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DEFICITS JUMEAUX DANS UNE ÉCONOMIE EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT CAS DU MAROC : UNE MODÉLISATION VECTORIELLE AUTORÉGRESSIVE (VAR)

 

DEFICITS JUMEAUX DANS UNE ÉCONOMIE EN VOIE DE DÉVELOPPEMENT CAS DU MAROC : UNE MODÉLISATION VECTORIELLE AUTORÉGRESSIVE (VAR)

MELLOUL Anass

 CHENNAOUI Abdelhak

Doctorant au laboratoire de recherche en « Economie Appliquée », Université Mohamed V- RABAT, Faculté de Salé, anas.mell90@gmail.com

Cadre Administratif, ifrschen@gmail.com

Résumé

L’objectif de ce papier est d’examiner le lien empirique entre le déficit budgétaire et le déficit du compte courant dans le cas de l’économie Marocaine, d’ailleurs notre objectif est la validation empirique de la Proposition de l’Equivalence de Ricardo (PER)[1] ou la vision conventionnelle keynésienne[2], dans le cadre des économies en développement, le Maroc comme exemple.

 

En effet, l’absence d’un lien de causalité entre le déficit budgétaire et du compte courant signifie la validation de la PER au détriment de la vision conventionnelle keynésienne. Par contre, l’existence d’une relation significative de long terme entre les deux déficits met en évidence leur dépendance et valide, par conséquence, la vision conventionnelle. Par ailleurs, bien que le sens de causalité prédictible soit plutôt du déficit intérieur vers le déficit extérieur, le sens inverse est également testé.

 

La méthode économétrique utilisée se base sur la Modélisation VAR (VECTEUR AUTOREGRESSIF) et l’examen de la causalité entre les deux variables. Des tests de robustesse des résultats sont également appliqués.

 

Toutefois, sont au préalable exposés les fondements théoriques de la problématique des « déficits jumeaux ». Une revue des principaux résultats empiriques en la matière est également établie. Différentes issues relatives aux données et à la méthodologie sont par ailleurs discutées. Enfin, sont synthétisés, les résultats des différentes estimations économétriques ainsi que leurs implications en matière de politique économique.

Les données utilisées sont annuelles et couvrent la période de 1990 à 2012. Les résultats sont plutôt en faveur de  la vision conventionnelle Keynésienne. D’après les tests de DFA[3] , les deux variables sont stationnaires, ainsi le Test de cointégration par la méthode de Johansen nous démontrons que les deux déficits ne sont pas cointégrés. En effet, le test de causalité montre l’existence d’une causalité unidirectionnelle de déficit courant vers le déficit budgétaire.

 

Mots clés : Déficit budgétaire, Déficit du compte courant, Stationnarité, Cointégration,

Causalité, Modèle VAR

 

 

PLAN

 

Introduction

Premier chapitre : REVUE DE LITTERATURE DES DEFICITS JUMEAUX

Section 1 : REVUE DE LITTERATURE ECONOMIQUE DES DEFICITS JUMEAUX

Section   2 : REVUE DE LITTERATURE EMPIRIQUE

Deuxième chapitre : MODELISATION ECONOMETRIQUE DES DEFICITS JUMEAUX DANS LE CAS MAROCAIN

Section   1 : METHODOLOGIE ET DISCUSSION

Section   2 : ANALYSE DES RESULTATS

 

Conclusion

INTRODUCTION

 

Dans les années 1980 les États unis menaient une politique monétariste appuyée par l’économiste FRIEDMAN et menée par Paul VOLCKER qui dirigeait la F.E.D. (FEDERAL RESERVE SYSTEM). Cette politique consistait à réduire l’inflation à travers la hausse des taux d’intérêt, ce qui avait pour cause une chute de la production et une récession de l’économie américaine, cependant l’inflation a été ramenée à seulement 3,2 %. Suite à cette politique, la hausse des taux d’intérêt a entraîné une appréciation du dollar ce qui a pénalisé les exportations et a engendré par la suite un déficit commercial[4].

