Le motif légitime du licenciement économique

 

Le motif légitime du licenciement économique

Hedda Monir[1]

 

Plan:

Introduction

  • I. L’appréciation du caractère réel et sérieux de la situation économique invoquée par l’employeur.
  1. La crise économique
  2. Les difficultés économiques

1.Critères indéfinis de la notion de difficultés économiques avant la loi du 8 août 2016

  1. Critères définis de la notion de difficultés économiques par la loi du 8 août 2016
  2. La cessation d’activité de l’entreprise
  3. La réorganisation de l’entreprise
  4. La réorganisation technologique
  5. La réorganisation destinée à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise

 

  1. L’appréciation du caractère réel et sérieux du lien causal entre la situation économique invoquée et l’effet sur l’emploi.

 

 

 

             

 

 

 

 

 

 

 

  1. La protection de l’emploi des salariés constitue un objectif fondamental du droit du travail au même titre que celui relatif à la protection de leur santé et sécurité sur les lieux du travail. Le risque de perte d’emploi avec toutes les conséquences sociales qui en résultent explique l’existence d’un régime juridique protecteur des salariés dont la finalité est l’interdiction des ruptures abusives de la relation de travail. Le droit du licenciement économique présente une composante essentielle de ce régime[2] dans la mesure où les règles qui le forment, règles de forme et de fond, sont conçues dans le but de protéger les salariés contre les licenciements arbitraires décidés par l’employeur.

 

  1. Au niveau du fond, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail de manière unilatérale et automatique sans qu’une cause réelle et sérieuse soit établie. Une telle exigence trouve son fondement juridique aussi bien dans le Code civil que dans le Code du travail. En vertu du principe civiliste de la force obligatoire des contrats[3], le contrat de travail légalement formé est considéré comme la loi des parties cocontractantes et il ne peut être rompu ou modifié que par le consentement mutuel des deux parties ou pour les causes que la loi autorise[4]. Procéder à un licenciement pour motif économique ne peut pas déroger à ce principe, l’employeur ne peut recourir à ce type de licenciement sans établir l’existence d’une cause économique réelle et sérieuse l’obligeant à rompre la relation contractuelle qui le lie au salarié[5]. Cette obligation imposée à l’employeur est affirmée également par le Code du travail[6]. Au yeux du législateur social, l’employeur est tenu de justifier l’existence d’un motif réel et sérieux rendant impossible la conservation de l’emploi du salarié[7].

 

  1. 3. Naturellement, les juges exercent un contrôle sur le caractère réel et sérieux du motif économique invoqué par l’employeur, un tel contrôle qui constitue le point central du droit du licenciement économique[8]. Cependant, la question qui se pose est de savoir sur quels éléments porte ce contrôle? En d’autres termes, quels sont les éléments constitutifs du motif économique qui font qu’un licenciement est légitime ? Ou, dans quelle mesure un licenciement économique peut être qualifié de licite? Cette interrogation, qui fait l’objet de cette étude, se pose alors que les entreprises, en se reposant sur un contexte économique difficile, recourent de plus en plus aux licenciements économiques jugés, par elles, inéluctables pour leur survie et pour leur stabilité économique et sociale.

 

  1. 4. Pour y répondre, l’on peut dire que le Code du travail marocain ne se prononce pas sur le motif économique pouvant légitimer un licenciement, et, en général, ne détermine pas la notion du licenciement économique. L’article 66 du Code du travail expose, à titre indicatif seulement, les situations -ou les faits- sur lesquelles l’employeur peut se fonder pour pouvoir procéder aux licenciements économiques: il s’agit, comme l’indique l’article précité, des motifs technologiques, structurels et économiques[9]. A l’inverse, le législateur français pose une définition du licenciement économique, dans l’article L.1233-3[10] du Code du travail, bien qu’elle soit “floue”[11]. Le Professeur Pélissier l’a divisée, en se fondant sur l’article L.1233-3 du Code du travail, en deux parties: un motif économique qualificatif et un motif économique justificatif[12]. Concernant plus précisément le motif économique justificatif, la jurisprudence sociale, en se référant à l’article 1233-3 du Code du travail, considère que ce motif se compose de deux éléments liés l’un à l’autre : l’existence d’une situation économique et un effet sur l’emploi (la suppression de l’emploi, la transformation de celui-ci ou une modification du contrat du travail) consécutif à cette situation. La chambre sociale de la Cour de cassation a conçu un système de contrôle qui impose aux juges du fond d’examiner les deux éléments susmentionnés, à savoir l’appréciation du caractère réel et sérieux de la situation économique invoquée par l’employeur (§I ), et l’appréciation du caractère réel et sérieux du lien causal entre cette situation économique et l’effet sur l’emploi (§ II)[13].

 

  • I. L’appréciation du caractère réel et sérieux de la situation économique invoquée par l’employeur.

