Du crédit et transmission de la politique monétaire au Maroc:
Approches en données de panel
Melle EL KASMI Mariam – Doctorante Chercheur
Université Mohamed V-Rabat
Centre des Etudes Doctorales,
Faculté des Sciences juridiques, économiques et Sociales-Salé
Résumé :
Aujourd’hui, au Maroc comme dans d’autres pays émergents, l’analyse du canal du crédit présente un grand intérêt pour la banque centrale. Cet intérêt devient de plus en plus important dans un contexte où le crédit s’est accru fortement et les taux ont baissé considérablement ces dix dernières années. Dans cette étude nous tentons d’estimer empiriquement l’impact des orientations de la politique monétaire, mesurée par l’évolution des taux interbancaire, sur le crédit au secteur privé. Une modélisation dynamique en données de panel nous est apparue être un cadre adéquat pour analyser le canal du crédit. En effet, la structure de panel des données, permet, à la fois, de prendre en considération l’hétérogénéité entre les banques et d’exploiter plus d’informations disponibles dans l’échantillon. Les principaux résultats statiques auxquels nous sommes parvenus est que l’offre de crédit est déterminée empiriquement que par trois facteurs : le PIB non agricole, le taux d’intérêt et la taille bancaire. En dehors de ces facteurs, tous les autres facteurs identifiés ne semblent pas expliquer l’offre de crédit, en particulier, les autres variables de bilan bancaire.
Mots clés : canaux de transmission, canal du crédit, économétrie de panel, effet fixe, effet variable.
Introduction :
La politique monétaire constitue la principale composante de la politique économique qui permet aux autorités monétaires d’agir sur la sphère réelle et de changer les variables macroéconomiques. Toutefois, l’effet de la politique monétaire sur l’économie résulte de l’efficacité des canaux de transmission de cette dernière et de la capacité des autorités monétaires à déterminer la capacité optimale des canaux de transmission des chocs monétaires. La baisse du taux d’intérêt doit être conjugué à une reprise des activités économiques, de la croissance et de l’emploi tandis que la hausse de ce dernier doit concorder à l’objectif final fixé, c’est-à-dire le contrôle de l’inflation ou la stabilité des prix.
Les canaux de transmission représentent les relations spécifiques par lesquelles les chocs monétaires se répercutent sur l’activité économique et, principalement, sur le niveau des prix. Ils sont variables d’une économie à l’autre et changent au sein d’une même économie en fonction des changements structurels. Ceci entraîne un changement dans leur capacité de transmission monétaire[1].
L’analyse des canaux de transmission est primordiale pour les banques centrales car elle étudie l’efficacité de leurs décisions. Ainsi, depuis les années 90, les banques centrales se sont interrogées sur le changement des cycles de transmission de la politique monétaire.La problématique des canaux de transmission est de savoir comment les impulsions monétaires décidées par la banque centrale affectent-elles l’ensemble du secteur financier et du secteur réel de l’économie ?
L’approche traditionnelle de transmission de la politique monétaire qualifié de « money view », s’expliqué par des adaptations de portefeuille des agents, c’est-à-dire, des ajustements entre monnaie et actifs financiers du fait que les crédits bancaires sont considérés de parfaits substituts aux titres. Cette adaptation pourrait engendrer une modification dans la structure des taux d’intérêt et donc un changement de l’investissement et avec le mécanisme du multiplicateur d’investissement, un accroissement de la demande globale et de la production.
Outre le canal traditionnel du taux d’intérêt, le débat a développé trois autres canaux de transmission de la politique monétaire : le canal du crédit, le canal du taux de change et le canal des prix d’autres actifs. Au cours des années 90, le canal du crédit a fait l’objet à une abondante littérature théorique et empirique dans le cadre d’une asymétrie informationnelle des marchés des capitaux et des crédits. Il est présenté souvent comme un canal de transmission complémentaire, qui vient renforcer l’action du canal monétaire traditionnel : dans une économie bancarisée, les modifications de taux directeurs modifient les conditions de refinancement des banques sur les marchés financiers.
Plus précisément, un renforcement des conditions de refinancement des banques pèse sur leur activité de création monétaire, sur leur distribution de crédit et donc sur l’investissement des entreprises et la consommation des ménages. C’est ainsi que cette étude va mettre l’accent sur le rôle de l’octroi de crédit dans la transmission des impulsions monétaires.
Au Maroc, il est à rappeler que la politique monétaire a connu un renouveau depuis la fin des années 80 en accompagnant les innovations du paysage financier et en se basant désormais sur un mode de contrôle indirect. L’action sur la masse monétaire se traduit par des interventions de Bank Al Maghreb sur les contreparties de la masse monétaire, à savoir : les crédits à l’économie, les avoirs extérieurs et les créances sur le trésor. C’est ainsi, la politique de crédit revêt une importance majeure, puisque, l’essentiel de la création monétaire trouve son origine dans les activités de distribution des crédits par les banques.
L’étude de l’efficacité du canal de crédit au Maroc reste toujours été d’actualité. A ce titre, plusieurs études empiriques ont été menées pour évaluer la capacité de la banque centrale à atteindre son objectif, stimuler la croissance et l’emploi ou contrôle de l’inflation et la stabilité des prix, et à déterminer l’attitude potentielle des canaux de transmission.
Il est à signaler que les canaux de transmission de la politique monétaire se sont modifiés avec la déréglementation et la libéralisation. Au canal traditionnel par les taux d’intérêt, s’ajouterait un autre canal dit « lendingchannel » qui vient renforcer le canal du taux d’intérêt. Dans cette étude nous tentons d’estimer empiriquement l’impact des orientations de la politique monétaire, mesurée par l’évolution des taux interbancaire, sur le crédit au secteur privé.
Dans cette optique, cette étude sera articulée autour de deux axes. Un premier dont lequel nous mettrons l’accent sur le contexte et l’évolution de la politique monétaire au Maroc, l’évolution du crédit au Maroc et aux fondements théoriques et empiriques sur le canal de crédit. Le deuxième axe détaillera la méthodologie et les différentes approches d’estimation pour analyser la dynamique de crédit dans la transmission de la politique monétaireavec les deux modèles retenus. Dans cet axe on va s’intéresser à étudier empiriquement la dynamique de crédit dans la transmission de la politique monétaire à travers les deux approches statique et dynamique en données de panel.
Au Maroc, la politique monétaire a connu un renouveau depuis la fin des années quatre vingt en accompagnant les innovations introduites dans le paysage financier et en se basant désormais sur un mode de contrôle indirect.
