui, affirme qu’il y eut un véritable chef de gouvernement au Maroc  à trois reprises, entre avril 1958 et Mai 1960 sous le gouvernement de Balafrej et Ibrahim ; entre novembre 1963 et juin 1965 durant la première expérience parlementaire, entre avril 1974 et juin 1981 sous les deux gouvernements d’Osman et le premier gouvernement Maati Bouabid. In Abdellah Laroui, le Maroc et Hassan II, éd. Les presses inter-universitaires, 2005, p 232.

[21] Saïd Ihrai, pouvoir et influence, éd. El Maarif El Jadida, coll. Différences, Rabat 1986, P 29

[22] Le Gouvernement Abderrahman el-Youssoufi est le 25e gouvernement du Maroc depuis son indépendance en 1956. Formé le 14 mars 1998, il a pris fin le 6 novembre 2002.

[23] Rachid El Houdaïgui, op.cit, P 200.

[24] L’article 7 de la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, les ministres des affaires étrangères jouissent à coté du chef de l’Etat et de gouvernement de la présomption de la représentativité de leur Etat et donc de la capacité à engager internationalement leur pays sans avoir à présenter les pleins pouvoirs, ce qui n’est pas le cas des autres ministres devant être munis des pleins pouvoir pour prouver leur représentativité.

[25] Lors de sa création, le ministère des affaires étrangères marocain était censé d’accomplir une double mission : d’abord l’établissement d’un cadre général du ministère, c’est-à-dire le doter des ressources humaines, matérielles et juridiques dignes d’un Etat souverain et indépendant. Ensuite faire en sorte que le Maroc retrouve sa place sur la scène internationale.

[26] En vertu du décret de 20 janvier 1995 relatif aux attributions du ministère des affaires étrangères (article 1 paragraphe 4), précisant aussi qu’a l’exception des traités que le roi signe et ratifie en général, c’est le ministre des affaires étrangères qui paraphe, signe renouvelle ou dénonce au nom du gouvernement ou délivre s’il y a lieu les pleins pouvoirs à l’effet de négocier ou de signer. In Abdelhak Janati Idrissi, le ministère des affaires étrangères et la coordination des relations extérieures du Maroc, revue marocaine d’études internationales n°1, Mai 1998, p 63.

[27] paragraphe 3 de l’article 2 du décret  de 20 Janvier 1995 qui prévoit que le ministre des affaires étrangères et de la coopération : « conduit les négociations des traités, conventions, accords, protocoles et autres instruments juridiques internationaux à caractère politique et diplomatique et coordonne celles des engagements extérieurs du Maroc de nature économique, commerciale, financière, sociale, culturelle et technique».

[28] On peut faire la même remarque en France, qui depuis le IIIème et la IVème république avait nommé au poste de ministre des affaires étrangères des personnes indépendantes et sans appartenance partisane comme Briand Delcassé, sous la Vème république et jusqu’à 1984, seulement deux ministre sur sept, avaient une position partisane : Michel Debré et Maurice Schuman.

[29] Les cas de Abdellah Ibrahim chef de l’aile progressiste du parti Istiqlal et de M’hamed Boucetta sont révélateurs. Le premier est nommé le 24 décembre 1958, président du conseil, ministre des affaires étrangères et de l’information.

[30] Dahir n°1-89-66 du 13 Mars 1989 modifiant le Dahir n°85-69 du 11-04-1985, BORM n°3990, 19-04-90.

[31] Créée au lendemain de la signature à Marrakech du traité instituant une union entre les pays du Maghreb. Ce ministère perdait de son importance au fur et à mesure que les relations inter-maghrébines se dégradaient. Aujourd’hui, ce ministère est réduit à une simple division rattachée à la direction des affaires arabes et islamiques du ministère des affaires étrangères.

[32]Charger de renforcer et d’élargir le dialogue et la concertation avec les organisations régionales et internationales en vue de dynamiser le rôle du Maroc sur la scène internationale en matière de Droit de l’homme.

