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L’apport des ONG en matière de promotion et de protection des droits de l’Homme

L’apport des ONG en matière de promotion et de protection des droits de l’Homme

Mohamed Nazi                                                                               

Introduction :

Aujourd’hui, la paix semble passer non seulement par l’application du droit international public existant mais également par la réalisation du principe de justice ou de sauvegarde des droits de l’Homme, ce qui implique nécessairement la prise de mesures se heurtant à la souveraineté des États. Le processus d’humanisation, dû à la résurgence des droits de l’Homme dans les relations internationales, permet l’accès à celui-ci des peuples et de la personne humaine, rompant définitivement l’exclusivisme traditionnel des États en tant que sujets du droit international.

Les règles générales du droit international actuel ne sont plus seulement le produit de l’accord des volontés mais celui du consensus de la Communauté internationale. Les normes péremptoires ou de jus cogens apparaissent à côté des obligations des États.

À cet égard, l’expansion des droits de l’Homme est le phénomène le plus apparent ayant entraîné une réduction progressive du domaine réservé des États. Les premières conventions en matière des droits de l’Homme ont apporté les premières brèches du domaine réservé des États touchant ainsi de très près les structures internes des États et l’intimité de leur vie nationale. La définition progressive des droits de l’Homme constitue une contribution importante à l’évolution de la nature du droit international celui-ci ne cesse de mordre sur la compétence nationale et la souveraineté des États. La place des droits de l’Homme, dans le droit international, remet en cause la règle de la non-ingérence.

Le mouvement associatif a connu une évolution exceptionnelle qui s’est traduite par une prolifération d’institutions, d’une part, et par la place privilégiée que lui reconnaissent de plus en plus les autres acteurs institutionnels et non institutionnels de la société internationale, d’autre part.

La société civile a connu, au cours des dernières années, un développement spectaculaire. Les ONG interviennent, secourent, soignent, témoignent, réclament, contestent et protestent sur les atteintes aux droits de l’Homme. Elles interviennent dans les procédures d’appréciation des normes de droits de l’Homme en contrôlant l’adéquation entre la norme et la pratique interne du droit ; elles jouent un rôle de « sentinelle » de la norme juridique.

Le terme d’organisations “non gouvernementales” – ou plus exactement “à but non lucratif” – est généralement employé pour désigner l’ensemble des organisations qui se battent pour construire la société civile. Habituellement, ces organisations se caractérisent par des objectifs autres que financiers, ce qui n’empêche pas la multiplicité et la diversité des raisons de leur existence, de leurs structures et de leurs activités[1].

Parmi les ONG, on trouve des petits groupes de pression, par exemple dans le domaine de l’environnement ou des violations des droits de l’Homme, mais également des organismes caritatifs éducatifs, des foyers pour femmes, des associations culturelles, des organisations religieuses, des fondations juridiques, des programmes d’assistance humanitaire (et la liste est loin d’être exhaustive), jusqu’à des grandes organisations internationales possédant des centaines voire des milliers de sections ou de membres dans toutes les régions du monde.

         La contribution des ONG est importante non seulement en termes des résultats atteints – à savoir l’optimisme que ces succès génèrent parmi la population concernant la défense des droits de l’Homme dans le monde -, mais aussi parce que les ONG sont, au sens premier du terme, des outils à la disposition de tous les individus dans le monde. Si ces organisations sont gérées et coordonnées par des personnes privées, elles doivent une grande partie de leur force aux autres membres de la communauté qui apportent leur soutien aux causes qu’elles défendent. Cette spécificité leur confère une signification importante aux yeux de tous ceux qui souhaitent contribuer à l’amélioration des droits de l’Homme dans le monde.

Les ONG des droits de l’Homme à l’image de l’ensemble des ONG et de la « société civile internationale » sont un ensemble homogène et représentatif. Certaines parmi lesquelles telles que AI, HRW ou la FIDH, sont des poids –lourds de la défense des droits de l’Homme. Elles sont implantées dans de nombreux pays, ce qui leur donne la crédibilité et la visibilité.

A cette égard, les ONG peuvent entreprendre de s’engager dans la protection des droits de l’Homme à différents stades ou niveaux, et leurs stratégies vont varier en fonction de la nature et de leurs objectifs : d ordre spécifique ou général, inscrit dans le court ou le long terme, de portée locale, nationale ou internationale .