L’action sur la masse monétaire se traduit en fait par des interventions de la banque centrale marocaine (Bank Al Maghreb, BAM) sur les contreparties de la masse monétaire, c’est-à-dire, les crédits à l’économie, les avoirs extérieurs et les créances sur le trésor. Mais, la politique de crédit revêt une importance majeure au Maroc, puisque, l’essentiel de la création monétaire trouve son origine dans les activités de distribution des crédits par les banques.
Jusqu’à la fin des années quatre vingt, la politique monétaire était construite autour d’une série d’instruments de contrôle direct des crédits. Ces instruments avaient pour but de contrôler les liquidités excédentaires des banques et leur capacité de création de la monnaie. Les actions de la banque centrale auprès des banques commerciales, prenaient diverses formes :
l’encadrement du crédit : L’encadrement du crédit, appliqué en 1969, consistait à limiter l’extension des capacités des banques à octroyer des crédits en leurs fixant un taux maximum d’expansion au cours d’une période donnée. L’encadrement du crédit avait pour objectif de limiter la progression des crédits, en fonction du taux de croissance prévu des autres contreparties de la masse monétaire. L’encadrement du crédit, a été abandonné en 1991 au profit d’une intervention indirecte par les taux[2].
Les emplois obligatoires :Les emplois obligatoires sont constitués des réserves obligatoires non rémunérées et d’un ensemble de portefeuilles.
Les réserves obligatoires : En tant qu’instrument de politique monétaire, les emplois obligatoires sous forme de réserves ont pour objectif final de limiter les liquidités bancaires et donc leurs capacités à transformer leurs disponibilités en crédit. Les réserves obligatoires sont des avoirs liquides, constitués en général de monnaie centrale, que les banques doivent conserver dans leurs actifs (obligation réglementaire). Ces réserves sont calculées au Maroc en proportion de dépôts à vue gérés par les banques (généralement entre 10 % et 15 %).
Les autres emplois obligatoires : Par cette action, de manière contraignante, BAM orientait une partie des ressources bancaires vers le financement de secteurs économiques particuliers ou encore vers le financement de l’Etat en poussant les banques à acheter un ensemble de titres de créance. Sur une longue liste de ces emplois obligatoires, deux exemples ont particulièrement été utilisés jusqu’en 1994, date d’abandon de ce type d’interventions de BAM. Il s’agit des bons de trésor à un an et les bons de caisse de la Caisse nationale du crédit agricole à un an. Ces emplois permettaient à BAM d’orienter les ressources des banques, par exemple, vers le trésor public (bons de trésor à 1 an).
Le réescompte : A travers cette opération, BAM assurait le refinancement des banques marocaines. Elle consistait à réescompter auprès de la banque centrale les crédits à court termes mobilisables (effets de commerce[3]) que les banques consentaient à leurs clients. Le réescompte était soumis à un plafond et le taux[4] appliqué était déterminé de manière unilatérale par la banque centrale. Ce taux influençait directement l’ensemble des taux d’intérêt puisqu’il déterminait les conditions de crédit appliquées par les banques aux entreprises (lorsque le taux de réescompte de BAM est élevé, les taux appliqués par les banques à leurs clients est élevé) Avec l’apparition de nouvelles formes de refinancement des entreprises (marché monétaire), la technique du réescompte est devenue obsolète. Elle a été abandonnée au Maroc en 1995[5].
Avec l’abandon de l’encadrement du crédit et du refinancement des banques par le réescompte et parallèlement avec le développement et l’ouverture du marché monétaire, des banques centrales ont adopté une approche indirecte pour le contrôle de la masse monétaire. Cette approche privilégie l’action par le taux d’intérêt.
Pour assurer la stabilité des prix, objectif prioritaire parmi les missions que lui confère son nouveau Statut, la Bank Al-Maghreb a adopté un cadre stratégique axé sur le marché monétaire. S’agissant des interventions, la banque centrale vise à influencer le taux interbancaire en ayant recours à un ensemble d’instruments constituant le cadre opérationnel de la politique monétaire.
En gérant le niveau de liquidité sur le marché monétaire interbancaire, Bank Al-Maghreb détermine l’évolution du taux interbancaire qui, dans des délais plus ou moins longs, influence les autres taux d’intérêt, les conditions d’offre et de demande de crédit et de monnaie dans l’économie, ainsi que les autres variables financières que les agents économiques prennent en considération préalablement à la prise de décision.
La nouvelle politique monétaire au Maroc est désormais axée sur des opérations à l’initiative de BAM et des opérations à l’initiative des banques. L’efficacité du cadre opérationnel de la politique monétaire est renforcée par l’obligation du maintien par les banques de disponibilités en compte auprès de la banque centrale au titre de la réserve monétaire.
Les opérations à l’initiative de Bank Al-Maghreb [6]:
- Les opérations principales :
En vue d’injecter des liquidités et orienter le taux interbancaire vers le niveau cible la banque centrale utilise des avances à 7 jours sur appel d’offres, principal moyen de refinancement des banques. A l’inverse, les reprises de liquidités à 7 jours sur appel d’offres, principal instrument de retrait des liquidités excédentaires, lui permet d’atténuer les pressions à la baisse du taux interbancaire en situation d’abondance de liquidité.
- Les opérations de réglage fin :
D’autres interventions à l’initiative de la Banque sont prévues, telles les opérations d’open market, de swap de change et de pension livrée, utilisées comme mécanismes de réglage fin de la liquidité bancaire.
Les opérations à l’initiative des banques : Certaines variations imprévues de la demande ou de l’offre sur le marché monétaire peuvent avoir lieu au cours d’une même journée. Ces variations peuvent se traduire par un écart significatif entre le taux interbancaire et le niveau souhaité par BAM. Aussi, BAM a-t-elle mis en place des facilités permanentes à la disposition des banques, afin de faire face à un besoin ponctuel de liquidité ou de placer un excédent de trésorerie. Il s’agit des avances à 24 heures et des facilités de dépôt à 24 heures.
La réserve monétaire : La réserve monétaire permet à Bank Al-Maghreb d’augmenter les besoins des banques en monnaie banque centrale. Bank Al-Maghreb impose à ce titre aux banques de conserver sur leurs comptes courants auprès d’elle une proportion de leurs exigibilités.