[33] Le décret n°2-94-864 du 20 janvier 1995 rappelle que le ministre des affaires étrangères assure la protection des ressortissants, des intérêts et des biens marocains à l’étranger […].

[34] Dahir n°1-92-137 du 11-08-92

[35] Par exemple, c’est le ministre de l’agriculture Hassan Ayoub, qui a négocié le volet agricole de l’accord d’association maroco-européen de 1996. Aussi la délégation marocaine qui a conduit la négociation de  l’accord de pêche de 1996 se composait essentiellement des fonctionnaires du ministère de la pêche.

[36] Décret n°2-82-36 du 4 avril 1983 fixant les attributions et l’organisation du ministère de transport (B.O 6 avril 1983).

[37] Abdelhak Janati Idrissi, le ministère des affaires étrangères et la coordination des relations extérieures du Maroc, revue marocaine d’études internationales, n°1, Mai 1998, pp 57-58.

[38] Marcel Merle, la politique étrangère, chapitre X, in Madeline Grawitz, Jean Leca, traité de politique publique, éd. Puf, 1985, p 486.

[39] L’article 60 de la constitution de 2011 stipule : « Le Parlement est composé de deux Chambres, la Chambre des Représentants et la Chambre des Conseillers. Leurs membres tiennent leur mandat de la Nation. Leur droit de vote est personnel et ne peut être délégué. L’Opposition est une composante essentielle des deux Chambres. Elle participe aux fonctions de législation et de contrôle telles que prévues, notamment dans le présent titre ».

[40] L’article 62 de la constitution 2011 stipule : « Les membres de la Chambre des Représentants sont élus pour cinq ans au suffrage universel direct. La législature prend fin à l’ouverture de la session d’octobre de la cinquième année qui suit l’élection de la Chambre. Le nombre des représentants, le régime électoral, les principes du découpage électoral, les conditions d’éligibilité, le régime des incompatibilités, les règles de limitation du cumul de mandats et l’organisation du contentieux électoral, sont fixés par une loi organique.

Le Président et les membres du Bureau de la Chambre des Représentants, ainsi que les présidents des

Commissions permanentes et leurs bureaux, sont élus en début de législature, puis à la troisième année de celle-ci lors de la session d’avril et pour la période restant à courir de ladite législature. L’élection des membres du Bureau a lieu à la représentation proportionnelle des groupes ».

[41] En vertu de l’article 63 de la constitution de 2011 : « La Chambre des Conseillers comprend au minimum 90 membres et au maximum 120, élus au suffrage universel indirect pour six ans, selon la répartition suivante : Trois cinquièmes des membres représentant les collectivités territoriales. Cet effectif est réparti entre les régions du Royaume en proportion de leurs populations respectives et en observant l’équité entre les territoires. Le tiers réservé à la région est élu au niveau de chaque région par le Conseil régional parmi ses membres. Les deux tiers restants sont élus par un collège électoral constitué au niveau de la région par les membres des conseils communaux, provinciaux et préfectoraux, Deux cinquièmes des membres élus dans chaque région par des collèges électoraux composés d’élus des Chambres professionnelles et des organisations professionnelles des employeurs les plus représentatives, et de membres élus à l’échelon national par un collège électoral composé des représentants des salariés. Le nombre des membres de la Chambre des Conseillers et leur régime électoral, le nombre de ceux à élire par chacun des collèges électoraux, la répartition des sièges par région, les conditions d’éligibilité et le régime des incompatibilités, les règles de limitation du cumul de mandats, ainsi que l’organisation du contentieux électoral, sont fixés par une loi organique. Le Président de la Chambre des Conseillers et les membres du Bureau, ainsi que les présidents des Commissions permanentes et leurs bureaux, sont élus en début de législature, puis au terme de la moitié de la législature et pour la période restant à courir de ladite législature. L’élection des membres du Bureau a lieu à la représentation proportionnelle des groupes ».