A cet effet, où se manifeste l’apport des ONG en matière des droits de l’Homme, et dans quelle mesure leur intervention favorise l’enracinement d’une protection efficace des droits et des libertés des individus au niveau international et national?

De cette problématique centrale dérive une série de questions :

         Dans le souci de répondre à ces questions, ce sujet sera traiter en deux nivaux ; l’action des ONG des droits de l’Homme d’une part et, l’importance du travail des ONG des droits de l’Homme d’autre part.

Chapitre 1 : L’action des ONG des droits de l’Homme.

             Les ONG des droits de l’Homme se distinguent d’abord par leur engagement direct dans les actions ou des opérations concrètes, sur le terrain, soit au niveau international ou au niveau national.

Section 1 : L’action des ONG des droits de l’Homme au niveau international.

      Le secrétaire général de l’ONU a souligné dans son rapport annuel, le rôle des ONG dans la protection des droits de l’Homme : « en s’appuyant à répondre aux aspirations de toutes les régions du monde en matière des droits de l’Homme, l’ONU se fonde sur le dévouement des ONG et sur le courage et l’abnégation de particuliers dans le monde ».

            Dans le cadre de cette communication, il sera question de cerner l’apport des ONG à  l’élaboration des normes et à leur mise en œuvre, d’une part, à la sensibilisation des populations à la culture démocratique à travers le droit, d’autre part.

            Les ONG peuvent jouer un rôle très important dans le développement du droit d’ingérence. Si l’on considère que leur atout principal est de ne pas disposer des mêmes prérogatives que les Etats, il est clair que les ONG disposent d’une plus grande marge de manœuvre que les Etats et les organisations intergouvernementales.

            Le rôle de certaines d’entre elles dans les wones sinistrees ou de conflit est considérable ; elles dispensent les soins médicaux nécessaires, distribuent l’aide alimentaire et autre : médecins sans frontière, médecins du monde, comite de la Croix- Rouge ou Comite International de Croissant Rouge, Association de droit suisse investie d’un large droit  d’intervention de type humanitaire[2] .

            Fréquemment, des ONG sont très étroitement associées à l’élaboration et la révision d’un statut ou d’un régime juridique régissant une activité donnée. C’est par exemple les travaux des programmes des Nations Unies pour l’environnement(PNUE) s’inspirent aussi largement de ceux des ONG compétentes en la matière[3] .

Notant que les ONG ont aussi un rôle consultatif, puisqu’ elles formulent à l’intention des organisations et conférences internationales auprès desquelles elles ont un statut d’observateur ou consultatif des avis et des propositions qui influencent l’action internationale dans la mesure ou elles sont assez souvent prises en compte[4] .

            La protection de l’humanité est parmi les objectifs des ONG, dans la mesure où le droit humanitaire et les droits de l’Homme sont lies. A cet effet, on peut donner l’exemple de CICR, en tant que « gardien du droit international humanitaire », qui peut : visiter les prisonniers de guerre ; apporter assistance aux populations des territoires occupés ; rechercher les personnes  disparues….

            Dans la même démarche Amnesty international milite notamment pour la libération des prisonniers d’opinion, pour l’abolition de la peine de mort et de la torture et l’arrêt des crimes politiques. Le travail d Amnesty International se base  sur sa vision du monde, un monde dans lequel toute personne jouit de l’ensemble des droits inscrits dans la déclaration universelle des droits de l’Homme et les autres textes internationaux relatifs aux droits humains.

            L’un des points dans lesquels AI mène également des actions est l’aide de l’assistance apportées aux  familles des prisonniers pour lesquels intervient et à ces prisonniers même. Cette organisation intervient auprès des gouvernements, des organisations intergouvernementales, des groupes politiques armés, des entreprises et d’autres agents non gouvernementaux.

            L’organisation mène des recherches systématiques et impartiales sur des cas individuels et des pratiques bien établies d’atteintes aux droits humains. Les résultats de ces recherches sont rendus publics, et les membres, les sympathisants et le personnel d’AI appellent l’opinion à faire pression sur les gouvernements ou d autres pour qu’il soit mis un terme à ces violences.

            Vis-à-vis ces actions, les ONG de décence des droits humains font désormais partie du jeu international. Elles ont acquis un statut et une place dans les organisations internationales et auprès de la délégation de certains  pays. Ce qui leur permit de dépasser le cadre national et d’exercer leur pouvoir de nuisance par le haut.