Les principales réformes du secteur bancaire marocain
Le système bancaire marocain a connu, au cours de la dernière décennie, de profondes réformes d’une ampleur exceptionnelle, issues principalement des effets de la globalisation financière qui a impacté son fonctionnement et sa stabilité tout en s’interrogeant sur l’équilibre économique de notre pays, en vue d’une insertion assurée dans l’économie mondiale
L’exercice de l’activité bancaire, qui n’était régi par aucune réglementation, a été structuré pour la première fois en 1943, par la promulgation du dahir du 31 Mars concernant la réglementation et à la structuration de l’activité bancaire. Le champ d’application des textes susvisés ne concernait que le territoire sous protectorat français, la région sous occupation espagnole et la province de Tanger qui disposait d’un règlement spécifique[7].
Au lendemain de l’indépendance du Maroc en 1956, les soubassements opérationnels d’un système bancaire ont été mises en place. Ainsi, la Banque du Maroc a été crée le 30 juin 1959 pour se substituer à la Banque d’Etat du Maroc et assurer la fonction de Banque Centrale. BAM est créée sous forme d’établissement public avec une personnalité civile et une autonomie financière, et ayant le privilège de l’émission de la monnaie fiduciaire, ainsi que la mission de veiller à la stabilité de la monnaie et de s’assurer du bon fonctionnement du système bancaire.
Il faut rappeler qu’afin de répondre aux objectifs de développement de financement spécifiques à des secteurs économiques jugés prioritaires, l’Etat a crée des organismes financiers spécialisés et a procédé à la restructuration de certaines institutions existantes. Ainsi, furent créés, en 1959, la Caisse de Dépôt et de Gestion (CDG), le Fonds d’Equipement Communal (FEC), la Caisse d’Epargne Nationale (CEN), la Banque Nationale pour le Développement Economique (BNDE) et la Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE). L’année 1961 a vu la restructuration du Crédit Agricole et du Crédit Populaire[8].
A partir de juillet 1993, une réforme principale de l’exercice de l’activité des établissements de crédit et leur contrôle, a introduit la banque universelle. En vertu de cette loi, les banques peuvent exercer et commercialiser l’ensemble des produits et services bancaires. Cette banque annule la spécialisation entre les banques commerciales et les organismes financiers spécialisés. Après, un ensemble de textes juridiques, qui visent l’ouverture internationale du secteur financier marocain et son environnement, ont suivi entre 1993 et 2003.
Afin de rapprocher encore la législation marocaine des normes internationales et principalement du comité de Bâle, deux nouvelles lois, l’une portant sur le statut de Bank Al-Maghreb et l’autre, relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, ont été promulguées respectivement le 23 novembre 2003 le 14 février 2006. Elles ont permis au système bancaire marocain plus ouverture internationale.
Cette réforme du paysage financier a stimulé la concurrence entre des établissements financières. Ainsi, le Maroc aujourd’hui n’en compte plus que 14 banques, dont une part importante reste sous le contrôle de l’Etat. Finalement, il est à noter que l’activité principales des grandes banques privées restent la distribution des crédits.
Dans le schéma de base présenté par le modèle IS/LM, la transmission des impulsions monétaires se fait via le taux d’intérêt. Dans le cadre d’une politique monétaire expansionniste, le taux d’intérêt baissera ; il y aura donc une réduction du coût du capital, une croissance des dépenses d’investissement et finalement un accroissement de la demande globale et de la production[9].
Donc cette analyse macro économique standard, ignore le rôle du crédit bancaire dans la transmission de la politique monétaire puisqu’elle n’intègre pas le marché du crédit indépendamment du marché monétaire.
2.1 Présentation des principales typologies du canal crédit :
Bernanke et Blinder (1988) ont analysé l’intégration du marché de crédit. Ils ont développé le modèle IS-LM basé sur une intégration du marché de crédit, constitué des offreurs et des demandeurs de crédit. Ils ont montré que le canal du crédit a un effet direct sur dynamique macroéconomique en tenant compte des problèmes d’asymétrie d’information[10]. Il ont soulevé que l’interaction du marché, monétaire et de crédit change les mécanismes de transmission de la politique monétaire analysés dans le cadre du canal du taux d’intérêt[11].
C’est ainsi qu’une nouvelle approche des mécanismes d’ajustement de la politique monétaire s’est développée, qui se base sur l’asymétrie d’information sur les marchés de capitaux. Les banques jouent un rôle spécifique dans l’orientation des capitaux de la sphère financière vers la sphère réelle, elles sont spécialement bien placées pour gérer les problèmes d’asymétrie d’information sur les marchés de crédit.
Il faut rappeler qu’il existe deux canaux de transmission de la politique monétaire qui résultent des problèmes d’information sur le marché de crédit : le canal étroit du crédit et le canal large du crédit.
Canal étroit du crédit : Dans le cadre du canal étroit du crédit, les banques jouent un rôle déterminant dans le processus de financement par l’intermédiaire de l’octroi de crédit. Désormais, le système bancaire n’est plus neutre dans la transmission de la politique monétaire.
L’actif et le passif des bilans des banques doivent être considérés de façon symétrique. Il développe l’hypothèse d’imperfections sur le marché des crédits et, plus généralement, sur les marchés des capitaux. L’existence de ces imperfections pèse sur les structures financières des entreprises, sur leurs possibilités et sur leurs décisions de financement et sur leurs comportements de stockage[12].
Bernanke et Blinder (1988), ont orienté le développement de l’approche théorique de cette courroie de transmission avec leur modèle IS/LM “augmenté” du crédit bancaire. Il s’agit d’un modèle néo-keynésien d’économie fermée à prix fixes, comprenant trois actifs, la monnaie, le crédit et les titres obligataires. Le principal résultat énoncé est qu’une imparfaite substituabilité entre titres et crédits provoque une amplification systématique des chocs de politique monétaire par rapport au canal IS/LM traditionnel.
Le canal large du crédit : La littérature a également développé le canal large du crédit ou canal du bilan. Le canal large du crédit met l’accent sur le rôle particulier des banques par rapport aux autres intermédiaires financiers et repose sur une imparfaite substitution entre les moyens de financement internes et les moyens de financements externes. La différence de coût entre le financement externe et l’autofinancement est appelée la prime de financement externe[13].
Un financement externe qui n’est pas garanti par des collatéraux peut être plus coûteux que le financement interne ce qui augmente la prime de financement externe. Le canal large du crédit opère comme un canal de transmission lorsque la banque centrale a les moyens d’influencer la situation financière des emprunteurs. Un choc de politique monétaire qui augmente ou baisse le taux d’intérêt fait varier la prime de financement externe dans le même sens.