 

  1. 5. Quelles sont les situations économiques pouvant autoriser l’employeur à supprimer l’emploi ou à modifier un élément essentiel du contrat de travail[14] ? Au niveau du droit du travail marocain, ces situations sont empreintes d’ambigüité. S’inspirant de la législation française, l’article 66 du Code du travail marocain considère les mutations technologiques comme étant des causes de licenciement même si l’entreprise qui les invoque ne rencontre pas de difficultés économiques. Ce motif de licenciement peut apparaitre anormal dans la mesure où le recours aux mutations technologiques présente souvent un indice de prospérité économique et financière de l’entreprise[15]. Dans le même esprit, les expressions “motifs économiques” et “structurels” énoncées par l’article précité restent des notions vagues et insignifiantes: qu’entendons-nous par “motif économique” et “motif structurel” susceptibles de légitimer le licenciement économique?!

 

  1. 6. Pour le droit français, la loi du 8 août 2016 -dite El khomri-[16] a précisé les situations pouvant légitimer le licenciement économique. Aux difficultés économiques et mutations technologiques qui existaient dans l’ancienne version de l’article 1233-3 du Code du travail, la nouvelle loi a ajouté deux autres situations: il s’agit de la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité et la cessation d’activité de l’entreprise[17]. Ces deux situations étaient consacrées, il faut le souligner, par la jurisprudence de la Cour de Cassation. Néanmoins, ces situations ne sont pas, il faut le préciser, fixées à titre limitatif, car l’utilisation par le législateur de l’adverbe « notamment » dans l’article L.1233-3 du Code du travail nous laisse présager que les juges conservent la possibilité d’élargir leur périmètre: d’autres situations économiques invoquées par l’employeur sont susceptibles de justifier le licenciement économique.

 

  1. En se référant à la législation française, qui donne des solutions plus que la législation marocaine, l’on peut dire que l’entreprise puisse se voir attribuer le droit de licencier, en principe, dans deux situations: lorsque l’entreprise traverse une crise économique (I), et lorsqu’elle fait l’objet d’une réorganisation (II).

 

  1. La crise économique
  2. Procéder au licenciement économique apparaît logique lorsque l’entreprise fait l’objet de cessation d’activité (B). Sans même connaître ce sort l’entreprise peut se permettre licencier lorsqu’elle rencontre des difficultés économiques (A).

 

 

  1. Les difficultés économiques

 

  1. 8. Ignorées par le législateur marocain, les difficultés économiques constituent explicitement des causes légitimes de licenciement pour le législateur français. Cependant, il faut noter que la notion « difficultés économiques » énoncée dans l’article L.1233-3 du Code du travail français dans son ancienne version était utilisée d’une manière générale et imprécise (1). Une lacune qui a été remplie par la nouvelle loi du 8 août 2016 en établissant des critères objectifs relatifs à cette notion (2).

 

  1. Critères indéfinis de la notion des difficultés économiques avant la loi du 8 août 2016

 

  1. 9. L’imprécision de la notion des difficultés économiques posait un problème de qualification aux juges qui se trouvaient devant la question suivante : chaque difficulté économique rencontrée par l’entreprise pourrait-elle être invoquée par l’employeur pour justifier le licenciement ? La chambre sociale de la Cour de cassation, dans le cadre de sa mission interprétative du droit, a condamné dès le départ « le licenciement d’économie » conçu essentiellement pour améliorer les bénéfices, et l’a considéré comme un licenciement ne reposant pas sur une cause économique[18]. La distinction entre les licenciements réalisés par l’entreprise en vue de sauvegarder son activité et ceux procédés seulement pour la réalisation de profits plus importants constituait le critère en vertu duquel les juges ont distingué entre les difficultés économiques justifiant le licenciement et celles qui ne le justifient pas[19].

 

  1. 10. La haute juridiction exerce un contrôle rigoureux sur la nature sérieuse des difficultés économiques justifiant le licenciement. Ce contrôle l’a conduit à juger que la baisse du chiffre d’affaires ne peut pas constituer, en principe, une difficulté économique suffisante justifiant le licenciement[20]. Egalement, elle a considéré que la baisse des bénéfices ne constituait pas un motif légitime de licenciement. Elle a estimé que « ni la réalisation d’un chiffre d’affaire moindre de 1992 à 1993, ni la baisse des bénéfices réalisés pendant la même période ne suffisaient à caractériser la réalité des difficultés économiques. » [21] Dans le même sens, la Cour de cassation n’a pas considéré les difficultés technico-environnementales comme des difficultés économiques légitimant les licenciements[22].