            Les Etats conservent le pouvoir de décision, mais ils ne peuvent empêcher les ONG de s exprimer et de participer à l’elaboration du droit international. Depuis la fin des années 1990, on a assisté à une montée en puissance des ONG : médiatisation des besoins, recours à  l’humanitaire apures des opérations armées…

           Les ONG disposent de plus en plus de compétences techniques, qui les rendent crédibles et leur permettent d’être consultées et écoutées lors des grandes réunions internationales.

            Depuis années 2000, de grandes entreprises privées signent des partenaires avec les ONG de façon à acquérir une vision plus globale de l’environnement mondial afin de disposer de compétences les aidants à mieux percevoir les attentes des consommateurs et des marchés. Ceci est plus perceptible dans le monde Britannique et Japonais.

            Les ONG qui amènent les gouvernements à s’occuper de certaines questions, à élaborer un discours, à entreprendre une action, elles tendent à contrôler l’agenda international[5]. Dans le même sens on ne peut pas nier l’action de certaines ONG au niveau national.

Section 2 : L’action des ONG des droits de l’Homme au niveau national : le  Maroc

             Si l on accord un tel intérêt aux ONG de décence des droits de l’Homme et de développement humain, c est en raison de l’importance quelles ont acquis au sein de la société marocaine. Il est impossible d’évoquer la question des droits de l’Homme et celle de développement humain sans considérer leur rôle.

            En effet, les ONG au Maroc sont devenues les vecteurs de ces thématiques .Cette importance analysée à l’aune de processus de démocratisation entrepris par l’Etat, fait que ce mouvement est devenue une de composantes majeures des « forces créatrices du droit », entendue ici comme forces sociales générant le droit par leur influence profonde sur le législateur, tel que théorisées par Georges Ripert[6].

            La question des droits de l’Homme au Maroc n’est pas stricto sensu liée à la naissance de ces organisations. Elle est apparue pour la première fois au sein du premier projet constitutionnel de 1908. Il faux dire que le début des années 90 est marqué par une véritable dynamique au sein de la société civile. Sur le plan interne,  les organisations des droits de l’Homme se sont coalisées pour élaborer la Charte Nationale des Droits de l’Homme  (CNDH) du 10 Décembre 1990.

Les droits de l’Homme ont donc été l’objet d’un long processus sociopolitique : contestations, revendications et répressions, négociation, institutionnalisation par le biais de la création d’un Ministère des droits de l’Homme en 1993, cogestion de certaines politiques publiques avec certains acteurs issus des ONG comme l’instance d’Equité et de Réconciliation.

            L’action des ONG des droits de l’Homme au Maroc s’inscrit dans le développement humain dans la mesure où le respect des droits de l’être humain constitue le fondement même du développement humain.

Dans cette logique que s’inscrit la création de l’OMDH en temps qu’ONG qui fait des propositions ou des revendications[7], notamment la lutte l’impunité selon plusieurs volets, le premier volet c’est la ratification de certaines conventions internationales ou protocole qui renforcent la lutte contre l’impunité y compris la cour pénale internationale, la convention internationale contre la disparition forcée et le Protocol optionnel relatif a la convention contre la torture .

En relation avec le code de travail, l’OMDH recommande entre autres la création d’un système d’indemnité pour le chômage, l’amélioration du pouvoir d’achat des saladiers par un ajustement des salaires.

Dans la même logique, on trouve l’AMDH qui a toujours été en première ligne  dans la lutte pour la protection des droits de l’Homme ainsi que pour le développement humain. L’un des principes adoptés lors du congrès de l’association de 1991 est « l’action de masse »  qui est une spécificité de l’AMDH. Selon ce principe, le versant économique, social et culturel des droits humains ne peut être défendu que si l’association a une assise sociale et une unité d’action. L’élargissement de la base est un des vecteurs de défense des droits économiques et sociaux, c’est pour cette raison qu’à l’intérieur de l’AMDH, il y a beaucoup de syndicalistes.

Ainsi, dans le domaine de la lutte contre la corruption TRANSPARANCY MAROC[8]  joue un rôle très important, il a procédé au lancement des enquêtes d’intégrité au Maroc. Le but de ces enquêtes est de sensibiliser le public sur la corruption aux niveaux national et régional, dégager les tendances de l’évolution du phénomène dans le temps, identifier les causes, les motivations et le degré d’acceptabilité des différentes pratiques de corruption. L’action de la dite ONG favorise la protection du droit à l’égalité des citoyens devant le service public.