Kashyap et Stein (1993) présentent les conditions nécessaires à l’opérationnalisation d’une transmission particulière via le crédit bancaire. En premier lieu, les crédits bancaires et les obligations ne doivent être tout à fait substituables pour les entreprises ; c’est à dire, certaines entreprises ne peuvent emprunter plus sur les marchés directs lors d’une baisse du crédit bancaire. En deuxième lieu, la conduite de la politique monétaire doit pouvoir impacter le comportement bancaire en terme de distribution de crédit. Autrement dit, les banques ne peuvent séparer leur octroi de crédit des changements issus sur leurs réserves.
En troisième lieu, l’équilibrage via la structure des prix doit être imparfait pour que la politique monétaire soit non neutre puisque. Ainsi, si les prix s’ajustaient aussitôt, il n’y aurait pas d’impact réel de la politique monétaire, ni par la “money channel” ni par la “credit channel“. Du fait que ces deux processus de transmission de la politique monétaire, passent par le canal du taux d’intérêt réel. La spécificité réelle s’explique par l’hypothèse de la rigidité des prix qui joue un rôle primordial dans la transmission de la politique monétaire selon cette approche[14].
Cependant, une politique monétaire expansionniste peut d’augmenter le niveau des prix attendus et donc l’inflation anticipé ce qui engendre une baisse des taux d’intérêts réels et des dépenses supplémentaires. Et vice versa en cas de contraction de la masse monétaire même avec un taux nominal faible la politique monétaire demeure efficace. Dans le cas où les prix s’ajustent instantanément, un changement du stock de monnaie se répercuterait sur les prix et les encaisses réelles resteraient stables[15].
3.2 Synthèse de la littérature empirique
Depuis les années 1980, le canal du crédit a fait l’objet d’une importante littérature empirique, où les différents courants ont essayé de démontrer le rôle principal du crédit bancaire. Ses soubassements théoriques ne constituent pas tellement un corpus théorique unifié et les arguments micro-économiques avancés peuvent changer d’une étude à l’autre.
L’analyse des impacts de base de la politique monétaire que soulève le modèle IS-LM de base sert ainsi de référence, mais le crédit bancaire n’est déterminé en tant que tel. Il y a une seule principale source de financement, les obligations, ce qui revient implicitement à considérer la substituabilité parfaite entre titres et crédit.
En cas de resserrement monétaire, ou contraction des réserves bancaires, les banques peuvent en augmentant leur demande de dépôts non soumis à réserves obligatoires, ou bien en recourant à une émission de titres, d’où un renchérissement des taux d’intérêt. Cette augmentation des taux d’intérêt, en minimisant l’investissement, produit un effet réel. Dans ce raisonnement, le comportement des banques, en réaction à une modification de la politique monétaire ne se limite alors que leur passif. La composition de l’actif ne semble pas impactée.
Les études empiriques ont été abondantes, certaines tentent de montrer l’impact du crédit dans la transmission de la politique monétaire sur la dynamique macroéconomique et d’autres essaient d’analyser le processus de transmission et de traiter la réponse du crédit bancaire aux chocs monétaires, en se basant sur les performances de bilan bancaire.
Dans la lignée des travaux utilisant les indicateurs de bilan bancaire, Smal (1995) constatent que les petites banques aux Etats-Unis réagissent plus fortement que les grandes banques suite à des chocs monétaires. Les petites banques sont supposées porter davantage de problèmes résultant de l’asymétrie de l’information entre l’emprunteur et le prêteur[16].
L’approche basée sur les bilans bancaires, peut refléter un comportement distinguée du crédit, vis-à-vis les réponses de la banque centrale selon la taille bancaire. Pour capturer l’impact des spécificités bancaires sur la transmission de politique monétaire via le canal du crédit, Rosengren (1995) et Kishan (2000) s’est basé sur la capitalisation bancaire tandis que Kashyap, (2000) s’est tourné vers la liquidité bancaire.
Sichei (2005) a analysé le canal du crédit dans la transmission de la politique monétaire en Afrique du Sud, en se basant un modèle dynamique en données de panel. Il a montré que le canal du crédit est opérationnel et que l’effet conjoint de la politique monétaire et les variables de bilan bancaire est relativement positif ce qui implique que les banques ayant de forts bilans (ratio capital-actif) peuvent amortir les effets du resserrement de la politique monétaire.
García et Alejandro Jara (2003), ont analysé en données de panel, le canal du crédit et la transmission da la politique monétaire pour le Chili durant la période 1999-2002. Ils ont obtenu les mêmes résultats concernant l’existence d’un canal du crédit. Ils ont estimés premier lieu, un modèle dynamique en données de panel, pour analyser les changements de comportement de crédit suite à des chocs monétaires. Deuxièmement, en prenant en considération les éléments de preuve recueillis à l’étape précédente, ils ont construit une variable globale visant à capturer les principales forces derrière le canal du crédit bancaire, et ils ont estimé un modèle VAR pour tester si le canal du crédit exacerbe l’effet d’un choc de politique monétaire sur l’activité macroéconomique[17].
A la lumière de cette, principalement ceux utilisant l’économétrie de panel pour approfondir l’analyse du canal du crédit et pour tenir en compte le rôle des caractéristiques bancaires dans le processus de transmission de la politique monétaire, nous optons pour le cas du Maroc, adopter une modélisation statique en données de panel.
Avant de détailler les spécifications des différentes approches adoptées pour analyser la dynamique de crédit dans la transmission de la politique monétaire au Maroc, il semblait judicieux de justifier le choix des variables servant à déterminer l’offre du crédit bancaire au Maroc. Il est difficile de distinguer entre les déterminants de demande et les déterminants d’offre de crédits. En effet, le crédit observé est le résultat de l’interaction entre des facteurs d’offre et des facteurs de demande, sans qu’il soit possible de distinguer entre les contributions de chaque effet. Pour contourner cette difficulté, nous nous sommes appuyés sur les facteurs énoncés dans l’enquête annuelle sur les conditions d’octroi de crédit conduite par la Direction de Supervision Bancaire et sur les facteurs qui ressortent de la littérature traitant la dynamique de crédit dans la transmission de la politique monétaire.