[42] Article 42 de la constitution de 2011

[43] Bahouhi Tahar, le parlement dans le discours royal, in l’expérience parlementaire au Maroc, (sous la direction de) A. Menouni et autres, Casablanca, éd. Toubkal, 1985, p 46. In Rachid El Houdaigui, op.cit p 67

[44] En vertu de l’article 50 de la constitution de 2011 : « Le Roi promulgue la loi dans les trente jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée. La loi ainsi promulguée doit faire l’objet de publication au Bulletin officiel du Royaume dans un délai n’excédant pas un mois, courant à compter de la date du dahir de sa promulgation ».

[45] L’article 95 de la constitution 2011 stipule : « Le Roi peut demander aux deux Chambres du Parlement qu’il soit procédé à une nouvelle lecture de tout projet ou proposition de loi. La demande d’une nouvelle lecture est formulée par message. Cette nouvelle lecture ne peut être refusée ».

[46] L’article 96 prévoit de la constitution 2011 : « Le Roi peut, après avoir consulté le Président de la Cour Constitutionnelle et informé le Chef du Gouvernement, le Président de la Chambre des Représentants et le Président de la Chambre des Conseillers, dissoudre par dahir, les deux Chambres ou l’une d’elles seulement. La dissolution a lieu après message adressé par le Roi à la Nation ».

[47] On doit rappeler que la mesure de dissolution n’a été  prise qu’une seule fois dans l’histoire  du Maroc indépendant, lors de la déclaration de l’Etat d’exception le 7 Juin 1965 à 1970.

[48] L’article 64 prévoit de la constitution 2011: « aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi ou recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion d’une opinion ou d’un vote émis par lui dans l’exercice de ses fonctions, hormis le cas où l’opinion exprimée met en cause la forme monarchique de l’État, la religion musulmane ou constitue une atteinte au respect dû au Roi ».

[49] L’article 52 stipule de la constitution 2011: « Le Roi peut adresser des messages à la Nation et au Parlement. Les messages sont lus devant l’une et l’autre Chambre et ne peuvent y faire l’objet d’aucun débat ».

[50] L’article 70 de la constitution 2011 : « Le Parlement exerce le pouvoir législatif. Il vote les lois, contrôle l’action du gouvernement et évalue les politiques publiques… », L’article 75 : « Le Parlement vote la loi de finances, déposée par priorité devant la Chambre des Représentants, dans les conditions prévues par une loi organique. Celle-ci détermine la nature des informations, documents et données nécessaires pour enrichir les débats parlementaires sur le projet de loi de finances… » Et l’article 76 : « Le gouvernement soumet annuellement au Parlement  une loi de règlement de la loi de finances portant sur l’exercice précédent. Cette loi inclut le bilan des budgets d’investissement dont la durée est arrivée à échéance ».

[51] L’article 100 de la constitution 2011 prévoit : « Une séance par semaine est réservée dans chaque Chambre par priorité aux questions des membres de celle-ci et aux réponses du gouvernement. Le gouvernement doit donner sa réponse dans les vingt jours suivant la date à laquelle il a été saisi de la question. Les réponses aux questions de politique générale sont données par le Chef du Gouvernement. Une séance par mois est réservée à ces questions et les réponses y afférentes sont présentées devant la Chambre concernée dans les trente jours suivant la date de leur transmission au Chef du Gouvernement ».

[52] L’article 99 de la constitution 2011 stipule: « La déclaration de guerre, décidée en Conseil des ministres, conformément à l’article 49 de la présente Constitution, a lieu après communication faite par le Roi au Parlement. Des rapports entre les Pouvoirs législatif et exécutif ».

[53] L’article 55 stipule : « Le Roi […] signe et ratifie les traités. Toutefois, les traités de paix ou d’union, ou ceux relatifs à la délimitation des frontières, les traités de commerce ou ceux engageant les finances de l’État ou dont l’application nécessite des mesures législatives, ainsi que les traités relatifs aux droits et libertés individuelles ou collectives des citoyennes et des citoyens, ne peuvent être ratifiés qu’après avoir été préalablement approuvés par la loi ».