 

En plus, l’Administration Reagan présente, dès 1981, le « PROGRAM FOR ECONOMIC RECOVERY », le « RECOVERY TAX ACT » (1981) et la « TAX REFORM ACT » (1986), sous l’influence des « SUPPLY SIDERS » (partisans de l’offre) et parmi eux l’économiste LAFFER qui a influencé Reagan à revoir à la baisse les impôts en lui montrant que ‘’Trop d’impôts tue l’impôt’’ et que la réduction d’impôts incite les entreprises à investir plus d’où une augmentation des recettes fiscales. Ainsi, les impôts4 sur le revenu et les taxes sur les entreprises diminuent-ils de 23% entre 1981 et 1983. Pourtant l’administration Reagan n’a pas pu contrecarrer les dépenses publiques suite à la course à l’armement avec son programme « AMERICA IS BACK » durant la période de la guerre froide, puisqu’en 1988, le budget de la défense franchissait les 400 milliards de dollars, ce qui représentait 7% du P.I.B. américain. Ainsi, cette hausse des dépenses publiques, accompagnée d’une réduction des impôts ont creusé le déficit budgétaire, celui-ci triple entre 1980 et 1986 et le déficit du compte courant passe à 150 Milliards de dollars en 1987, ce qui a conduit à l’apparition des déficits jumeaux « TWIN DEFICITS » à la moitié des années 1980[5].

 

Ce papier se focalise sur la notion des « déficits jumeaux » dans le cas d’une économie en voie de développement, le Maroc. En effet, bien que de nombreuses études se sont intéressées à l’examen des liens qui peuvent exister entre les deux déficits, budgétaire et du compte courant, aucun consensus n’existe à l’heure actuelle quant à la nature exacte de la relation entre les deux agrégats.

 

Entre la vision conventionnelle Keynésienne et l’approche ricardienne, la nature de la relation entre les deux déficits, budgétaire et de compte courant, reste floue. En effet, d’une part, l’approche conventionnelle soutient l’existence d’un lien direct entre les deux déficits. D’autre part, la Proposition de l’Equivalence de Ricardo suppose qu’un accroissement du déficit budgétaire (et notamment à travers l’augmentation des dépenses publiques pour un niveau constant de recettes fiscales et ce à travers le recours à l’endettement), n’ait pas d’effet sur le compte courant.

 

De nombreuses interrogations sont posées aussi bien par les économistes que par les décideurs en matière de politique économique. Les deux déficits sont-ils indépendants ou au contraire corrélés ? Et s’ils sont inter reliés, c’est dans quel sens que la causalité au sens de Granger existe? A ses interrogations, les réponses dénombrées jusqu’à présent, sont multiples et parfois contradictoires.

 

 

La problématique de notre papier, consiste à savoir si les deux déficits sont réellement co-intégrés ou bien leur corrélation n’est qu’une coïncidence statistique, et ce dans le cas particulier du Maroc.

 

L’intérêt porté à cette question, peu novatrice à première vue, se justifie plutôt par ses implications en matière de politique économique. En effet, la mise en évidence d’une relation de long terme entre les deux déficits signifie une reconsidération des politiques commerciale et budgétaire étant donnée leur interdépendance. Par ailleurs, la détermination d’un sens de causalité entre les deux agrégats implique inéluctablement la redéfinition de la relation entre les deux déficits. Lequel des deux déficits est instrument et lequel est objectif?

 

La détermination de la relation entre déficit budgétaire et déficit du compte courant revêt une importance particulière pour le Maroc à plusieurs égards. Ainsi des déficits persistants du compte courant posent des problèmes d’appliquer des mesures de stabilisation, ces mesures qui nécessitent une réduction du déficit public jouent un rôle important dans la politique économique de pays, il serait donc important de voir l’impact de cette variable sur le déficit du compte courant extérieur.

 

PREMIER CHAPITRE : REVUE DE LITTERATURE DES DEFICITS JUMEAUX

 

SECTION 1 : REVUE DE LITTERATURE ECONOMIQUE DES DEFICITS JUMEAUX

 

Dans les années 1980 les États unis menaient une politique monétariste appuyée par l’économiste FRIEDMAN et menée par Paul VOLCKER qui dirigeait la F.E.D. (FEDERAL RESERVE SYSTEM). Cette politique consistait à réduire l’inflation à travers la hausse des taux d’intérêt, ce qui avait pour cause une chute de la production et une récession de l’économie américaine, cependant l’inflation a été ramenée à seulement 3,2 %. Suite à cette politique, la hausse des taux d’intérêt a entraîné une appréciation du dollar ce qui a pénalisé les exportations et a engendré par la suite un déficit commercial.

