Responsabilité professionnelle du fabricant des produits dangereux
Mohammed chakib Himmich – Nadia Lamchichi
Département de Droit Privé,
Centre des Etudes Doctorales,
Université Mohammed V FSJES Souissi,
Rabat, Maroc
RESUME : Au Maroc comme dans d’autres pays, l’utilisation des produits dangereux devient de plus en plus une nécessité dans tous les domaines (agriculture, industrie, agroalimentaire, santé, etc.). Cependant, cette utilisation croissante génère une grande quantité de déchets dangereux donnant lieu à des incidents majeurs qui impactent la santé des individus et dégradent l’environnement, c’est pourquoi les législations internationale et nationale essaient d’encadrer cette utilisation, pour cela une responsabilisation des utilisateurs est devenue obligatoire. Au Maroc, plusieurs lois sont adoptées pour accompagner ce changement. Dès le début du troisième millénaire, l’arsenal juridique marocain s’est doté de plusieurs lois relatives à la gestion de l’environnement en général et qui visent sa protection c’est le cas de la loi N° 11-03 du 12 mai 2003 et d’autres textes spécialisées dans des produits spécifiques compte tenu des risques qu’ils présentent. C’est le cas de la loi N° 12-02 relative à la responsabilité civile des préjudices nucléaires ou la loi N° 42-95 relative au contrôle et à l’organisation du commerce des pesticides. Cependant l’effectivité de ces lois reste limitée, plusieurs explications peuvent être avancées à cet état des lieux.
MOTS-CLEFS : Environnement, développement durable, santé publique, répression, pollution, réparation.
1 INTRODUCTION
Au Maroc, comme dans d’autres pays en voie de développement, l’évolution rapide du contexte socio-économique[1] a encouragé l’utilisation de produits dangereux dans différents types d’activités économiques et en parallèle, a contribué à une production notable des déchets dangereux. Qu’entend-on tout d’abord par produit et déchet dangereux ?
La définition est donnée par le législateur marocain en l’occurrence dans le dahir du Dahir n° 1-11-140 du 16 ramadan 1432 (17 août 2011) ainsi un produit dangereux est tout produit qui ne répond pas à la définition du produit sûr[2]. S’agissant des déchets dangereux, le législateur considère que ce sont toutes les formes de déchets qui, par leur nature dangereuse, toxique[3], réactive, explosive, inflammable, biologique ou bactérienne, sont susceptibles de constituer un danger pour l’équilibre écologique.
La prolifération de l’utilisation des produits chimiques et l’augmentation de la quantité des déchets produits, ainsi que les lacunes constatées dans leur gestion à différents niveaux de leur cycle de vie, font que ces produits peuvent présenter des risques sérieux d’atteinte à l’environnement et à la santé des populations. De même, la mise en décharge qui reste le mode d’élimination le plus répandu au Maroc de ces produits -, déchets dangereux en fin de leur cycle de vie – pose des problèmes en matière de pollution des sols, de contamination des eaux superficielles et souterraines et d’émissions de gaz à effet de serre avec des répercussions très négatives sur la santé humaine.[4]
Par ailleurs, l’historique des accidents dus aux produits chimiques et aux déchets dangereux montre que l’industrie chimique demeure l’activité qui engendre le plus de risques industriels plus ou moins graves. De tels accidents peuvent se produire dans des unités industrielles où les substances dangereuses sont produites, manipulées, entreposées, éliminées ou transportées et contribuer à la pollution de l’environnement.
Par ailleurs, la gestion écologiquement rationnelle des produits chimiques et des déchets dangereux a été reconnue au niveau international, comme un des objectifs du développement durable.
En adhérant à l’ensemble des instruments internationaux régissant ce domaine, le Maroc s’est engagé à mettre en œuvre les mesures appropriées pour assurer une gestion écologiquement rationnelle des produits chimiques et des déchets dangereux.
A cet effet, le Maroc a adopté plusieurs lois (dont la loi n° 11-03 relative à la protection et à la mise en valeur de l’environnement , la loi n° 24-09 relative à la sécurité des produits et des services et la loi n° 28-00 relative à la gestion des déchets et leur élimination) qui régissent ce secteur et a ratifié des conventions internationales en la matière (comme la convention de Stockholm la convention de Rotterdam du 10 septembre 1998 sur le commerce international de certains produits chimiques et pesticides dangereux).
Pour ce qui concerne les mesures de police ont des sources éclatées : code pénal, infractions définies et sanctionnées par les textes sectoriels, Dahir des Obligations et Contrats, dahir portant procédure civile et dahir portant procédure pénale. Des questions restent posées en la matière : éléments constitutifs de l’infraction, la mise en œuvre de la responsabilité, la nature des sanctions et la question relative aux Personnes pouvant faire l’objet de poursuites.
Et parmi ces personnes figure le producteur des produits dangereux, dont le législateur a déterminé la responsabilité en cas d’infraction et de dommage causé à autrui. A ce propos, comment définir la responsabilité professionnelle et qu’entendre par producteur ?
La responsabilité professionnelle : Toute personne est responsable de ses actes et du dommage qu’elle cause. Le même principe vaut dans l’exercice de sa profession.