 

  1. 11. En revanche, plusieurs situations ont été reconnues comme des difficultés économiques justifiant le licenciement. La chambre sociale de la Cour de cassation a estimé que la perte par l’employeur de son unique client constituait une difficulté économique légitimant la suppression du poste du salarié[23]. Elle a considéré, en outre, le surendettement bancaire de la société, accompagné d’une baisse de son chiffre d’affaires, comme une difficulté économique permettant la suppression de l’emploi[24].
  2. Critères définis de la notion de difficultés économiques par la loi du 8 août 2016

 

  1. 12. L’objectivation de la notion de difficultés économiques susceptibles de justifier le licenciement économique constitue l’un des apports majeurs de la loi du 8 août 2008. Relevant auparavant de l’appréciation subjective et discrétionnaire des juges, les difficultés économiques sont désormais fixés objectivement par cette nouvelle loi.

 

  1. 13. Les difficultés économiques sont, selon la loi du 8 août 2008, caractérisées par la détérioration des indicateurs économiques inhérents au fonctionnement de l’entreprise. Il s’agit de la baisse des commandes ou du chiffre d’affaires[25], des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation. Ces indicateurs ne sont cités qu’à titre d’exemple puisque la lecture de l’article L.1233-3 du Code du travail, tel qu’il est réformé, laisse admettre que les difficultés économiques de l’entreprise puissent être justifiées par la dégradation d’autres indices économiques[26]. Un constat qui conduit à dire que la tendance d’élargir le périmètre de la notion de difficultés économiques susceptibles de légitimer la suppression de l’emploi est manifeste dans l’esprit de la loi El Khomri.

 

  1. 14. Cet élargissement est interprétée différemment par les parties antagonistes. Pour le Medef[27], ces nouvelles mesures contribueront à l’amélioration de la compétitivité des entreprises et favoriseront l’emploi. Dans ce sens, Pierre Gattaz le président du Medef affirme “qu’il faut baisser la double peur, celle des patrons d’embaucher et celle des salariés de se faire licencier”[28]. Au sujet des syndicats, la CGT, à titre d’exemple, juge que l’élargissement de la notion des difficultés économiques permettra aux entreprises de licencier sans motif et offrira, avec les autres règles de la loi El Khomri, une “liberté totale au patronat”[29].

 

  1. La cessation d’activité de l’entreprise

 

  1. 15. La cessation d’activité de l’entreprise est citée explicitement par l’article L.1233-3 du Code du travail, réformé par la loi du 8 août 2016, comme étant une situation pouvant justifier le licenciement économique. Auparavant c’est la jurisprudence qui l’a retenu parmi les faits pouvant légitimer les licenciements économiques. Cette jurisprudence remonte à l’arrêt Brinon, rendu le 31 mai 1956, dans lequel la chambre sociale a précisé clairement que l’employeur peut procéder à des licenciements économiques lorsque ce dernier cesse d’exploiter son entreprise[30]. La liberté d’entreprendre justifie cette position jurisprudentielle, puisqu’elle permet « aux agents économiques non seulement d’entreprendre une activité économique mais aussi d’y mettre fin. »[31].

 

  1. 16. L’employeur peut donc licencier son personnel lorsqu’il cesse son activité sans établir d’autres causes pour justifier ce licenciement[32]. En d’autres termes, l’employeur n’est pas tenu d’établir que la cessation de l’activité de son entreprise est due à des difficultés économiques, des mutations technologiques, ou à la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise[33]. Cette conception adoptée dans l’arrêt Brinon a été redéfinie par la Cour de cassation. En effet, depuis le début des années 2000, la Cour de cassation refuse de qualifier une cessation d’activité comme cause licite de licenciement lorsque cette cessation est due à une faute ou à une légèreté blâmable de l’employeur[34], et lorsqu’elle procède d’une fraude[35]. Également, dans le cadre de cette redéfinition, la haute juridiction retient qu’une cessation totale de l’activité seule peut justifier le licenciement économique[36].

 

  1. La réorganisation de l’entreprise

 

  1. 17. Les contraintes imposées par l’économie de marché obligent les entreprises à se réorganiser – ou se restructurer – continuellement. La réorganisation de l’entreprise dans ce contexte demeure un moyen de gestion utilisé même en l’absence de difficultés économiques ou financières[37]. Cette donnée économique est prise en considération par la législation sociale en autorisant les entreprises à procéder aux licenciements économiques lorsqu’elles font l’objet d’une réorganisation technologique (A) et une réorganisation conçue pour la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise (B).