 

En plus, l’Administration Reagan présente, dès 1981, le « PROGRAM FOR ECONOMIC RECOVERY », le « RECOVERY TAX ACT » (1981) et la « TAX REFORM ACT » (1986) , sous l’influence des « SUPPLY SIDERS » (partisans de l’offre) et parmi eux l’économiste LAFFER qui a influencé Reagan à revoir à la baisse les impôts en lui montrant que ‘’Trop d’impôts tue l’impôt’’ et que la réduction d’impôts incite les entreprises à investir plus d’où une augmentation des recettes fiscales. Ainsi, les impôts sur le revenu et les taxes sur les entreprises diminuent-ils de 23% entre 1981 et 1983.

 

Pourtant l’administration Reagan n’a pas pu contrecarrer les dépenses publiques suite à la course à l’armement avec son programme « AMERICA IS BACK » durant la période de la guerre froide, puisqu’en 1988, le budget de la défense franchissait les 400 milliards de dollars, ce qui représentait 7% du P.I.B. américain. Ainsi, cette hausse des dépenses publiques, accompagnée d’une réduction des impôts ont creusé le déficit budgétaire, celui-ci triple entre 1980 et 1986 et le déficit du compte courant passe à 150 Milliards de dollars en 1987, ce qui a conduit à l’apparition des déficits jumeaux « TWIN DEFICITS » à la moitié des années 1980.

Entre la vision conventionnelle et l’approche ricardienne, la nature de la relation entre les deux déficits, budgétaire et de compte courant, reste floue. En effet, d’une part, l’approche conventionnelle soutient l’existence d’un lien direct entre les deux déficits. D’autre part, la Proposition de l’Equivalence de Ricardo suppose qu’un accroissement du déficit budgétaire (et notamment à travers l’augmentation des dépenses publiques pour un niveau constant de recettes fiscales et ce à travers le recours à l’endettement), n’ait pas d’effet sur le compte courant.

 

 

Selon l’analyse macroéconomique traditionnelle, le fondement théorique de la relation entre les deux déficits est l’équation suivante :

 

                                                   CC = S p − I − (G −T)    [I]

Avec:

CC : Le compte courant ; S p : L’épargne privée ; I : L’investissement privé ; G : Les dépenses publiques ; Et T : Les recettes fiscales.

 

Selon l’équation [I], le solde courant CC est directement lié au déficit budgétaire (G −T) défini comme étant la différence entre les dépenses publiques et les recettes fiscales collectées auprès des ménages et des entreprises.

 

Si la différence entre l’épargne des ménages et l’investissement (Sp –  I) est constante, tout accroissement du déficit budgétaire (et notamment une hausse des dépenses publiques à recettes fiscales constantes) affecte positivement le compte courant. Néanmoins, la littérature relative aux « déficits jumeaux » ajoute à cette relation mécanique découlant de l’équation [I], l’effet du taux d’intérêt dans la prédiction de l’évolution du compte courant suite à une variation du déficit budgétaire.

 

 

Par opposition à la vision conventionnelle, la PER soutient l’hypothèse selon laquelle le déficit budgétaire et le déficit courant sont indépendants l’un de l’autre. Sous certaines hypothèses, et pour un niveau donné de dépenses publiques, le déficit budgétaire n’affecte pas le compte courant. L’explication de cette neutralité repose sur l’idée suivante : Dans la mesure où toute réduction des impôts courants est nécessairement accompagnée par un accroissement équivalent des impôts futurs, toute politique fiscale (réduction des impôts courants et financement des dépenses publiques par endettement) semble ne pas affecter la consommation des ménages ou l’épargne nationale. En conséquence, elle est sans effet sur la production nationale, la consommation des ménages, les taux d’intérêt, la balance commerciale et le solde courant.

Toutefois, la PER reste pour de nombreux économistes un idéal qui ne peut être atteint dans la mesure où sa validité dépend étroitement d’un certain nombre d’hypothèses assez fortes. Ces hypothèses telles que synthétisées au niveau de la littérature sont au nombre de sept :

[1] Les marchés de capitaux sont parfaits ; [2] Les agents économiques et surtout les consommateurs sont rationnels et avisés ; [3] Les générations successives sont liées par des liens d’altruisme motivant des transferts entre elles ; [4] Le report de la charge fiscale n’a pas d’effet de redistribution entre agents économiques ; [5] Les taxes sont collectées forfaitairement par tête ; [6] L’utilisation du déficit n’est pas créatrice de valeur ; [7] l’existence du déficit financé par l’instrument fiscal n’altère pas le processus électoral.

 

Entre une vision traditionnelle affirmative d’un lien significatif entre les déficits budgétaire et du compte courant, et une approche ricardienne, demeurant hypothétique, bien que niant ce lien, les études empiriques trouvent toute leur légitimité.