La notion de « producteur », recouvre toutes les entités assumant la plus grande part de responsabilité, dont le propriétaire de la marque, le fabricant, le franchisé, l’assembleur, le conditionneur, le distributeur, le détaillant ou le premier importateur du produit qui vend, met en vente ou distribue le produit.[5]
L’identification du responsable (qui pourra être le fabricant des produits dangereux ou non) est une chose qui n’est pas toujours facile parce que la notion même de responsabilité est appelée à être revue[6], dans cette optique, nous sommes appelés à analyser la position du législateur marocain dans son traitement de la responsabilité professionnelle du fabricant des produits dangereux (I), et déterminer le cadre institutionnel et procédural dans lequel évolue cette responsabilité(II) ?
Pour faire face aux problèmes écologiques, les législations marocaines se sont constituées progressivement pour répondre aux multiples atteintes et pour assurer la protection de l’environnement. Parmi eux le problème environnemental lié à la pollution industrielle suite à la production des produits dangereux. Face à ce problème environnemental, quels remèdes juridiques offre la législation environnementale afin de déterminer la responsabilité du fabriquant des produits dangereux ?
Plusieurs textes de lois environnementales qui contiennent des dispositions relatives à la responsabilité civile et pénale sont récemment adoptés. Ces lois sont soit à portée générale (I) soit à portée spécifique(II).
- Des lois à portée générale
On entend par loi à portée générale les textes législatifs qui touchent les affaires en relation avec l’environnement sans précision des substances responsables du dommage, dans ce cadre plusieurs lois sont à envisager :
Cette loi, prévoit un cadre explicite à la gestion des produits dangereux, du point de vue transport et stockage. En effet les articles 1er et 2 de la loi n° 11.03 du 12 mai 2003, intègrent au nombre de ses intérêts fondamentaux de la nation comme le montre, l’équilibre de son milieu naturel et de son environnement, au même titre que son indépendance, l’intégrité de son territoire ou sa sécurité.
Ces articles édictent les principes généraux visés par la loi à savoir la protection de l’environnement contre toutes formes de pollution et de dégradation quelle qu’en soit l’origine ; l’amélioration du cadre et les conditions de vie de l’homme ; la définition des orientations de base du cadre législatif, technique, et financier concernant la protection et la gestion de l’environnement ; et surtout mettre en place un régime spécifique de responsabilité garantissant la réparation des dommages causés à l’environnement et l’indemnisation des victimes ».
Dans ce cadre , est responsable, même en cas d’absence de preuve de faute, toute personne physique ou morale stockant, transportant ou utilisant des hydrocarbures ou des substances nocives et dangereuses, ou tout exploitant d’une installation classée, telle que définie par les textes pris en application de la présente loi, ayant causé un dommage corporel ou matériel directement ou indirectement lié à l’exercice des activités susmentionnées.
La personne à qui incombe la réparation dudit préjudice, aux termes de l’article 63, peut demander de limiter sa responsabilité à un montant global par incident. Ce montant est fixé par voie réglementaire.
Si l’incident est causé par la faute de la personne mentionnée à l’article 63, elle n’est pas fondée à se prévaloir de la limitation de responsabilité prévue à l’article 66 ;
Pour bénéficier de la limitation de responsabilité prévue à l’article 64, la personne à qui incombe la réparation du préjudice doit déposer, auprès du tribunal où l’action est engagée, une caution dont le montant égale la limite de sa responsabilité. Cette caution peut être constituée soit par le dépôt d’une somme, soit par la présentation d’une garantie bancaire ou de toute autre garantie admise par la législation en vigueur.
La loi n°24-09 oblige les producteurs de démontrer la conformité de leurs produit aux exigences essentielles de sécurité, a cet effet, les producteurs de produits industriels doivent se conformer scrupuleusement à cette loi en veillant à ne mettre sur le marché marocain que des produits sûrs qui, dans des conditions d’utilisation normales, ne présentent aucun risque pour les utilisateurs ou, dans une moindre mesure, présentent des risques réduits compatibles avec leur utilisation.[7]
Les producteurs doivent évaluer [8]le caractère sûr d’un produit (évaluation de la conformité) en tenant compte des caractéristiques du produit, de l’effet du produit sur d’autres produits, de la présentation du produit, de son étiquetage, des avertissements et des instructions éventuelles concernant son utilisation et son élimination, ainsi que de toute autre indication ou information relative au produit[9]
Les procédures d’évaluation de la conformité se rapportent à la phase de conception des produits, à leur phase de production ou aux deux.
Elles varient en fonction des produits et des risques concernés et peuvent comprendre un simple contrôle interne de la production par le producteur, ou des examens, essais et vérifications effectués par un organisme d’évaluation de la conformité agréé, ainsi que la mise en place de systèmes d’assurance de la qualité [10]
Les produits qui sont soumis à des normes obligatoires ou réglementations particulières doivent respecter les exigences de ces normes ou réglementations, en sus du respect de l’obligation générale de sécurité, ajoute la même source.[11]
Ils sont obligés aussi de soumettre leurs produits à des normes obligatoires ou réglementations particulières, et doivent respecter les exigences de ces normes ou réglementations, en sus du respect de l’obligation générale de sécurité. [12]
Le producteur ou l’importateur d’un produit soumis à une réglementation technique particulière prise en application des dispositions du II de l’article 9 est tenu de constituer un dossier technique comportant ce qui est nécessaire,
Le dossier technique complet doit être conservé et tenu à la disposition de l’administration compétente à la demande de celle- ci pendant une durée d’au moins dix ans à compter de la dernière date de fabrication du produit.[13]
Il est interdit d’apposer sur un produit le marquage prévu par une réglementation technique particulière si le produit n’a pas été soumis à la procédure d’évaluation de la conformité prévue par cette réglementation.[14]
D’autre part, la loi permet aux administrations concernées de fixer les conditions que doivent respecter les produits et services à travers l’établissement d’un système spécifique, de même qu’il fixe les mesures à prendre en cas de présence d’un produit à risque sur le marché pour faire cesser le danger.