  1. La réorganisation technologique
  2. 18. L’article L.1233-3 du Code du travail français et l’article 66 du Code du travail marocain prévoient explicitement que les mutations technologiques peuvent constituer une cause économique de suppression ; de transformation de celle-ci ; ou de modification du contrat de travail, même en l’absence de difficultés économiques. Cependant, le salarié refuse souvent d’accepter une transformation de l’emploi ou une modification du contrat du travail à la suite de l’introduction de nouvelles technologies dans l’entreprise.
  3. 19. La Cour de cassation a confirmé à plusieurs reprises cette position législative. Elle estime que « l’introduction de nouvelles technologies dans l’entreprise peut constituer une cause économique de suppression ou de transformation d’emploi ou d’une modification substantielle du contrat de travail. » [38] Elle a également confirmé l’arrêt de la cour d’appel qui jugeait comme économique le licenciement de la salariée à la suite de l’évolution de la société qui exigeait de transformer l’emploi de la secrétaire dactylographe en un emploi de secrétaire de direction chargée notamment de la rédaction de devis et du suivi financier des chantiers[39]. Dans le même esprit, la Cour de cassation a considéré la mise en œuvre d’un nouveau logiciel informatique comme une mutation technologique légitimant le licenciement de la salariée[40]. Pour la haute juridiction, l’introduction d’une technologie informatique nouvelle pouvait constituer une cause économique de licenciement, alors même que la compétitivité de l’entreprise ne serait pas menacée[41].

 

  1. 20. Cependant, le licenciement économique fondé sur une mutation technologique ne peut être justifié, comme le précise l’article L.1233-4 du Code du travail, que si l’employeur satisfait à son obligation de formation et d’adaptation. L’article L.6321-1 du Code du travail qui explicite cette obligation précise que l’employeur est tenu d’adapter les salariés aux évolutions de leur emploi et de les maintenir dans la capacité à occuper des emplois. Dés lors, un licenciement décidé à l’égard d’un salarié en raison de son incapacité à s’adapter aux mutations technologiques de l’entreprise pourrait être dépourvu de cause économique s’il s’avère que l’employeur n’a pas effectué les efforts nécessaires pour la formation et l’adaptation dudit salarié à l’évolution de son emploi.
  2. La réorganisation destinée à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise
  3. 21. Sur le plan social, la chambre sociale de la Cour de cassation considère la réorganisation de l’entreprise comme une cause économique permettant à l’employeur de supprimer ou de transformer un emploi, ou de modifier le contrat du travail, en dehors de toute difficulté économique et de toute mutation technologique. Néanmoins, une difficulté se pose concernant les opérations de réorganisation qui peuvent justifier la rupture du contrat de travail ou la modification de celui-ci.
  4. 22. Pour répondre à cette question, la haute juridiction a adopté deux critères. Au début, la Cour de cassation considérait que toute opération de réorganisation décidée dans « l’intérêt de l’entreprise » justifiait la suppression de l’emploi, la transformation de celui-ci ou la modification du contrat de travail. À ce propos, la haute juridiction a donné raison à la cour d’appel de Versailles qui a reconnu le caractère économique d’un licenciement opéré à la suite d’une réorganisation de l’entreprise[42]. Dans le même esprit, elle a considéré que la modification d’un élément du contrat du travail, imposée à la suite d’une réorganisation de l’entreprise et refusée par le salarié, constituait un licenciement économique[43].
  5. 23. Par la suite, il s’est avéré que la notion de l’intérêt de l’entreprise ne constituait pas un critère de contrôle efficace capable de déterminer d’une manière précise les opérations de réorganisation qui pouvaient légitimer la suppression de l’emploi, la transformation de celui-ci, et la modification du contrat de travail[44]. En effet, les employeurs, en se fondant sur le caractère vague de cette notion, peuvent avancer que les opérations de réorganisation qu’ils effectuent et qui sont accompagnées de licenciements, ont pour objectif l’intérêt de l’entreprise[45].
  6. 24. L’inefficacité du critère de l’intérêt de l’entreprise, en raison de sa nature vague, a conduit la chambre sociale de la Cour de cassation à adopter le critère de « sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise » considéré comme plus précis. La haute juridiction voit que la réorganisation de l’entreprise ne peut justifier la suppression de l’emploi, la transformation de celui-ci, ou la modification du contrat de travail, que si elle est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de celle-ci[46]. En ce sens, la Cour de cassation a énoncé que les modifications des horaires de travail ne pouvaient constituer une cause économique que si elles étaient indispensables au maintien de la compétitivité de l’entreprise[47].
  7. 25. La jurisprudence récente de la chambre sociale de la Cour de cassation autorise toujours les entreprises, même si elles ne connaissent pas de difficultés économiques, à procéder à des licenciements économiques ou à modifier les contrats de travail lorsque la sauvegarde de leur compétitivité est menacée. Cependant, en contrepartie de cette autorisation, la haute juridiction précise que ces entreprises doivent prouver que la sauvegarde de leur compétitivité est réellement menacée[48]. À travers cette restriction, la Cour de cassation s’assure que les licenciements ou les modifications des contrats de travail décidés par les entreprises répondent effectivement au souci de la sauvegarde de leur compétitivité et qu’elles ne visent pas à réduire le coût du travail et, en général, à augmenter les profits. À ce propos, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel de Montpellier jugeant que la diminution de la marge salariale n’était pas une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise[49]. En revanche, la Cour de cassation a considéré le projet de réorganisation du secteur commercial opéré par la société Les Pages Jaunes et qui entraînait la modification des contrats de travail, comme nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de cette société[50].