 

SECTION 2 : REVUE DE LITTERATURE EMPIRIQUE

 

L’importance des déficits budgétaires et extérieurs qu’ont connus les Etats-Unis au cours des années 80 a contribué à l’apparition d’une abondante littérature empirique sur la question des déficits jumeaux. Toutefois l’un des premiers travaux sur la question remonte à 1977. Dans une étude sur 38 pays, E. Milne souligne l’importance des déficits budgétaires dans la détermination des déficits commerciaux. Les études qui suivent aboutiront à des résultats contradictoires.

 

Ainsi Summers (1986), obtient des résultats qui tendent à confirmer l’hypothèse d’existence de déficits jumeaux dans le cas des Etats-Unis. De même, Bernheim (1988), obtient que plus du tiers du déficit commercial des Etats-Unis et quatre de ses partenaires commerciaux peuvent être expliqués par le déficit budgétaire. En 1990, Kearney et Monadjenni utilisent des techniques de vecteurs auto régressifs (VAR) afin de tester l’hypothèse pour huit pays de l’OCDE depuis la fin du système de taux de change fixes. Ils aboutissent à la conclusion que la relation entre les deux déficits n’est pas toujours claire et dépend du mode de financement du déficit fiscal.

 

L’un des travaux les plus importants sur la question est celui de Normandin (1994). Dans ce travail, l’auteur fait appel au modèle de générations imbriquées proposé par Blanchard (1985). Ce modèle combine l’hypothèse des déficits jumeaux (il y a une relation entre les deux déficits) et l’hypothèse d’équivalence ricardienne (il n’y a aucun lien entre les déficits). Cette combinaison impliquant que les consommateurs prévoient les déficits budgétaires futurs en tenant compte de l’évolution des deux déficits.  A partir de ce modèle, il évalue la relation liant les déficits extérieur et budgétaire pour les Etats-Unis et le Canada. Il obtient une réponse positive du déficit extérieur à une augmentation du déficit budgétaire au Canada, alors que cette réponse n’est pas statistiquement positive pour les Etats-Unis.

 

Le travail qui se rapproche le plus de l’esprit de ce rapport de recherche est celui de Fidrmuc (2002). Basé sur l’approche intertemporelle de la balance des paiements, il vérifie l’existence d’une relation de long terme entre le compte courant, le solde budgétaire de L’Etat et d’autres facteurs comme l’investissement. L’étude porte sur 18 pays, la plupart étant des membres de l’OCDE ou des pays d’Europe de l’est en transition vers l’économie de marché et comprend un pays en développement (le Mexique). Les données utilisées sont trimestrielles et couvrent les années 1970 à 2001. L’estimation de la relation avec les séries chronologiques pour les différents pays ne permet pas de vérifier l’hypothèse des déficits jumeaux dans la plupart des cas. Par contre une comparaison en coupe instantanée indique une relation positive entre les deux déficits.

 

 

Peu d’études empiriques se sont intéressées spécifiquement au cas des pays en développement. Même si ces pays sont parfois inclus dans les échantillons de ces études, elles ne font pas l’objet d’une attention particulière.

 

On pourrait cependant citer Calderon, Chong et Loayza (2002) dont le papier porte sur les différents déterminants du compte courant dans 44 pays en développement avec des données annuelles allant de 1966 à 1995. Si cette étude ne vise pas spécifiquement à déterminer si une relation de long terme existe entre les deux déficits, il décèle toutefois un impact positif de l’épargne publique sur le compte courant.

 

Les principaux résultats des différentes études auxquelles il est fait référence dans notre revue de la littérature empirique sont synthétisés dans le tableau ci-dessus.

 

Tableau 1 : Principaux résultats de quelques études empiriques portant sur la relation

Entre les deux déficits

Auteurs Echantillon Période Principaux résultats
Ahmed et

Ansari [1994].

Le Canada 1973-1991(DA) Le déficit courant est lié au déficit budgétaire mais aussi à l’écart entre épargne et investissement.
Anoruo et

Ramchander

[1998].
Cinq pays en développement du Sud Est asiatique[7]. Des périodes variables selon la disponibilité de données[8]. (DA) Le sens de causalité validé entre les deux déficits est plutôt du déficit courant vers le déficit budgétaire et ce, dans le cas de quatre sur cinq pays de l’échantillon. Et même pour le cinquième pays, à savoir la Malaisie, le phénomène des « déficits jumeaux » a été validé. Toutefois, la causalité s’est avérée bidirectionnelle.
Fidrmuc [2003] Une sélection de dix pays développés, et en transition[9]. 1980-2001(DA) Vérification du phénomène des déficits jumeaux dans certains pays de l’échantillon avec des différences notables entre la première décennie de la période étudiée et la seconde.
Hatemi et

Shukur [2002].