Le texte propose, en outre, des dispositions modifiant et complétant le dahir du 9 Ramadan 1331 (12 août 1913) formant code des obligations et des contrats, sur la responsabilité civile du fait des produits défectueux.
Dans ce cadre, le législateur a introduit explicitement la notion de responsabilité du producteur pour tout dommage causé par un défaut de son produit et l’obligation à réparation, en définissant dans ce sens la notion de producteur.
Le producteur ou l’importateur de produits ou le prestataire de services fournit à l’utilisateur les informations utiles qui lui permettent d’évaluer les risques inhérents à un produit telles que l’étiquetage, le marquage, les modes d’emploi.
2.2. Des lois a portée spécifiques
A l’instar des pays en voie de développement, le Maroc, possède sa part dans le marché mondial des produits chimiques à usage industriel et agricole et depuis longtemps, ce pays ne cesse de développer les moyens et les infrastructures nécessaires à la gestion de ces produits.
Parmi ces produits, notre étude se penche sur les pesticides (1) et les produits nucléaires (2) étant donnés
L’intérêt qu’ils présentent pour notre sujet.
2.2.1. La loi 42-95 relative au contrôle et à l’organisation du commerce des pesticides
Les pesticides sont les premiers produits inscrits sur la liste et aux quels les organismes internationaux accordent une attention particulière, à cause de leur utilisations diversifiées et des expositions inévitables directes des ressources naturelles, des Hommes et des animaux à ces produits.
Le Maroc, qui compte aux environ de 30 millions d’habitants dont 50% en milieu rural et dont 80% de la population rurale travaille dans le domaine agricole, secteur principal de l’utilisation des pesticides, possède une assise réglementaire, structurelle et institutionnelle dans le domaine des pesticides. Cette assise développée et améliorée permettra au pays de faire face aux risques et d’asseoir les bases d’une gestion écologique et rationnelle de ces produits et ce conformément aux dispositions intentionnels.
En effet , au Maroc, Les pesticides à usage agricole sont régis par le Dahir du 2 décembre 1922 portant règlement sur l’importation, le commerce, la détention et l’usage des substances vénéneuses, par un Arrêté d’application du 9 septembre 1953, réglementant le commerce des substances et des préparations phytosanitaires et un troisième Arrêté du 15 Juin 1965 portant obligation la déclaration de mise en vente et de distribution des produits pesticides. Les substances vénéneuses sont constituées par celles destinées au commerce, à l’industrie, à l’agriculture et à la médecine humaine et vétérinaire.
Actuellement, cette base juridique ancienne s’avère insuffisante, notamment dans le domaine de la protection de l’environnement, de la santé humaine et animale. De ce fait, une nouvelle loi (n°42-95) relative au contrôle et à l’organisation du commerce des produits pesticides à usage agricole a été promulguée le 15 mai 1997, un Décret n°2-99-106 du 5 mai 1999 relatif à l’homologation des Pesticides à usage agricole et un Décret n°2-99-105 du 5 mai 1999 relatif à l’exercice des activités d’importation, de fabrication et de commercialisation des Pesticides à usage agricole ont été publiés.
Malgré ces efforts, on assiste actuellement à un vide réglementaire dans le domaine de gestion des pesticides utilisés en santé et en hygiène publique (Importation, fabrication, commercialisation, usage, emballage, étiquetage…Etc.). Afin de pallier à ce manque, le Ministère de la Santé élabore un projet de décret qui permettra de réglementer les différents aspects de la gestion de ce type de pesticides. Ce décret sera élaboré en application au Dahir du 2 décembre 1922 portant règlement sur l’importation, le commerce, la détention et l’usage de substances vénéneuses.
2.2.1.1. Homologation des pesticides[15]
La réglementation en vigueur du secteur des pesticides a pour objectif de s’assurer de l’efficacité et de l’utilisation des produits phytosanitaires et assurer la protection de l’homme et de son environnement. A cet effet, la loi n°42-95 définit dans son Article 1, les produits soumis à l’homologation et interdit, dans son Article 2, l’importation, la fabrication, la détention en vue de la vente, la mise en vente ou la distribution des produits pesticides à usage agricoles lorsqu’ils n’ont pas fait l’objet d’une homologation.
2.2.1.2. Distribution et Commercialisation
Sur le plan juridique, la loi n°42-95 précise que l’exercice des activités de fabrication, d’importation, de vente ou de distribution des pesticides est subordonné à un agrément qui n’est délivré qu’aux personnes physiques ou morales répondant aux critères spécifiés dans l’Article 14 de la loi susmentionnée.
A ce sujet, le décret n°2-99-106 du 5 mai 1999 relatif à l’exercice des activités d’importation, de fabrication et de commercialisation de produits pesticides à usage agricole définit les conditions appropriées pour une meilleure organisation des circuits de distribution et de vente des pesticides.
2.2.1.3 Dispositions pénales[16]
Toute importation fabrication, détention en vue de la vente, mise en vente ou distribution même à titre gratuit des produits pesticides à usage agricole, non homologués, non autorisés ou non dispensés d’homologation est punie d’une amende de 10.000 à 30.000 dirhams.