[54] Depuis la constitution de 2011, l’appellation du conseil constitutionnel va être remplacée par la Cour Constitutionnelle prévue à l’article 129.

[55] A la suite d’une première saisine du président de la république au titre de l’article 54 (Maastricht I, 9 avril 1992, n 92-308 DC) par le président François Mitterrand le 11 Mars 1992, le conseil constitutionnel constata que le traité était contraire à la constitution sur trois points, ce qui entraina la révision constitutionnelle du 25 juin 1992. Entre temps, le président avait décidé de soumettre au peuple par voie de référendum pour le 20 septembre, l’adoption de la loi autorisant la ratification du traité. Le 14 août 1992, un groupe de 70 sénateurs conduit par Monsieur Charles Pasqua utilise la nouvelle possibilité offerte par l’article 54 de la constitution modifiée et saisie le conseil constitutionnel d’une demande fortement motivée, de contrôle de conformité du traité à la constitution révisée. Le 2 septembre, le juge constitutionnel rejette l’ensemble des griefs des sénateurs en affirmant que le traité sur l’union européenne ne comporte de clause contraire à la constitution et qu’en conséquence l’autorisation de le ratifier peut intervenir sur le fondement d’une loi. Décision n°92-312 DC du 2 septembre 1992Maastricht II RFDC, 12-1992, p 714 in Christman Olivia, le parlement français et le droit international, thèse de DEA, université de paris I, 2000,  p 102.

[56] L’article 132 stipule : « […] Les lois organiques avant leur promulgation et les règlements de la Chambre des Représentants et de la Chambre des Conseillers, avant leur mise en application, doivent être soumis à la Cour Constitutionnelle qui se prononce sur leur conformité à la Constitution. Aux mêmes fins, les lois et les engagements internationaux peuvent être déférés à la Cour Constitutionnelle avant leur promulgation ou leur ratification, par le Roi, le Chef du Gouvernement, le Président de la Chambre des Représentants, le Président de la Chambre des Conseillers, ou par le cinquième des membres de la Chambre des Représentants ou quarante membres de la Chambre des Conseillers. Dans les cas prévus aux deuxième et troisième alinéas du présent article, la Cour Constitutionnelle statue dans un délai d’un mois à compter de sa saisine. Toutefois, à la demande du gouvernement, s’il y a urgence, ce délai est ramené à huit jours. Dans ces mêmes cas, la saisine de la Cour Constitutionnelle suspend le délai de promulgation. Elle statue sur la régularité de l’élection des membres du Parlement dans un délai d’un an, à compter de la date d’expiration du délai légal du recours. Toutefois, la Cour peut statuer au-delà de ce délai, par décision motivée, dans le cas où le nombre de recours ou leur nature l’exige. »

[57]La diplomatie parlementaire ne date pas de très longtemps. Certes, on ne peut situer exactement la période de son apparition dans la scène internationale, mais une chose est certaine, son émergence, est liée au phénomène de la mondialisation.

[58]On peut ainsi distinguer à travers cette définition deux volets principaux de la diplomatie : la diplomatie parlementaire bilatérale et la diplomatie parlementaire multilatérale. Par diplomatie parlementaire bilatérale, il faut comprendre la diplomatie telle exercée par les parlementaires ou les parlements pris individuellement à travers les groupes d’amitié, des visites, des échanges, des jumelages. Quand à la diplomatie parlementaire multilatérale elle concerne celle exercée par la voie des associations internationales de parlementaires.

[59] L’assemblée parlementaire de l’organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

[60] De ce fait, ils sont astreints à pratiquer une double stratégie : l’une qu’on pourrait qualifier de « verticale », tournée vers les problèmes extérieurs à travers les soucis ou les perspectives de l’activité gouvernementale, l’autre qu’on pourrait qualifier d’ « horizontale », tournée vers la compétition avec les autres partis qui gouvernent ou qui ont l’ambition de gouverner. In Marcel Merle, partis politiques et politique étrangère en régime pluraliste, revue internationale des sciences sociales, n°1, vol XXX, paris 1978, p 82.