Les Etats-Unis 1975-1998 (DT) La validation empirique du lien de causalité entre les deux déficits. Néanmoins, durant la période de

1975-1989, la causalité au sens de Granger est du déficit budgétaire vers le déficit du compte courant alors que de 1990 jusqu’à 1998, c’est dans le sens opposé que la causalité a été validée.

Islam [1998]. Le Brésil 1973-1991 (DT) La causalité au sens de Granger entre les deux déficits est validée dans les deux sens.
Kasibhatla et al. [2001]. Les Etats-Unis 1959-1993 (DT) Le déficit budgétaire cause au sens de Granger le déficit courant.
Kaufmann et al. [2002]. L’Australie 1986-1998(DT) Le lien empirique entre les deux déficits n’a pas été validé.
Kouassi et al. [2004]. Un échantillon de vingt pays dont la moitié est en développement. Des périodes variables selon la disponibilité de données mais globalement entre 1969 et

1998. (DA)

Validation du lien causal (unidirectionnel ou bidirectionnel) entre les deux déficits dans le cas de certain pays en développement mais globalement les résultats se sont avérés mixtes :

·         Une relation de causalité mais dans le sens inverse c’est-à-dire du déficit courant vers le déficit budgétaire dans le cas de la Corée.

·         Une relation d’effet retour (une causalité dans les deux sens) pour la Thaïlande.

L’effet de causalité de long terme dans les pays développés est peu évident. C’est uniquement dans le cas de l’Italie que la causalité a été validée dans un seul sens du déficit courant vers le déficit budgétaire.

(DA) signifie Données Annuelles.

(DT) signifie Données Trimestrielles.

DEUXIEME CHAPITRE : MODELISATION ECONOMETRIQUE DES DEFICITS JUMEAUX DANS LE CAS MAROCAIN

 

SECTION 1 : METHODOLOGIE ET DISCUSSION

La méthodologie adoptée repose sur la Modélisation VAR (Vector Autorégressive) dans un cadre à deux variables. Les tests de stationnarité et de Co-intégration sont au préalable appliqué aux différentes séries temporelles. Ensuite les liens de causalité aussi bien dans un sens (du déficit budgétaire vers le déficit commercial) que dans l’autre (du déficit commercial vers le déficit budgétaire) sont examinés. Enfin, des tests de robustesse des résultats sont appliqués aux différentes régressions.

 

En vue d’analyser le lien empirique entre déficit budgétaire et déficit du compte courant, nous procédons en quatre étapes. La première étape consiste à déterminer le degré d’intégration de chacune des variables. La littérature économétrique propose plusieurs tests statistiques pour déterminer le degré d’intégration d’une variable. Les tests les plus utilisés sont les tests de Dickey-Fuller Augmenté (ADF) et Phillips-Perron (PP). Ensuite, Une fois déterminé l’ordre d’intégration des séries, l’étape suivante consiste à examiner la présence éventuelle d’une relation de cointégration entre le déficit budgétaire et le déficit du compte courant. Plusieurs procédures ont été suggérées pour tester la présence de cointégration entre deux ou plusieurs variables. Nous appliquons le test de cointégration de Johansen. Puis le test de causalité au sens de Granger entre les deux variables. Enfin une modélisation VAR pour valider le modèle empirique.il faut noter que Le logiciel utilisé pour l’estimation EVIEWS.

 

Pour l’examen des liens de causalité entre les deux déficits, nous adoptons l’approche développée par Engle et Granger (1987).

 

Une question essentielle concernant la spécification de modèle est de savoir, si une variable possède un lien de causalité avec une autre ou non. Afin de fournir une réponse à cette question, Granger (1969) a développé un nouveau concept de lien de causalité qui est désormais connu sous l’appellation « lien de causalité dans le sens de Granger ». Expliqué d’une manière synthétique, il s’agit simplement de déterminer si une variable x « cause selon Granger » une variable y en observant tout d’abord dans quelle mesure les valeurs passées de y arrivent à expliquer la valeur actuelle de y et devoir par la suite l’amélioration de l’estimation grâce à la prise en compte de valeurs retardées de la variable x.