 

  1. L’appréciation du caractère réel et sérieux du lien causal entre la situation économique invoquée et l’effet sur l’emploi.

 

  1. L’existence d’une situation économique difficile alléguée par l’employeur (difficultés économiques, mutation technologique, réorganisation pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise, et cessation d’activité de celle-ci) ne peut justifier, à elle seule, l’effet sur l’emploi (la suppression de l’emploi, la transformation de celui-ci, ou la modification du contrat de travail).
  2. 27. L’employeur est également tenu de prouver, sous le contrôle des juges du fond, l’existence d’un lien causal entre cette situation économique et l’effet sur l’emploi. À titre d’exemple, l’employeur établit que c’est la réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder sa compétitivité qui l’a obligé à recourir à des licenciements, ou à des modifications affectant des éléments essentiels de certains contrats de travail.

Le contrôle exercé par les juges du fond du caractère réel et sérieux de ce lien causal permet de fixer des limites au pouvoir de direction de l’employeur[51]. Ce dernier ne peut se permettre de supprimer ou transformer un emploi, ni de modifier un contrat de travail, sans établir que ces modifications sont exigées par un fait de nature économique, comme la réorganisation de l’entreprise pour sauvegarder sa compétitivité.

  1. 28. Ce contrôle permet aux juges de s’assurer que la suppression de l’emploi, la transformation de celui-ci, ou la modification du contrat de travail ne résultent pas d’un détournement de pouvoir ou d’une légèreté blâmable de l’employeur[52]. À ce propos, la chambre sociale de la Cour de cassation a qualifié le licenciement d’un salarié comme dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu’elle a remarqué que les difficultés économiques invoquées par l’employeur existaient déjà au moment où ce salarié avait été embauché[53]. Dans le même esprit, la haute juridiction a nié le caractère réel et sérieux du licenciement résultant de la suppression de l’emploi du fait de la proposition faite par l’employeur au salarié de rester à son service jusqu’à une date postérieure à l’engagement de sa procédure de licenciement[54].
  2. 29. En outre, la Cour de cassation ne reconnait pas le caractère économique d’un licenciement décidé suite aux difficultés économiques causées par l’employeur. En se sens, elle a considéré comme sans cause économique le licenciement opéré par un employeur qui s’est laissé dépouiller par complaisance d’une partie importante de son patrimoine, fait qui a contribué à la situation ayant rendu nécessaire le licenciement[55]. Le licenciement perd également son caractère économique lorsque l’employeur embauche un salarié pour occuper l’emploi d’un salarié licencié. La Cour de cassation a jugé le licenciement d’une salariée sans cause économique, au motif que peu après son licenciement l’employeur avait embauché une autre salariée pour occuper un poste similaire[56].

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] Enseignant-vacataire au sein de la Faculté de Droit de Settat.

[2] Le régime juridique relatif à la rupture du contrat de travail nous renvoie souvent au licenciement économique dans la mesure où il constitue la forme la plus connue et pratiquée, mais il existe d’autres modes de rupture: il s’agit du licenciement pour motif personnel, licenciement pour faute grave, licenciement pour inaptitude professionnelle, la rupture conventionnelle, la mis à la retraite, etc.

[3] Ce principe est une traduction de l’article 230 du DOC qui s’inspire de 1134 du Code civil français.

[4] P. Malaurie, L. Aynès, P. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 2011, p. 371 ; Y. Chany, « Observations sur un thème discret : le licenciement pour motif économique de la procédure de sauvegarde », Dr. ouv., mai 2008, p. 239.

[5] Paradoxalement, dans le cadre de la conception ancienne, chaque partie pouvait rompre unilatéralement le contrat de travail à tout moment et sans à justifier sa décision. L’employeur était libre de licencier comme le salarié était libre de démissionner. Cette faculté de résiliation unilatérale du contrat de travail, qui est en opposition avec la règle actuelle, trouve son origine, comme le constatent Jean Rivero et Jean Savatier, dans l’article 1780 du Code civil qui vise à “empêcher les engagements perpétuels, dans une volonté de protection de la liberté de la personne du salarié, autant que de protection de la liberté de gestion de l’employeur”. J.Rivero, J. Savatier, Droit du travail, PUF 1984, p. 497.

[6] L’article 35 du Code du travail marocain dispose que: “Est interdit le licenciement d’un salarié sans motif valable”. L’article 1233-1 du Code du travail français pose la même règle en affirmant que: “Tout licenciement pour motif économique est motivé…il est justifié par une cause réelle et sérieuse”.