Tout au long du cycle économique, les banques doivent régulièrement prendre des décisions concernant le resserrement, le maintien ou l’assouplissement de leurs conditions d’octroi de crédit. Les banques agissent sur ces conditions en se basant sur plusieurs facteurs comme leur perception du risque, leur accès à la liquidité, la pression concurrentielle, et les contraintes pesant sur leurs sources de financement.
Par ailleurs, l’offre de crédit est influencée par le degré de concurrence sur le marché bancaire, ainsi que par les stratégies de croissance déployées par les groupes bancaires. Dans l’enquête sur le crédit réalisée par la DSB en 2012, la plupart des banques déclarent que l’intensification de la concurrence est un facteur qui a contribué de manière déterminante à la détente des conditions du crédit. Cette concurrence sur le marché bancaire est d’autant plus accentuée que la taille est importante. Plus les banques sont de taille importante, plus elles sont concurrentielles et profitent d’économies d’échelle et plus les volumes distribués sont élevés.
En ce qui concerne les autres facteurs qui influent l’offre de crédit, toutes les études analysant la dynamique de crédit et transmission da la politique monétaire, comprennent également une variable de politique monétaire qui permet de capter l’effet des réactions des banque centrale sur l’offre de crédit.
Dans ce qui suit, on ca mettre l’accent sur l’évolution du crédit privé au Maroc avec les principaux déterminants qui ressort de la littérature et ceux qui se sont énoncés dans l’enquête annuelle sur les conditions d’octroi de crédit conduite par la DSB.
3.1 Analyse des données
Afin de mettre en évidence les déterminants de l’offre de crédit en vue d’analyser sa dynamique dans la transmission de la politique monétaire au Maroc, les variables doivent être choisis de façon pertinente et approfondi. Les données sont semestrielles, analysées en variation annuelle et s’étalent sur la période 2000-2012.
Pour la série du crédit bancaire au secteur privé, elle a été construite à partir des données de Bank Al Maghreb et elle correspond aux crédits bancaires offerts au secteur privé par les banques commerciales. La série du crédit bancaire réel a été obtenue en délattant la série nominale par le taux d’inflation disponible dans la base de données de BAM.
Dans cette étude, on a approché l’activité économique par le PIB non agricole. Cet indicateur regroupe l’ensemble des secteurs d’activités économiques au Maroc à l’exception du secteur agricole. La série réelle a été obtenue en délattant la série nominale par le taux d’inflation fournie par la base de données de BAM.
Pour étudier les mécanismes de propagation de la politique monétaire au Maroc, on s’est intéressé à une panoplie de taux d’intérêt pour mesurer l’effet des impulsions monétaires sur l’offre de crédit: le taux directeur, le taux cible, le taux moyen pondéré interbancaire et le taux d’intérêt des obligations publiques. Finalement on a retenu le TMP, qui représente le taux piloté par les interventions de la banque centrale sur le marché interbancaire en vue de contrôler la liquidité, et les taux des bons de Trésor, qui constituent les taux sur le marché obligataire publique.
Concernant les variables caractéristiques bancaires, on a retenu quatre variables qui vont permettre de tenir en compte les effets des bilans bancaires dans la transmission de la politique monétaire via le canal du crédit : la capitalisation bancaire mesurée par la part des la part des fonds propres dans le passif, la liquidité bancaire mesurée par le solde des comptes bancaires, les dépôts mesurées par les dépôts sur le total passif et la taille bancaire approchée dans cette étude par la part des actifs bancaires dans le total des actifs du système bancaire.
Afin d’identifier les déterminants de l’offre de crédit dans le cadre de transmission de la politique monétaire au Maroc, des séries des tests de causalités uni et bidirectionnelle entre les variables ont été mise en œuvre. Le principe de ce test est comme suit : il s’agit de sélectionner, grâce à la statistique de Fisher, les variables qui apparaissent comme les plus significatives, au sens de Granger, par rapport aux autres.
Rappelons que dans le test de Granger, X « Granger-cause » Y, si Y peut être mieux prédit à partir du passé de Y et de X plutôt qu’à partir du seul passé du Y[18].
Sur la base des résultats du test de non causalité de Granger, présenté dans le tableau 2 (voir annexe), il vient que le PIB non agricole, présente un pouvoir explicatif sur l’offre de crédit. Ce résultat empirique est aussi vérifié pour le taux moyen pondéré interbancaire, le taux des bons de Trésor à 5 ans, la taille bancaire, la liquidité bancaire et les dépôts, tandis que le résultat obtenu à partir du test de non causalité de l’offre de crédit par la taille bancaire, montre qu’il n’existe aucune relation de causalité de l’offre de crédit par la capitalisation bancaire.
L’examen des coefficients de corrélation entre l’offre de crédits et les différentes variables présentés au-dessus, vient compléter l’analyse de causalité de Granger. Les résultats du test montrent la présence d’une corrélation positive entre l’offre de crédit avec le PIB, la taille bancaire, la capitalisation, les dépôts et la liquidité bancaire, tandis que le résultat obtenu pour le TMP et le taux des bons de Trésor à 5 ans, montre une relation négative avec l’offre de crédit, ce qui conforme avec la théorie et avec les relations prouvées dans les travaux empiriques (voir tableau n° en annexe).
3.2 Etude de stationnarité des séries étudiées[19]
Après l’identification des déterminants de l’offre de crédit dans le cadre de la transmission de La politique monétaire au Maroc, on tente dans cette partie d’étudier la stationnarité des séries étudiées. Mais il faut d’abord signaler que les différentes approches adoptées dans ce travail, portent sur les données de panel.
Ce choix trouve sa justification dans le fait que l’ajout de la dimension individuelle permet d’accroître le nombre de données en incluant l’information relative à des banques différentes et mener ainsi une analyse multi-individuels, donc cette structure de données permet de mieux rendre compte de l’hétérogénéité des comportements, qu’elle soit observée ou non observée.
Dès lors, dans ce contexte, le fait d’utiliser des approches en données de panel au lieu des séries temporelles ne relève plus d’un choix, mais relève d’avantage d’une nécessité liée à la prise en compte de ces facteurs. Après ce prélude sur les tests de racine unitaire en données de panel, on s’intéressera dans cette partie à présenter les résultats, rapportés dans le tableau n° (voir annexe) , sur les résultats des trois tests de racine unitaire cités ci-dessus.