Chapitre 2 : L’importance du travail des ONG des droits de l’Homme

Le rôle majeur joué par les ONG dans la défense des droits de l’Homme dans le monde entier se manifeste dans l’efficacité de leur intervention. Cependant, en dépit de leur activismes plusieurs critiques on été formulées contre les ONG.

Section 1 : L’efficacité d’intervention des ONG des droits de l’Homme

Les ONG peuvent entreprendre de s’engager dans la protection des droits de l’Homme à différents stades ou niveaux, et leurs stratégies vont varier en fonction de la nature de leurs objectifs: d’ordre spécifique ou général, inscrits dans le court ou le long terme, de portée locale, nationale ou internationale.

Dans le cadre d’assistance directe par exemple, il est très courant pour les ONG qui travaillent sur les droits de l’Homme de proposer un service direct aux victimes de violations de leurs droits. Ces services peuvent inclure des actions d’assistance humanitaire, de protection ou de formation pour le développement de nouvelles compétences. Dans le cas où le droit est protégé par la loi, les ONG peuvent aller défendre les victimes devant la justice ou leur fournir des conseils sur la manière de présenter leurs requêtes. Dans les cas ou l’assistance directe aux victimes de violations s’avère impossible, les ONG peuvent recourir à d’autres moyens afin de réparer les violations ou d’empêcher que d’autres, du même style, se reproduisent.

Dans ce cadre, les médias jouent généralement un rôle de premier plan dans les pratiques de pression; l’Internet est en train de s’octroyer dans ce domaine une place de plus en plus importante.

En plus, les ONG peuvent également envisager des réunions ou des briefings avec des responsables. Parfois, la seule menace de publicité suffit à provoquer des changements de politiques ou de pratiques.

D’une manière générale, plus grand est le soutien du public ou d’autres acteurs influents (par exemple, des gouvernements sympathisants), plus la campagne a de chances de parvenir à ses objectifs. Même si elles ne font pas toujours appel à ce soutien directement, les ONG peuvent s’assurer que leur message est entendu en évoquant la possibilité de mobiliser un large mouvement populaire contre une telle pratique qui menace les droits de l’Homme.

A titre d’exemple, l’action des membres et sympathisants d’Amnesty International a contribué  à changer le sort de nombreuses victimes des violations des droits de l’Homme. Des prisonniers d’opinion sont libérés, des condamnations à mort sont commuées (transformation de la peine de mort en réclusion perpétuelle), des tortionnaires sont traduits en justice, et des Etats peuvent être amenés à modifier leurs lois et leurs pratiques. Les personnes auxquelles Amnesty est venue en aide ont fait savoir que les pressions exercées sur les autorités avaient eu des effets positifs[9].

   Voilà ce que l’on peut lire sur la page des « Bonnes nouvelles » d’AI. Suit une liste de bonnes nouvelles pour les droits de l’Homme. Au Soudan, deux hommes, Ahmad Harun et Ali Muhammade Ali Abdelrahman, ont été inculpés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité pour des violations commises au Darfour.

En 1989, 1143 des 3376 personnes adoptées comme prisonniers d’opinion par Amnesty ont été libérées. La seule action d’une ONG, même connue et reconnue, ne suffit pas toujours à faire libérer un prisonnier. Mais ce peut-être le petit plus qui forcera les autorités à agir. En tout cas, les prisonniers reconnaissent souvent le rôle déterminant d’AI. Rôle déterminant sur le plan moral d’abord : les courriers encouragent à tenir le coup. Le prisonnier ne se sent pas seul.

De nombreuses ONG proposent aussi, généralement dans le cadre de leurs activités, des actions de sensibilisation ou d’éducation. Conscientes que le public constitue un soutien potentiel, elles tentent souvent de mieux informer ce dernier au sujet des droits de l’Homme. Une meilleure connaissance des droits de l’Homme et des moyens de les défendre est susceptible d’engendrer un plus grand respect à leur égard, mais aussi d’accroître les possibilités d’obtenir le soutien de certaines instances relativement aux violations commises. C’est ce soutien, du moins potentiel, qui se trouve à la base du succès remporté par la communauté des ONG dans son combat pour la cause des droits de l’Homme. Les exemples d’activisme couronnés de succès sont exemplaires dans certains Etats :