[7] À défaut, c’est-à-dire en l’absence d’une telle cause, le licenciement sera qualifié d’« injustifié » ce qui offrira par conséquent la voie à l’application des sanctions prévues par la loi. S. Koleck-Desautel, « La sanction du licenciement sans cause réelle et sérieuse », Lexbase Hebdo, édition sociale, n° 68 du jeudi 24 avril 2003 ; J. Pélissier, G. Auzero, E. Dockès, op.cit., p. 468.

[8] J. Pélissier, « La cause économique du licenciement », RJS, 8-9/92, p. 527.

[9] Le législateur marocain ne définit pas le licenciement économique, ne fait pas la distinction entre le licenciement économique et individuel, etc. Il se focalise plutôt sur l’aspect procédural du licenciement économique essentiellement la délivrance de l’autorisation par le gouverneur de la préfecture ou de la province (Art. 67 du Code du travail).

[10] Article issu de la loi n° 89-459 du 2 août 1989.

[11] J. Pélissier, op.cit,  p. 527.

[12] Le Professeur Pélissier l’a divisée, en se fondant sur l’article L.1233-3 du Code du travail, en deux parties: un motif économique qualificatif et un motif économique justificatif . Le motif économique qualificatif permet de qualifier et ranger le licenciement dans la catégorie du « licenciement pour motif économique “, tandis que le motif économique justificatif permet de déterminer si le licenciement est justifié. J. Pélissier, op.cit, p. 527.

[13] J. Pélissier, op.cit., p. 530. Pour P. Waquet, l’impossibilité du reclassement constitue un troisième élément qui s’ajoute aux deux autres. Cet auteur estime que : « la cause économique du licenciement n’est caractérisée que par la réunion de trois conditions : une situation économique, un effet sur l’emploi et un reclassement impossible ». P. Waquet, op.cit., p. 170.

[14] Dans certains cas, l’employeur n’envisage pas la suppression de l’emploi, mais il propose uniquement la modification d’un élément essentiel du contrat de travail (salaire à titre d’exemple). Le refus du salarié  cette modification conduit à son licenciement.

[15] M.-S. Bennani, Droit du travail au Maroc à la lumière du Code du travail, relations individuelles de travail, Tomme II, éd Najah 2007, p. 1141 (ouvrage en arabe).

[16] Issu de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels

[17] Cette nouvelle approche conçue par la loi El khomri rentrera en vigueur le 1 décembre 2016.

[18] Cass. soc., 24 avril 1990, Bull. civ., V, n° 182. La société agricole marnaise d’exploitation (SAME), avait licencié M. Henri Trapo, qui occupait le poste de comptable financier à mi-temps, au motif qu’il coûtait trop cher. La juridiction prud’homale avait jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et avait condamné la société à payer au salarié des dommages et intérêts. La cour d’appel avait adopté le même raisonnement que la juridiction prud’homale en jugeant que le motif invoqué par la société ne constituait pas un motif licite de licenciement, au vu des profits considérables réalisés par la société. Dans le même sens, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel en estimant que le licenciement ne reposait pas sur un motif économique.

[19] P. Waquet, op.cit., p.170.

[20] Cass. soc., 12 déc1991, RJS 2/92, n° 134. Contrairement au jugement de la cour d’appel, la Cour de cassation avait estimé que, la baisse du chiffre d’affaire ne suffisait pas en principe à justifier le licenciement.

[21] Cass. soc., , 6 juillet 1998, Bull. civ., V, n° 369. Il s’agit d’un licenciement décidé par la société SMAF contre le salarié M. Morel qui occupait le poste de comptable. La cour d’appel avait donné raison à la société SMAF en jugeant que la baisse des bénéfices constituait une difficulté économique justifiant le licenciement. La Cour de cassation a considéré au contraire que ni la baisse du chiffre d’affaire, ni la baisse des bénéfices ne pouvaient suffire à justifier le licenciement.

[22] Cass. soc., 7 juillet 1998, Bull. civ., V, n° 369. Pour des raisons technico-environnementales relatives essentiellement à l’urbanisme et à l’approvisionnement en eau, la société Schweppes France, filiale du groupe Cadbury-Schweppes, ne pouvait pas réaliser un projet industriel – la production de la marque Oasis – dans l’usine de Montigny-le-Bretonneux, suite au refus de la municipalité. Cette position de la municipalité avait conduit la société Schweppes France à fermer l’usine de Montigny et par conséquent à licencier des salariés pour motif économique. En confirmant le jugement de la cour d’appel, la Cour de cassation a estimé que les licenciements décidés ne reposaient pas sur un motif économique en l’absence de toute difficulté économique rencontrée par la société Schweppes France.

[23] Cass. soc.,19 juillet 2000, RJS 2000, n° 1064, p. 727. La Cour de cassation a approuvé le jugement de la cour d’appel décidant que la perte de l’unique client de la société Force Majeure 7 constituait une difficulté économique justifiant le licenciement de la salariée Bizzari.