Test de Levin, Lin et Chu : Ce test montre que l’hypothèse nulle de l’existence d’une racine unitaire pour l’ensemble des banques, est rejetée pour toutes les séries étudiées. Ce qui justifie le fait que l’hypothèse d’homogénéité de la racine autorégressive et par conséquent l’homogénéité de la conclusion quant à la présence d’une racine unitaire dans la dynamique des variables est rejetée. Ceci nous laisse conclure que les séries sont stationnaires pour l’ensemble des banques constituant le panel.
Test de Im, Pesaran et Shin : Une des principales limites su test de Levin, Lin et Chu réside dans le caractère homogène de la racine autorégressive sous l’hypothèse alternative. Les tests proposés par Im, Pesaran et Shin dans une série de contributions (1997, 2002, 2003) permettent de répondre à cette critique. Sous l’hypothèse alternative il peut coexister deux types d’individus : des banques pour lesquelles sont stationnaires et d’autres banques pour lesquelles la dynamiques des variables admettent une racine unitaire[20].
Le résultat rapporté dans le tableau 4 montre qu’il existe deux types de séries :
- Des séries admettant une racine unitaire sur tout le panel : l’offre de crédit, le PIB non agricole et la liquidité bancaire.
- Des séries admettant une racine unitaire pour certaines banques et stationnaires pour d’autres banques : TMP, BDT à 5 ans, la taille bancaire, dépôts et la capitalisation.
Test de Hadri : Se démarquent des deux tests de racine unitaire de première génération présentés ci-dessus qui reposaient sur l’hypothèse de non stationnarité, le test de Hadri (2002) est basé sur l’hypothèse nulle de stationnarité des séries pou tous les individus contre l’hypothèse alternative de racine unitaire. Les résultats montrent que les séries étudiées sont tous stationnaires selon le test de Hadri[21].
L’ajout de la dimension individuelle à la dimension temporelle usuelle présente un intérêt important pour l’analyse de la stationnarité des séries. Les tests de racine unitaire et de sur données de panel temporelles sont en effet plus puissants que leurs analogues sur séries temporelles individuelles en petit échantillon parce qu’ils permettent la prise en compte de l’hétérogénéité individuelle. Les résultats obtenus pour les séries étudiées, diffèrent selon le test utilisé mais généralement pour étudier la stationnarité en données de panel dans le cadre d’estimation d’un VAR en données de panel se base sur le test de Test de Levin, Lin et Chu
4. Spécification des modèles
Les meilleurs estimations en statique nous a permis de retenir comme variables explicatives : la taille bancaire le PIB non agricole, et trois mesures de la politique monétaire : TMP, le taux des BDT à 5 ans et le taux cible. Les données sont semestrielles, analysées en variation annuelle et s’étalent sur la période 2000-2012. Les données individuelles concernent 8 banques marocaines et représentent à elles seules plus de 80% du total actif du secteur bancaire.
Ce travail portera donc sur la modélisation du niveau du crédit privé réel en utilisant comme variables explicatives: le PIB non agricole réel (une mesure de l’activité), la taille bancaire et trois mesures de la politique monétaire : le TMP, le taux des BDT à 5 ans et le taux cible pour identifier l’effet des impulsions monétaires.
4.1 Présentation des modèles :
Les modèles qu’on cherche à estimer seront donc sous la forme suivante :
Une première spécification du modèle, incluant un taux obtenu par la régression du taux moyen pondéré interbancaire sur la liquidité bancaire, pour palier le problème d’exogénéité forte que crée la corrélation du terme d’erreur total avec les variables explicatives. Cette spécification du TMP trouve sa justification dans le fait que le TMP est un taux piloté par la banque centrale en vue de contrôler la liquidité sur le marché interbancaire[22].
(1)
Avec :
- i = 1..8,
- t = 1ère semestre / 2000..2ème semestre/ 2008.
Pou mesurer le pouvoir explicative des taux de bons de Trésor sur l’offre de crédit, et du fait qu’aujourd’hui les crédits bancaires au Maroc sont indexés sur les bons de Trésor, une deuxième estimation s’est faite en introduisant le taux des bons de Trésor à 5 ans :
(2)
Une dernière estimation, incluant le taux cible reconstitué à partir des taux des interventions de Bank Al-Maghrib sur le marché interbancaire :
(3)
Cette dernière spécification n’a pas aboutit à des résultats significatifs.
Respectant le cheminement des étapes énoncées dans le cadre théorique, un des premiers tests que l’on vérifie pour l’estimation en données de panel, est le test de spécification des effets individuels d’Hausman.
4.2 Test de spécification d’Hausman
En présence d’un modèle à effets individuels, la question qui se pose immédiatement est de savoir comment ces effets individuels doivent être spécifiés : doit-on adopter l’hypothèse d’effet fixe ou au contraire l’hypothèse d’effets aléatoires ?
D’un point de vue pratique, le modèle à effets fixes est coûteux en termes de pertes de degrés de liberté. Cependant, l’hypothèse du modèle à effets aléatoires qu’il n’y pas de corrélation entre les effets individuels et les autres régresseurs est peu justifiée[23]. Le test de spécification d’Hausman (1978) est un test général qui peut être appliqué à des nombreux problèmes de spécification en économétrie. Mais son application la plus répandue est celle des tests de spécification des effets individuels en panel[24]. Il sert ainsi à discriminer les effets fixes et aléatoires.
Les résultats de ce test est présenté dans le tableau 4 (voir annexe), nous laisse conclure que le modèle individuel à effets fixes est plus adéquat pour la spécification des trois modèles statiques présentés ci-dessus.
Modèles statiques | ||
Modèle avec le TMP | Modèle avec le taux des BDT à 5 ans | |
Statistique de Khi deux | 0.053281 | 2.0453000 |
p-value | (0.9997) | (0,0786) |
Tableau 1 : Résultats du test de Hausman des modèles statiques
Pour l’estimation des trois modèles statiques par la méthode « within », on a choisi les deux premières spécifications qui nous ont permis d’avoir des résultats satisfaisants de point de vue économique. En effet, la dernière spécification incluant le taux cible, n’a pas aboutit à des résultats significatifs compatibles avec la théorie économique.