Les niveaux de violence domestique en Russie ont fait l’objet de plusieurs estimations; des chiffres suggèrent qu’entre 30 et 40% des familles en ont fait l’expérience. En 1995, après la Conférence sur les femmes tenue à Beijing, les premières statistiques fiables ont été publiées. Elles suggéraient que 14.500 femmes par an avaient été tuées par leurs maris et qu’environ 50.000 avaient été hospitalisées. La simple reconnaissance de ce problème en Russie a demandé d’énormes efforts qu’il faut, pour l’essentiel, attribuer à une ONG appelée ANNA, membre fondateur de l’Association russe des centres de crise pour femmes.

L’organisation a été créée par Marina Pisklakova, une des figures de proue de l’activisme en faveur des droits de la femme. En juillet 1993, elle a travaillé seule à la création d’une ligne téléphonique d’assistance aux femmes en détresse, puis elle a développé un centre de crise national pour les femmes. Elle a fait pression pour la mise en place d’une législation interdisant le viol et a travaillé avec un corps législatif hostile afin d’aider les victimes et d’engager des poursuites pénales. Elle a lancé une campagne médiatique pour sensibiliser à la violence à l’égard des femmes et éduquer ces dernières à leurs droits. Aujourd’hui, elle fait des apparitions régulières à la radio et à la télévision pour promouvoir le respect des droits des femmes.

 Durant l’été 1994, l’organisation a formé un premier groupe de femmes au conseil téléphonique et, en 1995, a commencé à travailler dans d’autres villes russes pour des groupes de femmes en train de voir le jour et désireux de mettre en place des lignes d’assistance ou des centres de crise. ANNA a contribué au développement de programmes d’aide psychologique et juridique pour les victimes de violence domestique[10].

Entre 1961 et 1976, plusieurs grandes firmes chimiques ont déversé plus de 114.000 tonnes de déchets industriels toxiques dans l’ancienne argilière de Bonfol, en Suisse. Interdit aujourd’hui par la loi, le déversement de déchets ne l’était pas en 1961 lorsque la décharge a été créée. Les déchets toxiques continuent de contaminer les proches communautés et l’environnement en libérant des polluants organiques et inorganiques.

Le 14 mai 2000, une centaine de militants de Greenpeace ont occupé la décharge de Bonfol, près de Bâle, en demandant que les “pollueurs” prennent la responsabilité du nettoyage du site. Les militants ont déclaré qu’ils occuperaient le site jusqu’à ce que les industries chimiques s’engagent à le nettoyer afin qu’il ne constitue plus un risque pour la santé humaine et l’environnement.

L’occupation du site de la décharge a contraint les industries chimiques à rencontrer des représentants des communautés proches et de Greenpeace. Finalement, les industries ont signé un accord selon lequel elles s’engageaient à démarrer le processus de nettoyage en 2001 suite à une étude qui devait se terminer en février 2001[11].

Global Witness (RU) est une organisation qui s’est donné pour mission de sensibiliser au lien entre l’exploitation de l’environnement et les violations des droits de l’Homme. Ce groupe basé à Londres a commencé à travailler en 1993. Il est parvenu à mettre en évidence le lien entre un commerce illicite de diamants et les guerres sanglantes en Afrique.

L’organisation a réuni des preuves pour convaincre les gouvernements, les Nations Unies et le public que les diamants illégalement extraits dans les zones de conflit en Afrique servaient à financer des guerres dans lesquels des enfants perdent leurs membres et meurent par milliers. Global Witness a exercé des pressions féroces pour amener les décideurs à entendre raison, en nouant des alliances avec d’autres ONG actives en Angola et en cultivant des relations avec des sympathisants politiques puissants, tels que l’ambassadeur canadien Robert Fowler, qui présidait le Comité des sanctions de l’ONU en Angola. Très vite, a assisté à une mobilisation internationale, capable de s’attaquer à une industrie mondiale[12].

En 1996, une ONG pour handicapés à Tuzla, en Bosnie-Herzégovine, a décidé de mener une campagne de sensibilisation aux problèmes rencontrés par les handicapés sur la voie publique. La dite organisation visait à éduquer le public sur les questions concernant les handicapés et les problèmes de circulation. Elle a alors identifié plusieurs objectifs concrets, dont des espaces de stationnement réservés aux handicapés, un meilleur accès aux transports publics et des trottoirs et des voies de circulation praticables. A partir de là, elle a organisé plusieurs manifestations le temps d’une semaine, juste avant les élections. A la fin de la semaine, le public avait pris conscience de ces divers problèmes et les trottoirs de Tuzla avaient été refaits et équipés de rampes.