[24] Cass. soc., 30 sept 1997, D., 1997, IR. 223. La Cour de cassation a donné raison à la cour d’appel considérant que le surendettement bancaire constant de la société (quatre millions de francs) et la baisse de son chiffre d’affaires constituaient des difficultés économiques justifiant le licenciement.

[25] Levant l’ambigüité sur cet indicateur, cette baisse est constituée dès que la durée de cette dernière est au moins égale à, en comparaison de la même période de l’année présidente, à un trimestre pour une entreprise de  moins onze salariés, deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et moins de cinquante salariés, trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et moins de trois cents salariés, quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus.

[26] L’article L.1233-3 du Code du travail dispose que l’employeur peut licencier un salarié en raison : ” des difficultés économiques tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés”.

[27] Le mouvement des entreprises de France.

[28] lentreprise.lexpress.fr. publié le 18 février 2016.

[29] www.lefigaro.fr. publié le 19 février 2016.

[30] Cass. soc., 31 mai 1956, Bull. civ., V, n° 499. Le salarié Brinon a intenté une action en justice contre son employeur qui avait fait faillite. Les juges du fond ont donné raison au salarié et ont reconnu son droit aux dommages et intérêts. La Cour de cassation n’a pas accepté cette solution en considérant que : « l’employeur qui porte la responsabilité de l’entreprise est seule juge des circonstances qui le déterminent à cesser son exploitation et aucune disposition légale ne lui fait obligation de maintenir son activité à seule fin d’assurer à son personnel la stabilité de l’emploi ».

[31] Cass. soc., 18.janvier 2011, SSL (supplément), 2011, n° 1504, p. 27, note P. Bailly.

[32] P. Bailly, « Actualités des licenciements économiques », SSL, 2011, n° 1504, p. 6.

[33] Cass. soc., 18.janvier 2011, SSL (supplément), 2011, n° 1504, p. 30, note P. Bailly.

[34] La Cour de cassation précise, dans un arrêt rendu le 16 janvier 2001 que : « la cessation d’activité de l’entreprise quand elle n’est pas due à une faute de l’employeur ou à sa légèreté blâmable, constitue un motif économique de licenciement ». Cass. soc., 16 janvier 2001, Dr. soc., 2001, p. 413, note de J. Savatier. Le salarié M. Morvan qui travaillait comme garçon de café dans un restaurant détenu par la société Le royal Printemps a été licencié pour motif économique. Le licenciement a été décidé en raison du non-renouvellement du bail commercial consenti par le propriétaire des locaux à la société, ce qui a entraîné la cessation de son activité. La Cour de cassation a confirmé le jugement de la cour d’appel qui reconnaissait le caractère économique du licenciement, au motif que d’une part, la cessation de l’activité de l’entreprise n’était pas due à une faute de l’employeur ou à sa légèreté blâmable, et d’autre part, que l’énumération des motifs économiques de licenciement par l’article L.1233-2 du Code du travail n’étant pas limitative.

[35] Cass. soc., 28.février 2006, Bull. civ., V, n° 89.

[36] Cass. soc.,  10 octobre 2006, RJS 12/2006, n° 1250.

[37] A. Degremont, « Le contexte économique des restructurations en Europe : la restructuration permanente », in La place des salariés dans les restructurations en Europe communautaire, Presses Universitaires de Strasbourg 2004, p. 9.

[38] Cass. soc., 2 juin 1993, Bull. civ., V, n° 155. L’introduction de nouvelles technologies dans l’entreprise a causé le licenciement de la salariée qui ne pouvait s’adapter à sa nouvelle fonction d’« agent de contrôle », alors qu’elle occupait auparavant la fonction d’« agent de fabrication ». La cour d’appel a jugé que le licenciement décidé était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l’entreprise ne connaissait pas de difficultés économiques. La Cour de cassation a estimé au contraire que l’introduction de nouvelles technologies suffisait à justifier la suppression de l’emploi bien que l’entreprise ne connût pas de difficultés économiques.

[39] Cass. soc., 9 juillet 1997, Bull. civ., V, n° 262.

[40] Cass. soc.,17 mai 2006, n° 04-43033, inédit.

[41] Cass. soc., 9 octobre 2002, n° 00-44069, inédit.

[42] Cass. soc., 1 avril 1992, Bull. civ., n° 223. La société Renval avait proposé à l’ensemble des représentants de commerce dont madame Madrelle une modification de leur contrat portant essentiellement sur leur rémunération. En refusant cette modification, la salariée Madrelle avait été considérée comme démissionnaire. Elle a saisi la juridiction prud’homale pour obtenir des dommages et intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour d’appel de Versailles a adopté une position contraire à celle que souhaitait la salariée, en jugeant que la modification du contrat ait été décidée en vue d’assurer un bon fonctionnement de l’entreprise. La Cour de cassation a confirmé ce raisonnement de la cour d’appel.