[61] Marcel Merle, partis politiques et politique étrangère en régime pluraliste, revue internationale des sciences sociales, n°1, vol XXX, paris 1978, p 82.

[62]Marcel Merle, la politique étrangère, in Madeline Grawitz, Jean Leca, traité de science politique, chapitre X éd. Puf, 1985, P 493

[63] Comme ce fut le cas de Mme Marie France Garaud aux élections présidentielles de 1981.

[64] En période de crise par exemple, les formations politiques sont exclues du champ décisionnel, c’est ce qui est  arrivée lorsque le roi a décrété l’état d’exception de 1965 à 1970,  et au moment 1981 à 1984 où le roi Hassan II a accepté l’organisation du référendum au Sahara occidental.

[65]Pour l’institution monarchique, les partis politiques ont été à la fois des alliés et des adversaires. Alliés de la première heure d’abord, en ce sens qu’ils ont été des acteurs centraux dans la lutte pour l’indépendance du pays: les partis politiques marocains ont fait un travail pour encadrer et catalyser les énergies de la population pour la cause de l’indépendance qui s’est avéré décisif. Ils ont parallèlement exercé une pression constante sur la puissance coloniale et ses relais marocains, se révélant ainsi le meilleur appui sur lequel le Sultan Mohammed Ben Youssef pouvait compter. Toutefois, les divergences de points de vue entre d’une part les partis composant le mouvement national, à la tête duquel se trouvaient, rappelons nous, l’Istiqlal, l’UNFP et l’USFP, et d’autre part la  monarchie, est devenu un fossé aux lendemains de l’indépendance pour ensuite devenir un gouffre qui se poursuivra jusqu’à l’alternance sous Hassan II. In Karim Boujrada, le Maroc à la lumière de l’enjeu démocratique, op.cit, p 15.

[66] Janati Idrissi Abdelhak, la politique étrangère du Maroc d’après la déclaration de politique générale du gouvernement d’alternance, revue marocaine d’études internationales, n°2, Janvier 1999, P 116

[67] Irene Fernández Molina, Le PJD et la politique étrangère de Maroc. Entre l’idéologie et le pragmatisme, éd. CIDOB, n°7, 2007, P 38

[68] Pour cette formation politique, la priorité actuellement accordée aux objectifs économiques : «La politique étrangère s’inscrit maintenant dans un processus de mondialisation qui est irréversible (…), c’est une donne. Les Marocains s’attendent à une amélioration de leurs conditions de vie. La priorité, ce sont les investissements étrangers, la transparence totale, la lutte contre la corruption. C’est préparer le terrain pour que les investisseurs étrangers aient confiance en le Maroc. In : www.pjd.ma

[69] Irene Fernández Molina, Le PJD et la politique étrangère de Maroc. Op.cit, P 49

[70] Le roi Hassan II n’hésitait pas d’exercer des pressions permanentes sur l’USFP pour le ramener à réintégrer la sacro sainte unanimité autour de la question saharienne, Sa fermeté se manifestait de deux manières : D’abord par l’arrestation de cinq membres de l’USFP, dont deux députés bénéficiaient de l’immunité parlementaire et traduits en justice. Ils furent accusés d’atteinte à l’ordre et à la sécurité publique ainsi que pour atteinte aux citoyens dans leur attachement à la personne du souverain. Abderrahim Bouabid et deux de ses compagnons (El Yazghi et Lahbabi) seront condamnés à un an de prison ferme, ce qui surpris les observateurs, vu son passé nationaliste, son rôle modérateur au sein de la gauche et son prestige international lui valaient une place importante dans la gestion du processus de récupération de Sahara. Ensuite, par la contrainte politique qui consistait à exclure le parti du régime.