 

La variable Y peut être considérée comme « causée selon Granger » si la variable x est déterminante dans l’estimation de y ou encore, d’une manière équivalente, si les coefficients des valeurs retardées de la variable x sont significativement différents de zéro.

 

. Cela me permet à estimer les deux modèles suivants (en supposant que les variables X et Y sont stationnaires) :

 

    Yt =   Xt-1 +  Yt-j + ɛt

 

Xt =  Yt-1+ Xt-j+ ɛt

Suivant ces modèles trois cas sont possibles :

 

 

 

 

2.1. Données et variables

Les données utilisées[10] sont annuelles et couvrent la période allant de 1990 à 2012. Pour le solde des transactions courantes les données sont extraits du Haut-Commissariat au Plan (HCP), alors que pour le solde budgétaire la source des données est le Ministère d’Economie et des Finances (Voir annexe 1).

Au total deux variables, sont définies pour l’examen du lien causal entre déficit budgétaire et déficit du compte courant :

 

 

La première étape de l’analyse consiste à examiner la stationnarité des séries temporelles. Les tests de Dickey Fuller[11]  sont appliqués aux séries brutes et aux séries en différences premières.

Les trois modèles de base servant à la construction des tests DFA sont alors estimés par la méthode des Moindres Carrés Ordinaire (MCO) sous l’hypothèse alternative   < 1

Δxt = ϕxt-1  j Δxt-j+1 + εt                 [1] ;

Δxt = ϕxt-1  j Δxt-j+1 + c + εt          [2] ;

Δxt = ϕxt-1  j Δxt-j+1 + c + bt+ ε[3] ;

Avec       εt →   i.i.d.

On teste l’hypothèse Ho : φ=0 (présence de racine unitaire) contre l’hypothèse H1 : φ=1 (absence de racine unitaire donc stationnarité). On rejette l’hypothèse nulle lorsque la valeur statistique calculée est inférieure à la valeur tabulée (de Mackinnon, 1991) ou lorsque la probabilité associée est inférieure à 5%.

 

Les tests de la racine unitaire ont été réalisés sous les trois spécifications possibles du modèle, avec constante, avec constante et tendance, et sans constante, ni tendance. Les résultats des tests DFA démontrent que les deux séries temporelles ne sont pas stationnaires en niveau. Néanmoins, les tests de DFA appliqués aux différences premières rejettent l’hypothèse nulle de la racine unitaire pour un seuil de confiance de 1%, 5% et 10%. Etant données que les différences premières sont stationnaires, les deux variables sont alors intégrées du même ordre (I (1)).

 

Par ailleurs, les tests de Philips et Perron (PP) confirment les résultats des tests de DAF.

Les résultats du test de stationnarité sont résumés dans le tableau ci-après.

 

Tableau 2 : Test de stationnarité

 

TEST DE STATIONNARITE (Au seuil de 5%)
Variables Stationnarité Dickey-Fuller (ADF) Phillips-Perron Stationnarité
Oui/Non Ordre d’Intégration Valeur des

Statistiques

Valeur Critique

 

Valeur des

Statistiques

Valeur Critique Oui/Non Ordre d’Intégration
DEFBUD : Bt

 

Oui I (1)

 

-4.472144 -1.958088 -4.503075 -1.958088 Oui I (1)

 

DEFCOURANT : Tt Oui I (1)

 

-3.284915 -1.958088 -3.254125 -1.958088 Oui I (1)

 

Source : Elaboration personnel à partir des données sous- EVIEWS 5

 

Le choix du retard optimal est fondé sur les critères d’information à minimiser, notamment les critères d’information d’Akaike, de Schwarz et de Hannan-Quinn.

 

Tableau 3 : Détermination du nombre de retards

 

Source : Elaboration personnel à partir des données sous- EVIEWS

 

Le calcul des critères d’information LR, FPE, AIC, SC et HQ pour des retards allant de 1 à 3 – nous avons choisi cette fourchette de retards compte tenu du faible nombre d’observations (23 observations) montre que le retard qui peut être retenu est de 2. En effet, trios critères d’information (FPE, AIC et HQ) parmi les cinq indiquent que le nombre de retard à retenir est de 2, on va ainsi pouvoir procéder au test de Johansen sur un modèle VAR (2).

 

Ce test permet d’identifier clairement la véritable relation entre les variables en recherchant l’existence de vecteurs de cointégration et en éliminant leurs effets, le cas échéant. En effet, le risque d’estimer des relations « fallacieuses » et d’interpréter les résultats de manière erronée est très élevé.