- Sont punis d’une amende de 5.000 à 30.000 dirhams sur toute modification dans la composition ou les caractéristiques physiques, chimiques ou biologiques d’un produit homologué
- Sont punis d’une amende de 5.000 à 20.000 dirhams lorsque les précautions d’emploi, les contre- indications et éventuellement les antidotes ne sont pas indiqués sur les emballages.
- Quiconque procède à la fabrication, à l’importation, à la vente, à la mise en vente, à la distribution même à titre gratuit des produits pesticides à usage agricole mentionnés à l’article premier, sans disposer de l’agrément prévu à l’article 13 de la présente loi, est puni de l’emprisonnement de 3 mois à 2 ans et d’une amende de 10.000 à 40.000 dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement.
- En cas de récidive pour infraction de qualification identique dans un délai de douze mois qui suit la date à laquelle la première décision de condamnation est devenue irrévocable, l’emprisonnement ou les amendes prévus aux articles 16 à20 sont portés au double.
2.2.2 La responsabilité dans la gestion des déchets nucléaire :
La problématique des déchets industriels est encore très critique. En effet, en absence de décharges contrôlées spécifiques et de filières écologiques de valorisation et d’élimination, les déchets industriels sont généralement déposés dans les décharges municipales au même titre que les ordures ménagères,
L’analyse du cadre réglementaire actuel montre qu’il existe un nombre important de textes et de dispositions qui se rapportent directement ou indirectement aux déchets.
Toutefois, ces dispositions, dont la plupart ont été adoptées du temps du protectorat, sont éparses et ne présentent qu’un caractère général et, par conséquent, ne sont plus adaptées au contexte économique et social actuel.
Pour pallier à ces insuffisances, les pouvoirs publics au Maroc ont adopté en 2003 plusieurs textes généraux de protection de l’environnement, la réglementation marocaine s’est étoffée de la loi 28-00 relative à la gestion des déchets et leur élimination promulguée en 2006, et du Décret portant classification des déchets et fixant la liste des déchets dangereux élaboré par le Département de l’Environnement et adopté par le Conseil du Gouvernement en 2008.
La loi n ° 28-00 relative à la gestion des déchets et à leur élimination a été promulguée par le Dahir N ° 1- 06-153 du 30 chaoual 1427 (B.O. n ° 5480 du 7 décembre 2006). Cette loi définit les différents types de déchets et prévoit l’obligation de réduction de ces déchets à la source, l’utilisation des matières premières biodégradables et la prise en charge des produits durant toute la chaîne de production et d’utilisation.
2.2.3. La loi 12-02 relative à la responsabilité civile dans les préjudices nucléaires :
Cette législation est destinée à garantir les dédommagements civils en cas de préjudices qui pourraient naître de l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, conformément aux principes et critères prévus par la convention de Vienne sur la responsabilité civile en matière de préjudices nucléaires, signée par le Maroc en 1984, et au protocole amendé de cette convention signé en 1997.
Ce dispositif juridique repose sur quatre principes essentiels, à savoir la responsabilité objective imputée à la partie exploitant l’une des entreprises nucléaires, la détermination du montant d’indemnisation pour les personnes victimes d’un accident nucléaire. L’engagement de la partie exploitante de contracter une assurance ou toute autre garantie matérielle couvrant sa responsabilité, et la garantie de paiement par l’Etat des dédommagements des préjudices nucléaires supérieurs à la garantie de la partie exploitante.
2.2.3.1 La responsabilité civile de l’exploitant d’une installation nucléaire et sa couverture :
L’exploitant d’une installation nucléaire est le seul responsable d’un dommage nucléaire. Soit causé par un accident nucléaire survenu dans cette installation nucléaire. Ou causé par un accident nucléaire mettant en jeu une matière nucléaire qui provient de cette installation.[17] Lorsqu’un dommage nucléaire engage la responsabilité de plusieurs exploitants d’installation nucléaire, et s’il n’est pas possible de déterminer avec certitude quelle est la part du dommage attribuable à chacun d’eux, ils en sont conjointement et solidairement responsables, chacun d’eux à concurrence du montant de leur responsabilité tel que prévu à l’article 22 de la présente loi.[18]
Lorsqu’un dommage nucléaire et un dommage non nucléaire sont causés par un accident nucléaire ou conjointement par un accident nucléaire et un ou plusieurs autres événements, cet autre dommage non nucléaire, dans la mesure où on ne peut le séparer avec certitude du dommage nucléaire, est considéré comme un dommage nucléaire causé par l’accident nucléaire.[19] L’exploitant d’une installation nucléaire est tenu d’avoir et de maintenir une assurance ou une autre garantie financière à concurrence, par accident, du montant de sa responsabilité civile. Pour des dommages nucléaires causés par un seul et même accident nucléaire Le montant de la responsabilité civile de l’exploitant d’une installation nucléaire, est fixé à cent millions de DTS.[20]
Lorsque le montant de l’assurance ou de la garantie financière de l’exploitant est insuffisant pour satisfaire la réparation de l’ensemble des dommages nucléaires, l’Etat assure le paiement du complément nécessaire sans que le total de ce complément ne puisse excéder le montant de la responsabilité civile applicable à l’exploitant.[21]
Le paiement de la réparation des dommages nucléaires causés par un accident nucléaire s’effectuera dans l’ordre de priorité suivant :
- a) premièrement, tout décès ou tout dommage aux personnes ;
- b) deuxièmement, toute perte de biens ou tout dommage aux biens sera indemnisé une fois que les demandes portant sur les dommages visés au a) ci-dessus auront été satisfaites[22].2.3.2. Dispositions pénales
S’il est constaté par procès-verbal que l’exploitant ou le transporteur ne peut fournir la justification de l’assurance ou de la garantie financière l’administration pourra suspendre le fonctionnement de l’installation ou l’exécution du transport jusqu’à production de la justification exigée.[23]
Sera puni d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 10.000 à 1.000.000 dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement, quiconque ne respectera pas l’obligation d’avoir et de maintenir une assurance ou une autre garantie financière conformément aux dispositions de l’article 19.[24]
En cas de récidive le maximum de ces peines est porté au double.