[71] Irene Fernández Molina, Op.cit, P 82.

[72] Janati Idrissi Abdelhak, la politique étrangère du Maroc d’après la déclaration de politique générale du gouvernement d’alternance, op.cit, P 112.

[73] Said Ihraï, pouvoir et influence, op.cit, P 11.

[74] L’adoption par le Maroc du PAS el d’une philosophie néolibérale en matière de politiques économiques au cours des années 1980 et 1990 dans un contexte sociopolitique en manque de perspectives s’est traduite par la valorisation de l’entrepreneur moderne comme nouvel acteur sur la scène publique «se substituant, du moins discursivement, au «bourgeois parasite» ou au «bourgeois non-bourgeois » : Ceux de la classe possédante qui se seraient enrichis d’abord grâce à leurs contacts avec des membres influents du gouvernement ou de la famille royale. Profitant surtout de situation de renie. Ils représentent l’opposé de l’image de l’entrepreneur moderne qui innoverait et produirait grâce à son éducation, son intelligence el son courage. In Karim Boujrada,

le Maroc à la lumière de l’enjeu démocratique », mémoire de maitrise en science politique, Université du Québec à Montréal, Mai 2008, p 51.

[75] Le Roi Hassan Il a entreprit la « marocanisation » de l’économie en procédant au rachat des entreprises commerciales et industrielles étrangères et à la récupération des terres de colonisation privée (principalement françaises). Cependant, la marocanisation fut monopolisée par une minorité de privilégiés, renforçant l’emprise de la Monarchie et du Makhzen sur le pays. In Simon Perrin, les entrepreneurs marocains un nouveau rôle social et politique face au Makhzen?, itinéraires, Études du Développement n°15 ; Institut Universitaire du Développement, Mémoire de diplôme d’Études avancées, Genève, 2002, p 39.

[76] La privatisation est destinée à favoriser la concentration des capitaux, ce qui a permet à des familles d’intérêts de se transformer en entrepreneurs fortunés, leurs nombres approchaient 2000 milliardaires en 1978 alors qu’ils étaient à peine une vingtaine au début de l’indépendance.in Rachid El Houdaïgui, op. cit. p 84.

[77] Ce concept est défendu par son ex président Lahjouji, pour qui la citoyenneté se déclinerait autour de quatre types de responsabilité de l’entreprise vis-à-vis de la société : des responsabilités économiques (l’entreprise comme lieu de production des richesses), sociales (l’entreprise comme lieu d’épanouissement des hommes), culturelles et sociales (l’entreprise pour lutter contre le chômage, l’exclusion sociale, la dégradation de l’environnement, etc.), et enfin internationales. cf. le site de la CGEM : www.cgem.org.

[78] Simon Perrin, les entrepreneurs marocains, un nouveau rôle social et politique face au Makhzen », itinéraires mémoire de diplôme d’études approfondies, institut universitaire d’études du développement, Genève, Octobre 2002,p 98.

[79] Cet accord est le fruit de 2 mois de négociation (du 3 juin 1996 au 1er aout 1996) entre le gouvernement, les représentants des centrales syndicales et le patronat. Dans cet esprit de « dialogue social », une déclaration commune allant dans le sens d’une reconnaissance d’intérêts communs. Le troisième principal syndicat du Royaume, l’UMT (Union marocaine des travailleurs), adoptait une position critique à l’égard de cet accord, en participant néanmoins à quelques réunions de travail. La déclaration a été signée à Rabat par Abderrazak Afilal, SG de l’union générale des travailleurs du Maroc (UGTM), Noubir Amaoui, SG de la confédération démocratique de travail (CDT) Abderrahim Lahjouji, président de la CGEM et Driss Basri ministre d’Etat à l’intérieur. Simon Perrin, op.cit, P 92.