 

Tableau 4 : Test de la trace

Hypothèse nulle Valeur propre Statistique

Trace

Valeur critique 5% Prob.
Aucune 0.306033 8.507496 15.49471 0.4128
Au plus une 0.058276 1.200865 3.841466 0.2731

Source : Elaboration personnel à partir des données sous- EVIEWS

 

Le test de la Trace indique l’absence d’une relation de cointégration entre les deux variables au seuil de 5%.

H: les deux variables ne sont pas Cointégrés

H1 : les deux variables sont Cointégrés

Si p-value (prob) est inférieur à 5% on rejette H0 et on accepte H1.

Si p-value (prob) est supérieur à 5% on accepte H0 et on rejette H1.

Dans notre étude p-value 0,4128 et 0,27 31 sont supérieur à 5% donc on accepte H0 c’est-à-dire les deux variables ne sont pas cointégreés.

 

 

L’analyse des relations causales entre variables économiques permet une meilleure appréciation des phénomènes économiques. Elle fournit des éléments supplémentaires sur l’antériorité des événements entre eux et facilite l’application de politique économique optimisé.

L’hypothèse nulle de non causalité est acceptée si la probabilité associée est supérieure ou égale à 0,05.

Hypothèse de test :

Y2t ne cause pas Y1t, si l’hypothèse suivante est acceptée H0 : b11= b12 = … = b1p

 

Y1t ne cause pas Y2t, si l’hypothèse suivante est acceptée H0 : a12 = a22= … = a2p

Règle de décision au seuil α = 5% :

Si la p – value > 5%, alors on accepte l’hypothèse H0.

 

 

 

 

 

Tableau 6 : Test de causalité au sens de Granger entre DEFBUD et DEFCOURANT

 

Source : Elaboration personnel à partir des données sous- EVIEWS

 

Le test de causalité conduit sur les différentes premières des variables indique qu’au seuil de 5%, il existe une relation de causalité entre DEFCOURANT vers DEFBUD (DEFCOURANT cause DEFBUD) car p-value (0.00887) est inférieur à 5%. Par contre, il n’existe pas une relation de causalité de DEFBUD vers DEFCOURANT (DEFBUD ne cause pas DEFCOURANT) car p-value (0.05526) est supérieur à 5%. Donc on constate que la connaissance des valeurs passées et présentes de déficit courant permet une meilleure prédiction future de déficit budgétaire.

 

L’absence de cointégration entre les variables DEFCOURANT et DEFBUD mais l’existence d’une relation de causalité entre DEFCOURANT vers DEFBUD, nous conduit à nous intéresser à la modélisation VAR (plus particulièrement au modèle VAR(p) avec 2 variables qui sont DEFCOURANT et DEFBUD).

 

Tableau 7 : Estimation modèle VAR

Source : Elaboration personnel à partir des données sous- EVIEWS

 

 

Equation 1 : DEFBUDt = C (1) *DEFBUD t-1(-1) + C (2) *DEFBUD t-2(-2) + C (3)
        *DEFCOURANT t-1(-1) + C (4) *DEFCOURANT t-2(-2) + C (5)

 

Equation 2 : DEFCOURANTt = C (6) *DEFBUD t-1 (-1) + C (7) *DEFBUD t-2 (-2) +
C (8) *DEFCOURANT t-1(-1) + C (9) *DEFCOURANT t-2 (-2) + C (10)

 

Remplaçant les coefficients dans les deux équations on a :

 

Equation 1

DEFBUDt = 0.4255937872*DEFBUDt-1(-1) + 0.2914797683*DEFBUDt-2(-2) + 0.2666185837*DEFCOURANT (-1) t-1 + 0.2285464567*DEFCOURANTt-2(-2) – 3929.072273

 

Equation 2

DEFCOURANTt = – 0.4452417448*DEFBUD t-1(-1) + 0.9130684565*DEFBUD t-2 (-2) + 1.282972932*DEFCOURANT t-1(-1) – 0.05665714043*DEFCOURANT t-2(-2) + 2164.309374

 

Dans les estimations, la première équation est significative où la valeur retardée de déficit budgétaire explique significativement sa valeur présente et la valeur de déficit courant (voir test de wald), car le p-value (0,0016) est inférieur à 5%.