Les procédures d’application effective des textes législatifs font souvent défaut ou quand elles existent, ne couvrent pas toutes les étapes du cycle de vie de ces produits.
Il y a lieu également de noter l’insuffisance de la législation notamment dans les domaines de la prévention des risques, de la protection des consommateurs et des travailleurs contre les produits toxiques, de l’utilisation et de la commercialisation des produits destinés à l’hygiène publique ainsi que la réglementation relative à la maîtrise de l’urbanisation autour des installations industrielles à risque.
Les mesures de police ont des sources éclatées : code pénal, infractions définies et sanctionnées par les textes sectoriels, Dahir des Obligations et Contrats, dahir portant procédure civile et dahir portant procédure pénale.
Les sanctions se caractérisent par leur inadéquation et leur incapacité à protéger l’environnement.
Des questions restent posées en la matière : éléments constitutifs de l’infraction ; la mise en œuvre de la responsabilité, la question relative aux personnes pouvant faire l’objet de poursuites et la nature des sanctions.
3 LE CADRE INSTITUTIONNEL ET PROCEDURAL DE RESPONSABILITE PROFESSIONNELLE DU FABRICANT DES PRODUITS DANGEREUX
Le carde législatif de la responsabilité du fabricant des produit dangereux ne peux êtres efficace qu’avec des instances compétentes pour pouvoir l’appliquer (I) et des juridictions (II) pour pouvoir trancher et dresser les sanctions adéquat(III).
- Les institutions compétentes
Le législateur marocain a fixé la liste des agents qui sont chargés de la constatation des infractions aux dispositions des différentes lois environnementales[25], ces agents sont les officiers de la police judiciaire, les fonctionnaires et agents délégués à cet effet par l’administration compétente, les fonctionnaires des collectivités locales délégués par les présidents des conseils communaux ainsi que les personnes assermentées conformément à la législation relative à la prestation du serment auquel sont soumis les agents verbalisateurs et tout expert ou personne morale chargée, à titre exceptionnel, de cette mission par l’administration.
Les lois environnementales ont également précisé la procédure selon laquelle Les personnes chargées de constater les infractions dressent des procès-verbaux qui déterminent, notamment, les circonstances et la nature de l’infraction ainsi que les explications du contrevenant.
La loi 24-09 désigne par le biais de son projet de décret d’application le Ministère chargé du commerce et de l’industrie pour assurer la mise en œuvre des dispositions de la loi en application de son article 33 ainsi que les missions à accomplir dans ce cadre.
Ainsi le ministère peut adresser aux producteurs, importateurs ou prestataires de service des mises en garde et leur demander de mettre les produits ou services qu’ils mettent à disposition sur le marché en conformité avec les exigences de sécurité et les soumettre ensuite au contrôle et à leurs frais, dans un délai déterminé par voie réglementaire d’un organisme d’évaluation de la conformité agréé.
Le procureur du Roi, au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis, peut ordonner la saisie des produits non conformes ainsi que de toute chose, appareil ou moyen de transport ayant aidé à l’exécution de l’infraction[26] .
Des mesures similaires sont aussi apportée par la Loi 28-00 qui stipule qu’en cas de danger ou de menace imminents pour la santé de l’homme et l’environnement, l’administration a le droit d’ordonner aux exploitants des installations et aux personnes concernées de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour remédier et atténuer ce danger.
Si les intéressés n’obtempèrent pas, ladite autorité peut exécuter d’office, à leurs frais, les mesures nécessaires ou suspendre tout ou partie de l’activité menaçant la santé de l’homme et l’environnement.[27]
- Les juridictions compétentes
Les tribunaux de première instance sont compétents soit en premier et dernier ressort, soit à charge d’appel, dans les conditions déterminées par les codes de procédure civile et pénale, et, le cas échéant, par des textes particuliers.
En matière civile, les tribunaux de première instance statuent en premier et dernier ressorts lorsque le montant du litige est égal ou inférieur à 3000 dirhams.
En matière pénale, les tribunaux de première instance sont compétents pour juger les contraventions et les délits. En revanche, les crimes relèvent de la compétence de la Cour d’appel.
Toutefois il se peut que la loi attribue formellement compétence à une juridiction bien déterminée, comme c’est le cas du tribunal de première instance de Rabat qui est seul compétent pour connaître des actions en réparation d’un dommage nucléaire dû à un accident nucléaire qui s’est produit sur le territoire national ou dans les limites de sa zone économique exclusive et qui sont intentées conformément aux dispositions de la loi 12 -02 relative à la responsabilité civile dans les préjudices nucléaires.
Si en application de la convention de Vienne, compétence est attribuée à un tribunal marocain, le tribunal de première instance de Rabat est seul compétent.[28]
Aussi la loi 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme stipule que : Nonobstant les règles de compétence prévues par le code de procédure pénale ou par d’autres textes, la Cour d’appel de Rabat est compétente pour les poursuites, l’instruction et le jugement des actes constituant des infractions de terrorisme[29].