[80] El Gharaf Samira, travail gouvernemental et décisions publiques au Maroc : contribution à l’étude de la politique économique du gouvernement d’alternance, thèse de doctorat, université Cadi Ayyad, Marrakech 2009, P 92

[81] Simon Perrin, op.cit, P 98

[82] Les augmentations obtenues au bout de six mois de négociations portent sur la tomate (20.000 tonnes de plus), les pommes de terres (40.000 tonnes de plus), les agrumes (10.000 tonnes de plus) et plus de 3000 tonnes de plus pour les fleurs coupés. Cf le matin du Sahara et du Maghreb 27 février 1996.

[83] Rachid El Houdaigui, op.cit P 98

[84] Politique étrangère, nouveaux regards, (sous dir), Frédéric Charillon, op.cit, p 194

[85] Les « idéalistes » placent l’opinion publique au centre de la vie publiques.ses partisans, s’appuyant sur une tradition remontant à Emmanuel Kant défendent l’intégrité du rôle qu’ont à jouer les individus dans la politique et s’opposent à la volonté arbitraire du souverain.

[86] Selon les tenants de cette approche, la démocratie serait incompatible avec la politique étrangère, d’une part, puisque cette dernière requiert un minimum de secret, et d’autre part, parce que le public est capable uniquement de réactions passionnelles.

[87] Marcel Merle, sociologie des relations internationales, éd. Dalloz, 4ème édition, 1988, p 343.

[88] le Conseil économique et social de la république française a mené une réflexion approfondie sur les concepts de «société civile» sur cette base, le CES a apporté une première ébauche de définition qui reste aujourd’hui pertinente : par « société civile », on entend l’ensemble des citoyens, dans la diversité de leurs appartenances professionnelles et sociales, qui constituent la société et expriment leur volonté de participation à travers des organisations, associations et structures très diversifiées, ayant pour finalité de concourir à la poursuite d’objectifs à caractère économique, social, culturel, éducatif, sportif, humanitaire, civique ou autre, ne ressortissant pas directement à la sphère politique et étatique. In www.lecese.fr

[89] La société civile au Maroc, allocution de M. Rachid El Houdaïgui au séminaire sur la Clarification des Missions de l’Etat, de la Société Civile et du Secteur Privé dans la Gouvernance Economique et la lutte contre la Pauvreté en Afrique, du 24 au 27 Mai 2004, Tanger- Maroc-, P 4.

[90] On doit rappeler que c’est surtout la montée en force des associations professionnelles, humanitaires et sociales, et l’étendue de leurs relations internationales qui ont fait que le décideur leur ouvre les champs décisionnels.

[91] On doit rappeler que pendant la guerre de golfe 1990-1991 un mouvement populaire actif et massif qui rassemble toutes les forces vives de la société civile marocaine, s’est opposé à la politique pro-occidentale du roi Hassan II. Cette manifestation est considérée en fait comme la première des grandes manifestations politiques de son histoire post-coloniale, quelque 500.000 manifestant se sont précipités dans les rues de la capitale. D’autres manifestations en 2002 contre la répression sanglante de la deuxième Intifada et en 2003contre l’invasion de l’Irak qui regroupèrent des millions de manifestants.

[92] Les causes immédiates sont diverses : refus de la nouvelle réglementation scolaire en 1965, réaction à la dégradation du pouvoir d’achat en 1981, réplique aux décisions suggérées par le FMI en 1984. Cf, Jean François Clement, les révoltes urbaines, in le Maroc actuel, p 402, in Abderahim El Maslouhi, op.cit, p 253.

[93] Abdelghani Abouhani, le Maroc, crise du modèle de développement et perspective de changement, in le Maghreb : enlisement ou nouveau départ, Amin Samir, dir L’Harmattan 1996, p 76

[94] Maints auteurs prennent au sérieux l’hypothèse du déclin de l’Etat comme Dupuy&Thoenig, l’Etat en miettes, 1985. En revanche, les formules que l’on trouve plutôt dans la littérature française comme « l’Etat stratège », «l’Etat animateur », ou « Etat régulateur », visent à suggérer de nouvelles formes d’action de l’Etat.

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