[43] Cass. soc., 8 juin 1994, Bull. civ., V, n° 193. À la suite de difficultés financières, l’employeur était contraint d’affecter M. Grimaldi à un autre poste de travail et avec de nouvelles conditions de rémunérations. La saisine par le salarié du conseil de prud’hommes pour contester sa nouvelle situation de travail avait conduit l’employeur à le licencier. Le salarié avait formé des demandes en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour d’appel a reconnu la qualité économique de ce licenciement, en jugeant que la modification des nouvelles conditions de rémunérations avait été décidée pour pouvoir maintenir l’équilibre financier de l’entreprise. La même solution a été adoptée par la Cour de cassation, qui a estimé que la modification avait été imposée par la réorganisation de l’entreprise.

[44] M. Henry, « La notion de motif économique », Dr. soc., 1995, p. 557.

[45] A. Philbert, « Le droit prétorien du licenciement économique », Dr. soc., 1998, p. 37.

[46] P. Bailly, « L’actualisation jurisprudentielle des restructurations », SSL, 2007, n° 1326, p.6.

[47] Cass. soc., 2 octobre 1997, pourvoi n° 94-45.274, JSL, 1997, n° 1, p. 7, note de M. C-Haller. Afin de satisfaire les exigences des clients et dans le souci d’un meilleur rendement, la société Deslandes et Thurier a modifié les horaires de travail des salariés affectés au service de l’administration. En refusant cette modification, la salariée M. Chambon a été licenciée pour motif économique. La cour d’appel d’Orléans n’a pas jugé son licenciement comme économique parce que les modifications des horaires « n’étaient pas indispensables au maintien de la compétitivité de l’entreprise ». Bien que la société Deslandes et Thurier ait a essayé d’interpréter l’adverbe « notamment » en sa faveur, en prétendant que la réorganisation de l’entreprise lui imposait de supprimer l’emploi, de transformer celle-ci, ou de modifier les clauses contractuelles, la Cour de cassation n’a pas accueilli son recours en confirmant le raisonnement de la cour d’appel.

[48] P. Lokiec, Droit du travail, Tome I : Les relations individuelles de travail, PUF, 2011, p. 259 ; M. Henry, op. cit., p. 557.

[49] Cass. soc., 9 décembre 2003, Dr. soc., 2004, p. 210, note Ph. Waquet.

[50] Cass. soc., 11 janvier 2006, n° 04-46201, publié au Bulletin. Afin de sauvegarder sa compétitivité la société Les Pages Jaunes a modifié les contrats de travail de 930 conseillers commerciaux à la suite d’un projet de réorganisation de son secteur commercial. Certains salariés ont contesté le caractère réel et sérieux de leur licenciement, après avoir refusé la modification de leur contrat de travail, portant essentiellement sur leur condition de rémunération. La cour d’appel, confirmée par la Cour de cassation, n’a pas donné raison aux salariés en considérant que la modification de leur contrat de travail était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de leur employeur (la société les Pages Jaunes), et ont légitimé leur licenciement.

[51] J. Pélissier, op. cit., p. 532.

[52] Ibid.

[53] Cass. soc., 26.février 1992, RJS, 4/92, n° 422. La chambre sociale de la Cour de cassation a précisé : « Fait preuve de légèreté blâmable l’employeur embauchant un salarié en vertu d’un contrat d’adaptation assorti d’une formation de douze mois, dès lors qu’il connaissait la situation obérée de son entreprise au moment de cet engagement. Le licenciement économique de l’intéressé prononcé dans ces conditions est sans cause réelle et sérieuse ».

[54] Cass. soc., 17 mars 1998, Bull. civ., V, n° 145. La Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel qui avait jugé le licenciement de M. Maouchi sans cause réelle et sérieuse, au motif que la société Astor lui avait demandé de rester à son travail jusqu’une date postérieure à l’engagement de sa procédure de licenciement. En effet, la société avait demandé au salarié de rester jusqu’au 14 juillet 1993, alors que la procédure avait été engagée le 23 février 1993. Cette sollicitation a amené la cour d’appel à juger que la société reconnaissant qu’elle pouvait garder le salarié à son service à la date du licenciement et même après le terme du préavis, les difficultés économiques alléguées n’imposaient pas la suppression de l’emploi.

[55] Cass. soc., 9.octobre 1991, RJS, 11/91, n° 1194.

[56] Cass. soc.,  22 février 1995, Bull. civ., V, n° 67. La salariée M. Lafleur qui travaillait dans la clinique du château du Garches comme femme de chambre a été licenciée pour motif économique. La Cour de cassation a confirmé le jugement de la cour d’appel jugeant ce licenciement sans cause réelle et sérieuse, dans la mesure où la société RTM avait recruté une salariée pour occuper le même poste que M. Lafleur peu après son licenciement.

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