Ladite juridiction peut, pour des motifs de sécurité publique et exceptionnellement, tenir ses audiences dans les sièges d’une autre juridiction.
L’étude de ces infractions nécessite l’examen des éléments constitutifs de l’infraction environnementale, et en particulier les éléments légaux et moraux.
Conformément au principe de légalité des délits et des peines, prévu par l’article 3 du code pénal[30] , le droit de l’environnement -qui est encore en pleine croissance au Maroc-, est constitué par un ensemble de lois et de règlements. Mais si la détermination des sanctions et la décision de pénaliser un comportement relève de la loi, conformément aux dispositions de l’article 3 du code pénal ; quid des manquements aux violations des obligations qui ne résultent pas de la loi ?! Peut-on, ou doit-on, les considérer comme des infractions, ou non ?!
Le Conseil Constitutionnel français a répondu en 1982 par l’affirmative à cette problématique dans sa décision du 10 novembre 1982. Mais si la question n’a pas encore été soulevée jusqu’ici devant les juridictions marocaines ; il y a lieu de penser qu’elle ne saurait tarder ! Parce qu’en matière d’environnement, l’incrimination par renvoi est la règle ; et la définition d’infractions autonomes ; – c’est-à-dire dont les éléments constitutifs sont déterminés par une seule disposition- est l’exception.
En outre, le droit pénal marocain de l’environnement, est à la fois intégré dans le code pénal, Qui est en voie de réactualisation pour prendre en compte, notamment la gestion de l’eau et des déchets. Deux types de difficultés sont à noter : la dispersion et l’arabisation des lois. Les infractions sont classées en trois catégories : crimes, délits et contraventions. Le renforcement des capacités des magistrats et la coopération régionale sont des domaines d’action prioritaires.
Et les textes environnementaux, qui furent récemment adoptés, et qui contiennent des dispositions, répressives, qui sont tantôt dissuasives, tantôt extrêmement sévères, car, ils peuvent aller jusqu’à la peine de mort.[31]
Quant au code pénal réformé et complété par la loi de 2003, il prévoit dans le chapitre 1er bis du livre III consacré au « terrorisme » [32]ce qui suit : « constitue également un acte de terrorisme, au sens du premier alinéa de l’article 218-1 ci-dessus, le fait d’introduire ou de mettre dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance qui met en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel. Les faits prévus au premier alinéa ci-dessus sont punis de dix à vingt ans de réclusion. La peine est la réclusion à perpétuité, lorsque les faits ont entraîné une mutilation, amputation ou privation de l’usage d’un membre, cécité, perte d’un œil, ou toutes autres infirmités permanentes pour une ou plusieurs personnes.
Le coupable est puni de mort lorsque les faits ont entraîné la mort d’une ou de plusieurs personnes ».Ce chapitre relatif à la loi n° 03.03 du 5 juin 2003, concernant « la lutte contre le terrorisme » a été intégré au code pénal dans sa dernière réforme. On peut dire que le législateur n’a accordé au droit de l’environnement, au sein du code pénal réformé et complété, qu’une place très réduite.
Ainsi, il n’a pas crée un délit unique de pollution du milieu naturel, pour éviter vraisemblablement que par sa généralité, il pénalise toutes les activités industrielles, ce qui ne serait pas non plus conforme à l’exigence de prévisibilité de la loi pénale. La seule infraction écologique majeure qui a été insérée récemment par la loi n° 03.03 relative à la lutte contre le terrorisme est de nature criminelle. Il s’agit du terrorisme écologique, défini par l’article 218-3, comme « le fait d’introduire ou de mettre dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol ou dans les eaux, y compris celles de la mer territoriale, une substance qui met en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel » ; lorsque cette atteinte est intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but l’atteinte grave à l’ordre public par l’intimidation, la terreur ou la violence ; Les faits prévus au premier alinéa ci-dessus sont punis de dix à vingt ans de réclusion ; La peine est la réclusion à perpétuité, lorsque les faits ont entrainé une mutilation amputation, ou privation de l’usage d’un membre, cécité, perte d’un œil ou toutes autres infirmités permanentes pour une ou plusieurs personnes. Le coupable est puni de mort lorsque les faits ont entraîné la mort d’un ou de plusieurs personnes ».
On peut donc en déduire de ce qui précède que le droit pénal de l’environnement qui est encore à ses balbutiements, se présente non seulement comme un droit relativement complexe, -les textes qui le composent sont éparpillés- mais aussi évolutif, puisqu’il doit s’adapter continuellement à l’évolution des connaissances scientifiques et techniques. Mais quid de l’élément moral de l’infraction environnementale ?
Tous les systèmes juridiques distinguent la faute intentionnelle (généralement connue sous le nom de dol) et la faute non intentionnelle. La première est la conscience et la volonté d’accomplir un acte prohibé par la loi pénale.
La seconde, est une imprudence, une négligence, ou plus gravement, un comportement insouciant adopté par un individu en connaissance de la très forte probabilité de provoquer un dommage. En matière de délits, la responsabilité pénale suppose en principe une intention dolosive, sauf dans les cas où la loi se contente expressément d’une imprudence ; (cf. les articles 132 et 133 du code pénal marocain).