 

 

Source : Elaboration personnel à partir des données sous- EVIEWS

 

 

SECTION 2 : ANALYSE DES RESULTATS

Les données utilisées sont annuelles et couvrent la période de 1990 à 2012. Les résultats sont plutôt en faveur de la vision conventionnelle Keynésienne. D’après les tests de DFA les deux variables sont stationnaires, avec le Test de cointégration par la méthode de Johansen nous démontrons que les deux déficits ne sont pas cointégrés. En effet, le test de causalité montre l’existence d’une causalité unidirectionnelle de déficit courant vers le déficit budgétaire.

 

L’analyse des variances fournit des informations quant à l’importance relative des innovations dans les variations de chacune des variables du VAR. Elle nous permet de déterminer dans quelle direction le choc a plus d’impact. La décomposition de la variance de déficits jumeaux pour le Maroc, indique que la variance de l’erreur de prévision du (DEFBUD) est due à 9% à ses propres innovations, et de 91% par le déficit courant (DEFCOURANT), alors que la variance de l’erreur de prévision du (DEFCOURANT) est due à 92% à ses propres innovations, et de 8% par le déficit budgétaire (DEFBUD).

CONCLUSION

 

Le présent article est une contribution à la problématique de déficits jumeaux dans les pays peu développés en général et dans le cas Marocain en particulier. Notre objectif est d’examiner empiriquement la validité de l’une des deux approches de la théorie économique, la Proposition de l’Equivalence de Ricardo (PER) ou la vision conventionnelle. À travers une étude économétrique.

 

Les résultats économétriques sont plutôt en faveur de la vision conventionnelle. D’après les tests de DFA les deux variables sont stationnaires, le Test de cointégration par la méthode de Johansen nous a démontré que les deux déficits ne sont pas cointégrés. En effet, le test de causalité montre l’existence d’une causalité unidirectionnelle de déficit courant vers le déficit budgétaire, Cette étude conclut l’acceptation des « déficits jumeaux » dans le contexte Marocain. En conséquence, c’est l’approche conventionnelle qui l’emporte par rapport à l’approche PER dans le cas du Maroc. Donc le recours à une politique globale et unique intégrant à la fois les objectifs budgétaires et de commerce extérieur est souhaitable.

 

BIBLIOGRAPHIE 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LISTE DES ANNEXES

ANNEXE 1

 

BASE DES DONNEES DE L’ETUDE

Années Déficit budgétaire : Bt Déficit du compte courant : Tt
1990 -7 526 -1 721
1991 -7 515 -3 639,9
1992 -5 327 -3 747,9
1993 -6 015 -4 848,1
1994 -9 176 -6 652,7
1995 -14 553 -12 989,2
1996 -9 652 -5 462,2
1997 – 4613 -8 30,7
1998 -13 176 -1 380
1999 3 051 -1 637
2000 -20 525 -5 046
2001 -10 879 18 209
2002 -18 168 16 276
2003 -14 676 15 238
2004 -15 117 8 551
2005 -20 723 9 432
2006 -8 923 12 424
2007 4 045 -411,8
2008 2 697 -35 936,70
2009 -15 900 -39 873,90
2010 -35 764 -34 321,90
2011 -48 271 -64 608,10
2012 -57 560 -82 445,90

 

[1] La théorie de l’équivalence ricardienne (1821) postule que l’effet des dépenses publiques sur l’économie est totalement indépendant de la façon dont sont financées les dépenses et, tout particulièrement, du choix entre l’impôt (paiement immédiat), l’emprunt (paiement futur), voire la création monétaire. R. Barro (1974)

[2] Les fondements théoriques sont d’inspiration keynésienne

[3] Dickey Fuller Augmenté

[4] Charles, L. Reagan ou politiques économiques de l’ère de Reagan ,2011.

[5] Conférence d’économie de Mr. STEVANT, Semestre de printemps 2003.

[6] Les fondements théoriques sont d’inspiration keynésienne (et aussi en tenant compte des résultats du modèle Mundell-Fleming).

 

[7] Les cinq pays du Sud Est asiatique retenus sont : L’Inde, l’Indonésie, la Corée, Les Philippines et la Malaisie.

[8] Les séries les plus longues sont celles de l’Inde et des Philippines de 1960 à1993.

[9] L’analyse économétrique a porté sur les dix pays suivants : l’Australie, l’Autriche, le Canada, la Finlande, la France, les Pays Bas, l’Espagne, le Mexique, la Grande Bretagne et les Etats-Unis.

[11] Les tests Dickey Fuller simple [1979] ou Dickey Fuller Augmentés [1981] notés respectivement (DF) et (DFA).

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