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?Management Public et Management Privé, Quelle Comparaison

Management Public et  Management Privé, Quelle Comparaison ?

Article réalisé par :

 

– Mr Mohamed CHAOUI,

Doctorant  au centre des études doctorales

Université Mohamed V- Rabat-MAROC

– Mlle. Amina BOUTAKBOUT,

Doctorante au centre des études doctorales

Université Ibn Zohr –Agadir- MAROC

Les années 90 marquent indéniablement l’émergence des nouveaux modes de mangement public dans l’administration marocaine, ayant comme objectif l’accompagnement  de l’économie nationale au lendemain des programmes d’ajustement structurels mises en œuvre en 1983. Cette émergence n’a pas cessé de se développer davantage et elle s’explique par des facteurs exogènes à l’économie et à l’environnement national tel que la mondialisation, crises économiques internationales, forte connexion des économies, expliquée par l’ouverture des marchés et la perméabilité des frontières géographiques…..Pour les facteurs endogènes, ils se caractérisent par la montée en puissance du pouvoir des élus locaux et de la société civile, l’approbation de la réforme de l’administration publique, le rapprochement des logiques de gestion entre le secteur public et privé. L’influence de ce dernier se fait sentir au niveau des principes de gestion (gestion axée sur les résultats, cercles de la qualité, intégration des concepts de performance, d’efficacité et d’efficience), et au niveau des innovations managerielles adoptées par le secteur public (l’introduction progressive d’outils de contrôle dans l’administration : comptabilité analytique, calcul des coûts complets et partiels…….) ; et ceci quelque soit la nature de l’organisation publique : collectivité locale, département ministériel, établissement public….Ce jaillissement des nouveaux modes de management s’explique par une quête continue de l’amélioration des prestations du service public par les hauts responsables publics suite aux évolutions perpétuelles de l’environnement interne et externe.

1- Le cadre et le champ d’action des organisations publiques.

Paradoxalement au secteur privé, l’administration publique évolue dans un cadre juridique et réglementaire rigide et strict, décrivant les missions, les moyens mises à sa disposition et la manière de leur répartition. Le choix de sa structure organisationnelle et fonctionnelle ainsi que son positionnement dans la carte administrative (lien et hiérarchie)  sont eux aussi définis par les lois et les règlements en vigueur. La coopération et la coordination avec d’autres établissements quelque soit leur nature, ne sont pas à l’abri du champ juridique qui légitime la raison d’être de cette administration. Il faut souligner, que le cadre réglementaire impacte largement la culture interne et le comportement des managers publics, dans la mesure où la règle de droit contraigne d’une manière répétitive la décision et l’opportunité de l’acte administratif, qui va parfois à l’encontre de l’atteinte des objectifs fixés. Cette situation affaibli significativement la fonction de planification et ses conditions d’exercice dans le secteur public, vu que l’action publique se focalise sur la planification des ressources plutôt que les aboutissements[1]. Ajoutant à ça, le châssis réglementaire des tâches et des responsabilités qui rigidifie le climat de coopération interne au détriment des initiatives, des innovations et de la prise des risques. Une autre variable s’ajoute pour limiter le périmètre stratégique de la décision publique, celle-ci est due au fait que les décisions de ces organisations s’inscrivent dans un cadre global de politiques publiques définies au niveau nation, et exprimées à travers la vocation du gouvernement. Les actions des organisations publiques ne sont qu’une pièce d’un puzzle des actions gouvernementales. De même l’obligation de coopération et de communication entre les différents départements ministériels réduit d’une manière remarquable l’autonomie stratégique de ces départements[2].

2- L’environnement concurrentiel du secteur public.

  1. Porter affirme que « Toute firme, dès lors qu’elle œuvre dans un secteur concurrentiel, a une stratégie explicite et implicite face à ses concurrents ». Etant donné, que la concurrence présente un véritable facteur de motivation ou de contrainte, elle conduit alors la firme à élire un comportement stratégique approprié à son environnement. En général, les organisations publiques œuvrent dans un environnement stable, et le plus souvent elles détiennent une situation de monopole. D’où, la mise en place de toute action ou stratégie de développement sera immotivée et inexpliquée. Autrement dit, il existe une panoplie de facteurs déterminants[3] qui modifient d’une manière décisive les relations que ces organisations publiques entretiennent avec le marché. Même s’il existe un grand fossé entre les deux sphères de management public et privé, ce dernier reste fortement présent dans la gestion du secteur public et ce dans plusieurs domaines tel que : La conduite et la réalisation des projets publics, l’approvisionnement du secteur public (matières premières, formation du personnel, réalisation des études…)

L’action stratégique du secteur public convoite à asseoir son pouvoir et sa légitimité à travers la consolidation et le renforcement de ses missions et ses budgets[4].

3- L’influence dominante de l’environnement sur l’action du secteur public.

Le degré croissant d’ouverture de l’administration publique sur son environnement suppose et implique une visibilité, clarté et transparence, sur une grande échelle, de ses actions. Cette situation a deux retombées majeures sur la décision  publique. Premièrement, les politiques et stratégies publiques se présentent comme un produit d’un processus de négociations acharnées entre les différentes parties politiques. Deuxièmement ces politiques seront d’autant plus délicates et remises en cause avec l’apparition de nouveaux acteurs ou le changement des coalitions politiques. A cet effet, les décideurs publics, sont amenés à créer des coalitions internes pour soutenir l’application de leurs programmes politiques.

4- La différence de conception entre performance publique et performance privée.