Section 2 : Les critiques formulées contre les ONG des droits de l’Homme

Parmi les critiques formulées contre les ONG on peut citer celle destinée à l’égard d’Amnesty international, cette ONG est régulièrement accusée de traitement inégal, que ce soit entre des pays comme le Soudan et l’Arabie Saoudite et d’autres comme le Canada, les États-Unis.

Un des reproches qui revient souvent concerne ses critiques à la fois d’Israël et de l’État palestinien.

La section britannique d’Amnesty aurait pris position en faveur d’une décriminalisation de l’IVG[2] (dans le cas de viols ou de mise en danger de la vie de la mère), “dans la mesure où elles sont directement liées à son action pour le droit à la santé et contre la violence faite aux femmes”.

Cette prise de position a été condamnée par le Vatican par la voix du cardinal Renato Martino, président du Conseil pontifical Justice et Paix, qui a demandé à tous les catholiques et à toutes les institutions catholiques de ne plus accorder de soutien financier à ce mouvement[.

]Amnesty International a rappelé qu’elle ne recevait pas d’argent du Vatican, et que sa position ne consistait « pas à promouvoir l’avortement en tant que droit universel (…) Elle considère comme un droit humain le droit des femmes à ne subir ni terreur, ni menace ni contrainte quand elles font face aux diverses conséquences d’un viol ou d’autres violations graves des droits humains.

Les ONG de droits de l’Homme, à l’image de l’ensemble des ONG et de la « société civile internationale », sont loin de former un ensemble homogène et représentatif. Quelques ONG internationales, telle AI, HRW ou la FIDH, sont des poids-lourds de la défense des droits de l’Homme. Elles sont implantées dans de nombreux pays, ce qui leur donne crédibilité et visibilité. Cela ne les autorise pas pour autant à parler au nom de l’humanité[13]. A côté d’elles, des milliers de petites ONG se battent elles aussi pour les droits de l’Homme. Les ONG locales et internationales travaillent souvent ensemble. Au sein de réseaux, mais pas seulement. Les ONG internationales s’appuient sur les ONG locales pour obtenir informations et témoignages, et ainsi étayer leurs rapports. Quant aux ONG locales, elles dépendent souvent des ressources des ONG internationales. Passer par ces derniers est presque indispensable pour que leurs luttes soient répercutées sur la scène internationale. Le monde des ONG de défense des droits de l’Homme n’est pas plus égalitaire que celui de la société internationale. Les ONG ne bénéficient ni des mêmes ressources ni de la même représentation sur la scène internationale. C’est un monde hiérarchisé, où les élites dominent et où l’on retrouve le clivage Nord-Sud. Envoyer des délégations aux conférences internationales, des correspondants à l’étranger, accéder à l’information, rédiger des documents, les distribuer… Tout cela a un coût[14]. Un coût qui augmente quand les ONG militent dans une zone de crise. Coût physique cette fois : penser différemment peut valoir la mort.

L’inégalité n’empêche toutefois pas la solidarité transfrontalière. Solidarité compassionnelle du Nord diront certains, mais une solidarité qui peut sauver des vies. Lorsqu’un défenseur des droits de l’Homme, comme Laurent Kantou, est arrêté en République Démocratique du Congo pour avoir dénoncé les conditions de détentions dans une prison du pays, les ONG les plus puissantes ne restent pas passives. AI œuvre alors à sa libération en intervenant auprès du gouvernement, notamment. Par contre, entre ONG internationales, hors négociations internationales, la concurrence supplante souvent la solidarité. Survie oblige. Peut-être plus que les inégalités de ressources, les différences de cultures divisent le monde des ONG de droits de l’Homme. Les discours sur la démocratie ou les droits de l’Homme peuvent prendre des sens différents selon le lieu où ils sont prononcés. L’interdiction du travail des enfants, par exemple, n’est pas considérée pareille en Thaïlande qu’en France. En France, « travail des enfants » rime avec esclavagisme. En Thaïlande, il rime avec survie de la famille et peut éviter la prostitution des enfants. Le clivage n’est pas toujours Nord-Sud. Il peut être de nature religieuse, culturelle…