Modèle 1 (Avec le TMP) | Modèle 2 (Avec le taux des BDT à 5 ans) | |||
PIB non Agricol | 0,835745 | 1,524508 | ||
(0,0219)*** | (0,0025)*** | |||
Taille Bancaire | 0,407563 | 0,449731 | ||
(0,0000)*** | (0,0059)*** | |||
TMP Interbancaire* | -1,068028 | – | ||
(0,0246)*** | – | |||
Bons de Trésor 5 ans | – | -1,299878 | ||
– | (0,0115)*** | |||
Méthode d’estimation | Within | Within | ||
Test de validation | ||||
R2 | 0,565619 | 0,511003 | ||
Durbin-Watson stat
|
1,965637
|
1,730184
|
Tableau 2 : Présentation des résultats d’estimation du modèle statique
NB :
- *, ** et *** indiquent les niveaux de significativité du rejet de l’hypothèse nulle, respectivement, 10%, 5% et 1%.
- Entre parenthèses : p-values.
- TMP interbancaire* est un taux obtenu suite à la régression du TMP sur les soldes des banques pour contrôler l’exogénéité forte.
Les résultats d’estimation obtenu dans les deux modèles, implique que l’offre de crédit est positivement lié au PIB non agricole réel et à la taille bancaire, mais il est négativement lié aux taux d’intérêt interbancaire et au taux des bonds de trésor à 5 ans[25]. En ce qui concerne les coefficients estimés, le coefficient associé au TMP semble être le plus pesant en termes d’explication, ceci vient prouver l’existence d’un canal du crédit.
Par contre dans le deuxième modèle le coefficient le plus pesant est celui de l’activité économique. Ceci nous laisse conclure que le modèle incluant le TMP est celui qui permet de capter au mieux l’effet de la politique monétaire sur l’offre de crédit. En analysant la qualité d’ajustement des deux modèles, il parait que les deux spécifications ont un bon ajustement.
Le test des modèles non emboités proposé par Davidson and Mackinnon (1993), fournit une méthode de choix entre deux modèles non emboités. L’idée du test repose sur le fait que si un modèle est bien spécifié, alors les valeurs prédites du deuxième modèle ne devrait pas avoir un pouvoir explicatif en estimant le premier modèle[26]. Soient :
H1 : (1)
H2 : (2)
Pour tester le modèle H1 contre le modèle H2, il faut d’abord estimer le 2éme modèle et récupérer ses valeurs prédites, et les ajouter dans le modèle 1 pour l’estimer :
(3)
Si le coefficient correspondant aux valeurs du modèle 2 est significatif, alors le modèle 1 et rejeté. De même il faut tester le modèle H2 contre le modèle H1 en estimant le modèle :
(4)
Et voir si le coefficient correspondant aux valeurs prédites du modèle est significatif ou non. Les résultats d’estimation des modèles 3 et 4 montrent que les coefficients est significatif, impliquent que le modèle 1 est dominé par le modèle 2. Par contre le coefficient n’est pas significatif ce qui justifie le fait que le modèle 2 n’est pas dominé par le modèle 1. Ces résultats nous laissent conclure que la meilleure spécification, est celle incluant le TMP comme mesure de l’effet de la politique monétaire sur l’offre de crédit. Ainsi les banques sont plus attentives aux évolutions du taux interbancaire qu’aux évolutions des bons de trésor à 5 ans[27].
Conclusion générale
Suite aux vastes mouvements de libéralisation des marchés et ses conséquences en termes, d’élargissement de l’activité bancaire, d’intensification de la concurrence et d’accélération du processus d’innovation financière, la conduite de la politique monétaire se trouve largement modifiée dans la mesure où le développement des innovations financière a entraîné une refonte du paysage financier dans le quel opère la politique monétaire.
Dans cette perspective, Le but de ce travail était d’étudier la dynamique de crédit dans la transmission de la politique monétaire au Maroc. Le choix d’une démarche économétrique, en données de panel, était dans le but d’augmenter le nombre d’observations, et de tenir en compte de l’hétérogénéité interbancaire en matière d’octroi de crédit.
Au terme de cette étude, il ressort que le canal de crédit opère au Maroc. Ce résultat prouvé par les différentes approches adoptées, nous laisse conclure que les banques sont sensibles aux évolutions du taux interbancaire et aussi aux évolutions du taux des bons de trésor à moyen terme. La politique monétaire influence cependant l’offre de crédit par le biais du taux interbancaire qui oriente l’évolution des taux de bons de trésor et qui impacte les conditions de financement des banques.
Toutefois, les banques marocaines réagissent à des degrés différents vis-à-vis les chocs de la politique monétaire. En effet, le niveau de la solidité bancaire, soit en termes de capitalisation bancaire, en termes de taille bancaire ou en termes de dépôts, qui constituent les principales mesures de la concurrence interbancaire, incite les banques à réagir proportionnellement aux chocs de la politique monétaire.
Malgré ces importantes conclusions, il reste à signaler qu’on aurait bien aimé étendre l’étude pour d’autres modèles, en vue d’étudier l’impact de la crise financière sur le canal de crédit au Maroc. Cependant, ce travail ouvre un vaste champ d’investigation et plusieurs prolongements pourraient être envisageables. Notamment, le développement d’une variante du modèle DSGE[28] , qui est en cours d’élaboration à la banque centrale, prenant en compte le rôle des banques dans la transmission de la politique monétaire via l’octroi de crédit.
[1] Scialom (2007), « Economie bancaire »,troisième édition, Repères, Paris, septembre, pp : 21-30.
[2] Scialom (2007), « Economie bancaire »,troisième édition, Repères, Paris, septembre, pp : 366-376..
[3] Les lettres de changes et les billets à ordres sont les deux papiers dont disposent les commerçants et qui peuvent être mobilisables auprès du banquier
[4] Taux d’escompte de BAM.
[5] Rapports de la politique monétaire de BAM: 1996-2001, pp : 15-38.
[6] Rapports de la politique monétaire de BAM: 1996-2001, pp : 15-42.
[7] Scialom (2007), « Economie bancaire »,troisième édition, Repères, Paris, septembre, pp : 406-408.
[8] Idem.
[9] Kashyap A. et Stein J. (2000), «What Do a Million Observations on Banks Say About the Transmission of Monetary Policy? », The American Economic Review, ^^:48.
[10] Bernanke S. (1990),”On the Predictive Power of Interest Rates and Interests Rates Spreads”, WorkingPaper n° 3486, pp: 341-352.
[11]Bernanke S. (1990), On the Predictive Power of Interest Rates and Interests Rates Spreads”, WorkingPaper n° 3486, pp: 356-362.
[12] Idem.
[13] Benjamin. M. Friedman et K. N. Kuttner (1992): “Money, Income, Prices and Interest Rates, American EconomicReview, pp: 122-125.