L’organisation publique ne peut prétendre définir l’efficacité de son acte en fonction de critères simples mesurables et partagés, comme c’est le cas pour le secteur privé. Ces critères orientés par une vision marchande « offrir un service marchand » seraient incompatibles avec la mission d’origine du secteur public. La performance privée se définit par le profit réalisé à partir d’un marché donné. Le contrôle devient de plus en plus complexe et diffus, en cas d’absence d’un marché ciblé. Pour mieux visualiser cette complexité, il est important de traiter les deux dimensions qui définissent la performance, à savoir l’efficience et l’efficacité.

Le problème majeur qui se pose dans la mesure de l’efficience du secteur public, est celui de l’identification des coûts de production des biens et services. En effet, le calcul des coûts est justifié souvent par la maitrise et le contrôle de ceux-ci. Ce qui n’est pas le cas, dans la gestion des deniers publics, car la situation de monopole que détient le secteur public dans la plupart des cas empêche toute comparaison d’efficience. En plus, l’évaluation des outputs du service public connaît des difficultés importantes, vu les obstacles rencontrés lors la mise en place des procédures d’optimisation des allocations des ressources.

Néanmoins, le volet opérationnel du secteur public est similaire à celui du privé, c’est le cas par exemple de la mise en œuvre des programmes budgétisés de l’année. Cet à cet rang, que l’introduction de techniques managériales privées peut se faire dans le secteur public, et ceci malgré les difficultés avancées précédemment.

Le concept d’efficacité ou de performance externe du secteur public converge directement vers la notion d’évaluation de l’action publique. En général, l’évaluation des politiques publiques peut prendre deux dimensions. La première relative à l’évaluation quantitative et objective, elle vise à évaluer et mesurer les effets et les impacts d’une telle politique. La deuxième dimension concerne l’évaluation qualitative et subjective, elle concerne l’évaluation et le jugement de l’opportunité de la politique, en comparant les résultats obtenus avec les objectifs établis dans la phase de planification pour en mesurer les écarts, et ce pour prévoir les actions de corrections et les modifications à apporter. Néanmoins, l’évaluation des stratégies dans le secteur public reste handicaper par le manque d’indicateurs et d’outils de mesure permettant  d’évaluer objectivement les aboutissements. En effet, les décideurs publics prennent des engagements le plus souvent à court terme, l’intervalle qui correspond à leur mandat politique, ce qui reste beaucoup éloigner avec le concept de la planification stratégique des plans et des politiques sectorielles, qui prennent des années et des années pour donner les résultats escomptés. Dans l’univers de l’administration publique la performance devient une fonction à plusieurs variables, dont la définition dépend largement de ceux qui sont amenés à la mise en place de ces politiques et le plus souvent de les évaluer eux-mêmes. D’où le concept de performance devient de plus en plus subjectif, suite à des changements de valeurs, des modifications de vision, rendant difficile l’application des techniques et des procédures manageriels, eux aussi sont bâtis sur une logique d’atteinte d’objectifs légitimement adaptés. Il faut reconnaître que l’absence d’indicateurs, unanimement acceptés, revient à la différence conceptuelle entre deux notions efficacité et impact d’une politique publique. Pour bien cerner ce problème, il faut cependant recourir à une autre analyse des politiques publiques, basée sur la perception et la vision de la population relative à l’impact d’une telle politique ou stratégie.  Le contrôle des organisations publiques sera d’autant plus difficile que les retombées et les impacts escomptés visent le long terme à travers une modification des structures sociales et des comportements.

L’évaluation de la performance des politiques et des stratégies des organisations publiques nécessite donc des bilans qualitatifs basés sur la perception  des populations concernées et de groupes d’experts. Ici se pose alors le problème de la compétence de l’évaluateur ainsi que celui de son indépendance.

 

5- La direction politique du secteur public.

La décision au niveau du secteur public reste fortement liée aux instances politiques, ce qui influence sur plusieurs niveaux le système de management des organisations publiques. Pour le secteur privé, les contraintes de temps sont déterminées par les opportunités et les aléas relatifs au marché, ces mêmes contraintes sont liées aux échéances électorales et à la réglementation juridique et ce pour le secteur public. Dit en d’autres termes, dans le secteur public, la rationalité politique prône au détriment de la rationalité économique, car la contrainte du cycle électorale oblige les décideurs publics à envisager des politiques qui produiront des résultats le plus tôt possible, pour ne pas faire bénéficier son successeur des résultats positifs de son plan. Cette opinion reste valable pour les managers publics, qui disposent qu’un laps de temps bien déterminé pour mettre en exergue les stratégies organisationnelles, tout en prenant en considération les structures organisationnelles et fonctionnelles qui rigidifient leur champ de manœuvre. Ainsi, les décideurs politiques publics, appliquent la stratégie « de remise en cause » des choix et des plans de leurs prédécesseurs afin de marquer la différence avec l’ancien régime politique et l’idéologie qu’ils représentent. Une autre caractéristique de la direction publique, est la distinction entre les responsables qui définissent les politiques et ceux qui les mettent en œuvre[5]. La réalisation des aspirations des hautes autorités nationales demande une forte concertation et coordination entre ces deux niveaux, et ce pour assurer un développement durable et équilibré.

[1] : Payette, 1994.

[2] : Par exemple les politiques d’aménagement urbain des collectivités locales sont largement limitées par les orientations et directives centrales de la D.A.T.A.R, ces dernières visent un objectif de développement économique et social équitable sur l’intégrité du territoire national.

[3] : Les situations de monopoles dont bénéficient les organisations publiques, le processus politique de répartition des dotations budgétaires…………

[4] : Budget de fonctionnement et d’investissement.

[5] : Séparation des pouvoirs entre le pouvoir législatif (pouvoir politique) et le pouvoir exécutif (administration).

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