Certains Etats, dont la France, voient dans les ONG un possible instrument d’influence. Elles renforceraient la position de leur Etat de résidence dans le monde, elles en seraient de fidèles représentantes. Les dénonciations des ONG internationales peuvent être utilisées par les Etats pour déstabiliser un adversaire, rassembler des soutiens internationaux contre lui. Ce fut le cas lorsque Saddam Hussein ou Slobodan Milosevic sont devenus les ennemis publics numéros un. Les rapports des ONG internationales étaient brandis comme autant de preuve qu’il fallait agir contre eux. Au contraire, aucune action ne sera tentée contre un Etat avec lequel les hommes politiques ont intérêt à avoir de bonnes relations. En visite en Chine, ils se gardent bien de toute remarque. De même, lors des rencontres avec Vladimir Poutine, aucun mot n’est soufflé sur la Tchétchénie. Les exactions et leurs dénonciations sont passées sous silence. Lorsque les Etats veulent conserver de bonnes relations avec un gouvernement coupable, les rapports des ONG ont pour seule utilité d’informer l’opinion publique de ce qu’eux ne peuvent dénoncer publiquement. Il suffit ensuite de faire comme si de rien n’était. Ou bien d’agir et d’utiliser les informations comme des menaces. Les ONG peuvent apparaître comme de précieux bras accusateurs pour les Etats qui ne veulent pas se mouiller. De plus, les gouvernements recherchent presque tous la complaisance des ONG internationales. Chacun aimerait les avoir à ses côtés, aucun n’apprécie leurs critiques. Mais, elles sont difficilement corruptibles. Les ONG de droits de l’Homme alertent, dénoncent, tentent de mobiliser les médias et l’opinion publique. Elles fournissent des informations aux sociétés civiles et aux Etats.

  Conclusion :

Les ONG sont l’un des traits les plus marquants de notre époque, à tel point qu’elles sont devenues aujourd’hui un acteur incontournable dans le fonctionnement des sociétés. Elles émergent de plus en plus entant que force mondiale aux côtés des Etats et des entreprises, mai en  cherchant à remédier aux conséquences des politiques étatiques en matière des droits  de l’Homme, les ONG se trouvent dans une situation qui les rapproche davantage du pouvoir politique, ce qui risque de compromettre leur indépendance, d’ailleurs plusieurs auteurs parlent d’une ” crise d’identité des ONG”. On constate que de plus en plus fréquemment, d’anciens responsables des ONG entrent dans les sphères de l’Etat en acceptant des postes de hauts fonctionnaires ou même de ministres, de tels fonctionnaires se transforment souvent en d’âpres opposants à la société civile.

Un tel constat nous pousse à se demander si les ONG peuvent vraiment se prévaloir d’un pouvoir autonome.

Liste des sigles :

 

Bibliographie :

1 Informations de référence sur les droits de l’Homme, in le  Manuel pour la pratique de l’éducation aux droits de l’Homme avec les jeunes – Conseil de  l’Europe p : 335

[2] El Arbi Mrabet, Relations internationales, imprimerie Najah El Jadida, Casablanca, 1997, p : 45.

[3] Exemple : le rôle des ONG dans la préparation des documents soumis a la conférence de RIO dite Sommet de la terre du 3-14 juin 1992.

[4] El Arbi Mrabet, Relations Internationales, op-cit, p : 46.

[5] Marie-Claude Smouts, Les organisations internationales,  Armand Colin, Edition Paris1995, p : 178.

[6] Georges RIPERT, Les Forces Créatrices du droit, Paris LJDG, 1955.

[7] Amina Bouayach in police magazine, N 78 -79, Juillet – Aout 2011, p : 52 – 53.

[8] Transparence Maroc, «  La corruption au Maroc », Série Publications de l’université de la transparence,      2005, p : 17.

[9] L’action d’Amnistie Internationale (Faits et Chiffres). Rapport du 28 Mai 2003

[10] Voir le site web http://www.owl.ru/anna

[11] Voir le site de Greenpeace: http://www.greenpeace.org.

[12] Voir leur site web: http://www.globalwitness.org.

[13] Henri Rouillé D’Orfeuil, La diplomatie non gouvernementale : les ONG peuvent-elles changer le monde.  Paris : Les Editionsde l’atelier, 2006, p.96.

[14] Béatrice Pouligny, opt. citée, p.10.

 

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