[14] Kashyap A. et J. Stein (1993), « Monetary Policy and the Bank Lending Channel », National bureau of economicresearch, workingpaper N° 4317, pp: 155.
[15] Barran Fernando & Virginie Coudert et Benoît Mojon (1994) : «Transmission de la politique monétaire et crédit bancaire, une application à cinq pays de l’OCDE», pp :69-74.
[16] Smal M.M et de Jager S. (2001), «The monetary transmission mechanism in South Africa», Occasional Paper No 16, pp: 324-326.
[17] Mésonnier J. (2005), « Capitalisation bancaire et transmission de la politique monétaire : une revue», Banque de France, Service d’études sur les politiques monétaire et financière, pp : 32-44.
[18] Christophe H, « L’Econométrie des Données de Panel Modèles Linéaires Simples», Ecole Doctorale Edocif, Séminaire Méthodologique, pp : 211-216.
[19] Christophe H, « L’Econométrie des Données de Panel Modèles Linéaires Simples», Ecole Doctorale Edocif, Séminaire Méthodologique, pp : 74-76..
[20] Christophe H. et Mignon V. (2005), « Une Synthèse des Tests de Racine Unitaire sur Données de Panel», pp : 78-85.
[21] Christophe H. et Mignon V. (2006), « Une Synthèse des Tests de Cointégration sur Données de Panel», Novembre, pp :94-102.
[22] Voir de même l’étude de Driscoll John .C (2004),« Does Bank Lending Affect Output? Evidence from the U.S. States», Journal of Monetary Economics, pp: 151-154.
[23] Christophe H. et Mignon V. (2006), « Une Synthèse des Tests de Cointégration sur Données de Panel», Novembre, pp :132-135.
[24] Christophe H, « L’Econométrie des Données de Panel Modèles Linéaires Simples», Ecole Doctorale Edocif, Séminaire Méthodologique, 78-81.
[25] Voir même l’étude de Kierzenkowski R. (2001), « Le canal étroit du crédit: une analyse critique des fondements théoriques», CREFED Université Paris Dauphine, Allocataire de Recherche, pp :54-62.
[26] Christophe H, « L’Econométrie des Données de Panel Modèles Linéaires Simples», Ecole Doctorale Edocif, Séminaire Méthodologique, pp : 211-213.
[27] voir tableau n°2 en annexe
[28] Les modèles DSGE, ou modèles dynamiques, stochastiques d’équilibre général, se sont des modèles permettant l’analyse de la politique monétaire dans des économies ouvertes. Un premier modèle est en cours d’élaboration à la banque centrale, impliquant une transmission de la politique monétaire par le taux d’intérêt. Une variante de ce modèle incluant le secteur bancaire, va tenir en compte de l’attitude potentielle de l’offre de crédit dans la transmission de la politique monétaire.
Annexes :
Caractéristiques des variables
Variable | Description | Fréquence | Période | Source |
Offre de crédit | Total de crédit accordé au secteur privé | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Activité économique | Indice d’ensemble de production industrielle, il regroupe les principaux secteurs industriels à l’exception du secteur agricole. L’existence d’une telle relation avec l’offre de crédit devrait être positive. | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
TMP | Ce taux est influencé directement par l’ensemble des interventions de la banque centrale sur le marché interbancaire en vue de contrôler la liquidité. La prise en compte de cette variable servira à étudier l’effet des chocs monétaires. | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Taux des BDT | Les taux des bons de trésor sont orientés par l’évolution du TMP. Ces variables vont permettre aussi d’analyser l’effet de la politique monétaire sur l’offre de crédit. | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Capitalisation bancaire | Une capitalisation bancaire importante devrait avoir un effet positif sur l’offre de crédit. | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Taille bancaire | La taille bancaire mesurée par l’actif bancaire sur le total actif du système bancaire est corrélée positivement avec l’offre de crédit. | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Dépôts | Les dépôts bancaires constituent la source principale de financement des opérations actives des banques. | Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Liquidité bancaire | Cette variable renseigne sur la capacité des banques à octroyer des crédits. Une liquidité importante devrait influencer positivement le comportement bancaire en matière d’octroi de crédit.
|
Semestrielle | 2000-2012 | BAM |
Offre de crédit | |
PIB non agricole | 5.02204 |
(0.00823)*** | |
TMP | 4.99938 |
(0.00840)*** | |
BDT5 ans | 7.11997 |
(0.00125) | |
Taille bancaire | 0.16751 |
(0.00080)*** | |
Capitalisation | 0.64300 |
(0.52831) | |
Dépôts | 4.74071 |
(0.01081)** | |
Liquidité bancaire | 3.65132 |
(0.02924)** |
Tableau : Résultats du test de non causalité de Granger
Variables | LLC statistique | IPS statistique | Hadri z-test |
Offre de crédit | -3.61850*** | -1.09116 | 5.94680*** |
(0.0001) | (0.1376) | (0.0000) | |
PIB non agricole | -3.12047*** | -0.05647 | 5.15701*** |
(0.0009) | (0.4775) | (0.0000) | |
TMP | -11.3895*** | -7.60073*** | 4.12231*** |
(0.0000) | (0.0000) | (0.0000) | |
BDT5 ans | -5.09060*** | -1.74058* | 8.48124*** |
(0.0024) | (0.5920) | (0.0000) | |
Taille bancaire | -3.86108*** | -1.69040** | 2.04279** |
(0.0001) | (0.0455) | (0.0205) | |
Liquidité bancaire | 25.4366 | -0.93567 | 4.02783*** |
(1.0000) | (0.1747) | (0.0000) | |
Dépôts | -5.76070*** | -3.84113** | 4.11778*** |
(0.0000) | (0.0001) | (0.0000) | |
Capitalisation | -2.26859 | -1.87161 | 1.98667** |
(0.0116) | (0.0306) | (0.0235) |
Tableau : Résultats des tests de racine unitaire
Offre de crédit | |
PIB non agricole | 0,662 |
TMP | -0,571 |
BDT5 ans | -0,397 |
Taille bancaire | 0,809 |
Liquidité bancaire | 0,537718377 |
Dépôts | 0,228464543 |
Capitalisation bancaire | 0,02445656 |
Tableau : Coefficients de corrélation
Modèle 1 vs 2 | Modèle 2 vs 1 | ||
Résultats | 1.0543 | – | |
[0.0009] | – | ||
– | -0.1126 | ||
– | [0.6397] |
Tableau 3 : Présentation des résultats du test des modèles non emboités