Si l’élément moral ne peut, en principe être présumé, le code pénal marocain prévoit dans l’article 133.3 la solution inverse à l’égard des contraventions. Cet article stipule que « … les contraventions sont punissables même lorsqu’elles ont été commises par imprudence, exception faite des cas où la loi exige expressément l’intention de nuire ». Cependant, il y a lieu de distinguer la faute intentionnelle et la faute non-intentionnelle.
S’agissant de la faute intentionnelle, les prescriptions de police administrative dont l’inobservation constitue la plupart des infractions environnementales n’ont pas de résonnance morale. Ceux qui la transgressent ne sont animés d’aucune volonté maligne contre l’ordre social. Ils se bornent à exercer leurs activités dans les conditions les plus simples et les moins onéreuses pour eux.
A l’égard des règles de discipline collective, la connaissance des prescriptions violées et la volonté de transgression, forment un seul ensemble. La première étant présumée ; la seconde est nécessairement acquise.
Il doit toutefois être établi que le prévenu savait qu’il se trouvait dans une situation matérielle soumise à certaines règles pénalement sanctionnées. Quant à la faute non-intentionnelle, elle est caractérisée par la négligence qui peut être consciente (l’agent a envisagé le résultat mais n’a pas pris toutes les précautions pour prévenir sa survenance) ou inconsciente (l’agent ne s’est pas avisé du risque existant, alors qu’il aurait pu le prévoir en étant plus attentif).
Tous les systèmes juridiques –dont notamment le système marocain-, admettent que ces deux sortes de négligence doivent être incriminées ; ce qui exclut d’admettre l’erreur de fait, comme cause d’impunité en matière d’infractions non intentionnelles. C’est ainsi qu’un chasseur ne peut faire échec aux poursuites du chef de destruction d’un animal appartenant à une espèce protégée, en alléguant la confusion avec un gibier dont la chasse est licite : « Il lui appartient de ne tirer qu’après avoir identifié la cible avec certitude[33]… ».
A ces règles, s’ajoutent les contraventions relatives à la voirie et à l’hygiène publique, prévues par les alinéas 27 à 33 de l’article 609 du code pénal marocain. Mais pour que les infractions environnementales soient sanctionnées, encore faut-il que l’action publique soit mise en œuvre.
Nous examinerons d’un côté la mise en œuvre de l’action publique (1) de l’autre les sanctions et la réparation(2).
C’est le Ministère public, qui a en principe, le droit de mettre en œuvre l’action publique ; car d’autres personnes et en particulier certains fonctionnaires, expressément désignés par la loi disposent également de cette prérogative. Il en est ainsi, par exemple, dans le domaine de la police de l’eau douce, des ingénieurs et garde-forestiers des eaux et forêts, des agents de la chasse et de la faune.
Mais la victime dispose aussi, de ce droit, qu’elle peut exercer soit en citant directement l’auteur présumé de l’infraction devant le tribunal correctionnel ; soit en se constituant partie civile devant le juge compétent.
Lorsque l’infraction est commise à l’occasion d’une activité collective, qu’elle soit publique ou privée, la jurisprudence est amenée à retenir la responsabilité du dirigeant, ou du responsable, à qui il incombe de faire respecter la réglementation ; même si les faits ont été commis par un préposé placé sous sa garde et son autorité ;
Quant aux personnes morales, conformément aux dispositions du code pénal[34], « les personnes morales ne peuvent être condamnées qu’à des peines pécuniaires, et aux peines accessoires[35] Elles peuvent également être soumises aux mesures de sûreté réelle de l’article 62 »
3.4.2. Les sanctions et la réparation
Les sanctions applicables aux personnes physiques ; Le tribunal compétent a la possibilité de prononcer conformément aux dispositions des articles 15 et 16 du code pénal, les peines ordinaires traditionnelles prévues en matières criminelle et délictuelle et qui sont l’emprisonnement et/ou l’amende ; Etant précisé que l’article 218-3 du code pénal précité prévoit la peine de mort ; ou bien soit la réclusion à perpétuité, soit de dix à vingt ans selon les cas.
Le montant de l’amende peut être parfois très élevé, et susceptible de remplir ainsi une fonction dissuasive ;
En matière de pollution de l’air, une amende de 200 000 dirhams en plus d’un emprisonnement d’un an, est prévue par les articles 19 et 20 de la loi n° 13.03 du 12 mai 2003 relative à la lutte contre la pollution de l’air.
Mais ce sont surtout les peines complémentaires qui sont les plus adaptées à la délinquance écologique.
Celles-ci, pour être prononcées, doivent être visées expressément par le texte d’incrimination.
Elles sont composées notamment d’interdictions professionnelles ; de mesures de confiscation, et de publication du jugement.
En outre, la remise en état des lieux dégradés, des sites, et des déchets, peut être prononcée avec injonction d’une obligation de faire, sous astreinte.
3.4.2.2. La réparation des dommages
L’infraction environnementale pourrait être la cause d’un préjudice subi par, soit des personnes, soit leurs biens. Si le préjudice est direct personnel et certain, sa réparation ne doit pas soulever en principe de difficultés particulières.
Il en va tout autrement, lorsque le dommage a été subi par le milieu naturel (l’eau, le sol, la faune, l’air…) qui ne relève pas d’un patrimoine déterminé. La réparation dans ce cas ne semble pas chose aisée, à cause des règles classiques de la responsabilité civile[36].
Les jugements prononcés par le tribunal de Grande Instance de Narbonne du 4 octobre 2007, et le tribunal correctionnel de Paris du 16 janvier 2008, qui a admis la réparation du préjudice, “résultant de l’atteinte causé à l’environnement ” ; à propos de la pollution marine créée par l’Erika, sont susceptibles de faire évoluer l’état du droit, dans ce domaine, et influencer par conséquence, de manière positive, la jurisprudence marocaine.
L’institution de la responsabilité est centrale en droit de l’environnement, mais malgré son cheminement qui parait favorable à l’environnement ne peut à lui seul résoudre tous les problèmes posés par la responsabilité environnementale. Fondé ou non sur la faute, le système se heurte au risque d’insolvabilité du responsable désigné et qui doit être payeur parce qu’il est pollueur, de plus l’objectif préventif de la responsabilité nécessite un deuxième corollaire qui consiste dans la mise à disposition des plaideurs, de certains dispositifs procéduraux susceptibles de prévenir des actes préjudiciables aux milieux naturels.
Aussi la question de la réparation du préjudice écologique sur le terrain de la responsabilité civile montre à la fois la valeur d’un système basé sur la sanction d’un comportement illicite et des limites.
Il devient significatif de constater que l’on passe de la responsabilité individuelle pour arriver à la collectivisation du risque. Dés lors la responsabilité-participation pourra transformer chacun en défenseur de l’environnement et des générations futures.
Dans cette perspective, le droit fondamental à l’environnement doit se comprendre comme le privilège de concourir à sa défense, c’est un droit fonction.
Le prolongement de ce droit fonction, consiste alors dans la connaissance aux citoyens de droits procéduraux d’information, de participation et de recours qui donne corps à leur responsabilité écologique et prolonge la traditionnelle démocratie participative qui les engage bien au delà de la simple expression épisodique d’un suffrage.
[1] L’agence Standard&Poor’s a relevé la note à long terme du Maroc de “BB+” à “BBB-” en devise et de “BBB” à “BBB+” en monnaie locale. La perspective associée à cette note est “Stable”. Le royaume devient ainsi le 15 ème pays qui accédé à l’Investment Grade. Une décision déjà prise par Fitch Ratings en 2007 et confirmée en octobre 2009.
[2] Dahir n° 1-11-140 du 16 ramadan 1432 (17 août 2011) portant promulgation de la loi n° 24-09 relative à la sécurité des produits et des services et complétant le dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913) formant code des obligations et des contrats, BO N° 5984- 8 Kaada 1432 (6-10-2011).
[3] Ibid.
[4] L’OMS estime que, chaque année, plus de 2 millions de personnes meurent du fait de l’inhalation de particules fines présentes dans l’air intérieur et extérieur. Les particules PM10, d’une taille égale ou inférieure à 10 micromètres, peuvent pénétrer dans les poumons, entrer dans la circulation sanguine et provoquer des cardiopathies, des cancers du poumon, des cas d’asthme et des infections des voies respiratoires inférieures.
[5] Article 3 de la loi n° 24-09
[6] Ahmed Gourari, la responsabilité en matière de dommage écologique, Revue de droit et d’économie, N°23 Décembre 2007.
[7] Article 4 de la loi n°24-09
[8] Article 4 de la loi n°24-09
[9] Art 31 de la loi n°24-09
[10] Art 15 de la même loi
[11] Art. 13
[12] Art.11
[13] Art. 16
[14] Art. 18 de la loi n°24-09
[15] Art 01.02 ,03 de La loi 42-95 relative au contrôle et à l’organisation du commerce des pesticides
[16] 16,17,18,20 de la même loi
[17] Art 3,4, 5 de la 12-02 relative a la responsabilité civile dans les préjudices nucléaires
[18] Art 8 de la même loi
[19] Art 12
[20] Art 19,22
[21] Art 23
[22] Art 32
[23] Art 34
[24] Art 35
[25] Les lois 11-03, 28-00 et 24-09
[26] Article 44 de la loi n° 24-09 relative à la sécurité des produits et services
[27] Article 65 de la loi n° 28-00 relative a la gestion des déchets et leur élimination
[28] Article 33 de la loi 12-02
[29] Article 7 de la loi n° 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme
[30] « Nul ne peut être condamné pour un fait qui n’est pas expressément prévu comme infraction par la loi, ni puni de peines que la loi n’a pas édictées »
[31] N° 10-95 du 16 août 1995 sur « l’eau » dont son chapitre XIII traite de « la police des eaux » ;
N° 11-03 du 12 mai 2003, relative « à la protection et à la mise en valeur de l’environnement », dont les sections III et IV prévoient un certain nombre de mesures répressives dans les articles 76 à 79 ; auxquelles s’ajoutent les dispositions qui régissent la remise en état de l’environnement.
N° 12-03 du 12 mai 2003, relative « aux études d’impact sur l’environnement », qui consacre tout son chapitre IV, à la constatation des infractions et au droit d’ester en justice.
N° 13-03 du 12 mai 2003, concernant « la lutte contre la pollution de l’air ». Son chapitre V, composé de 09 articles traité des “procédures et sanctions ».
Et n° 28-00 relative à « la gestion des déchets et à leur élimination », qui consacre son titre VIII, au « contrôle, infractions et sanctions ».
[32] L’article 218-3 de la loi 03-03
[33] Jugement de la chambre criminelle de la Cour de Cassation de France, dans un arrêt en date du 18 septembre 1997.
[34] Article 127 du code pénal
[35] Prévues par les alinéas 5, 6 et 7 de l’article 36.
[36] Cf. les articles 77 et suivants du dahir des obligations du contrat D.O.C marocain équivalent au code civil.